Secteur public: une semaine qui sera marquée par trois grèves
Les travailleurs du secteur public québécois des secteurs de la santé, de l'éducation et des services sociaux tiennent une journée de grève à Montréal, le lundi 6 novembre. LA PRESSE CANADIENNE/Christinne Muschi
La semaine s’annonce tumultueuse dans les services publics au Québec, alors que trois grèves auront lieu à différents moments, mais elles se chevaucheront toutes jeudi.
D’abord le front commun, qui est composé de la CSN, de l’APTS, de la CSQ et de la FTQ, et qui représente 420 000 membres, lancera le bal avec son débrayage qui aura lieu les 21, 22 et 23 novembre. Il affectera les établissements de santé, de services sociaux, scolaires et collégiaux.
Puis la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), qui compte 80 000 infirmières et autres professionnelles en soins, débraiera à son tour les 23 et 24 novembre.
Et à compter du jeudi 23, ce sont les 66 000 enseignants de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) qui amorceront une grève générale illimitée.
D’autres journées de négociation ont été ajoutées au calendrier cette semaine; des comités de négociation discuteront donc durant l’exercice de la grève.
«On l’avait dit, nous, que s’il n’y avait pas de règlement avant le 21, on serait en grève. C’est clair qu’il n’y aura pas de règlement avant le 21. Nous, ce qu’on dit, c’est qu’on est prêt à négocier sept jours semaine, là. On veut un règlement», a lancé en entrevue François Enault, vice-président de la CSN.
Vendredi dernier, le premier ministre François Legault a assuré de sa bonne volonté et de son empressement à renouveler les conventions collectives qui concernent quelque 600 000 employés de l’État. «Je souhaite qu’on règle ça dans les prochains jours et qu’il n’y en ait pas de grève la semaine prochaine», a-t-il affirmé.
Mais ces trois grèves seront difficilement évitables, vu les maigres progrès aux tables.
«Le gouvernement n’a pas évité la première courte séquence de grève. Il n’a pas évité la deuxième séquence de grève. J’espère qu’il va comprendre qu’il devrait essayer de travailler pour éviter la troisième séquence de grève», a lancé M. Enault, de la CSN.
Vers une illimitée?
Le mandat de grève du front commun en est un de grève générale illimitée qui serait précédée de séquences de grève. La prochaine séquence pourrait donc être de quelques journées encore ou bien devenir illimitée.
«Présentement, le mandat qu’on a, oui ça pourrait être en grève générale illimitée quelque part en décembre, si les choses n’avancent pas. Mais on continue. La seule chose sur laquelle on est d’accord avec le gouvernement, c’est qu’on veut un règlement pour les Fêtes», a conclu M. Enault.
Entre autres, le front commun représente la majorité des enseignants du primaire et du secondaire au Québec, par l’intermédiaire de la CSQ. Dans les établissements de santé, il représente aussi les préposés aux bénéficiaires par l’intermédiaire de la CSN et de la FTQ. Et il représente aussi les techniciens et professionnels dans la santé et les services sociaux par l’intermédiaire de l’APTS. Il représente également des dizaines de milliers d’employés de soutien, tant dans le milieu scolaire que de celui de la santé.
La ministre demande de la souplesse
Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, la présidente du Conseil du Trésor, Sonia LeBel, a appelé les syndicats à plus de flexibilité.
Elle a rappelé que Québec avait déjà déposé quatre offres, la plus récente se chiffrant à huit milliards de dollars. «Et je n’ai pas de contre-offre, on ne m’offre rien en retour», a-t-elle déploré, soulignant que son gouvernement avait consenti à des «hausses de salaire historiques».
La ministre reconnaît que l’enjeu salarial est «important», mais appelle les syndiqués à plus de souplesse dans leurs demandes. «Si on ne fait que donner des augmentations de salaire, le quotidien de l’enseignant qui trouve sa classe trop difficile ne sera pas changé, a argumenté Mme LeBel. Celui de l’infirmière qui doit faire du temps supplémentaire obligatoire à la dernière minute et qui doit réorganiser sa faille et sa vie ne sera pas changé.»
«Nous avons la chance d’améliorer les conditions de travail et les services à la population, a poursuivi l’élue. On ne peut pas rater notre coup, il faut saisir l’opportunité.»
Une sortie qui a piqué au vif les syndicats.
«(Quatre) propositions méprisantes pour les professionnelles en soins et irresponsables pour la sécurité des soins, a publié la FIQ sur X. Madame Lebel, ce n’est pas le nombre d’offres qui compte, mais ce qu’elles contiennent. Il y a des limites!»
La CSN a également réagi sur X, rappelant à la présidente du Conseil du Trésor «qu’outre “les infirmières, les enseignantEs et les préposéEs aux bénéficiaires”. il y a plus de 300 autres titres d’emploi qui assurent le fonctionnement des services publics!»
«Des propositions, des signaux, on en a donné beaucoup à la table. C’est pas parce qu’on ne l’a pas étalé sur les médias sociaux que ça n’a pas été fait», a-t-on rajouté.
La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) a tenu à rectifier des faits avancés par Mme LeBel. «De nouveaux dépôts syndicaux ont été faits à toutes les tables sectorielles pour parler des conditions de travail justement. Mais le (gouvernement) ne veut même pas en discuter…»
La branche représentant Montréal, Laval et la Montérégie du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec a de son côté souligné que les 8 G$ offerts par le gouvernement «est étalé sur 5 ans et réparti à plus de 760 000 employés». «Ce qui représente pour certains une hausse d’un peu plus de 35$ par semaine sur leur chèque de paie (…) Tout est relatif».
L’Alliance des professeures et professeurs de Montréal a elle aussi rétorqué à la vidéo de Mme Lebel sur X, en indiquant que ses «demandes ont été déposées en octobre 2022» et depuis, maintes fois détaillées.
Elle consent toutefois qu’au-delà des augmentations salariales, les conditions en classe devront être revues pour attirer et retenir des enseignants.
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