C’est le plus beau de tous… le canard branchu 

Par Michel Paul Côté 1:36 PM - 27 septembre 2023
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Le mâle arbore son  plumage nuptial caractéristique de septembre à mai. Il n’y a que que pendant les mois d’été qu’il est un peu moins spectaculaire, pendant la mue. 

Il y a des injustices dans la vie. Les canards ne sont pas épargnés par cette triste réalité. Si on pose la question à savoir quel canard est le plus beau de tous, la réponse est unanime: le canard branchu. Il n’y a pas de deuxième place qui s’approche, même de loin, de cet oiseau spectaculaire. 

Aujourd’hui, 15 septembre, j’arpente lentement la plateforme longue de 1,2 km qui traverse un superbe marécage du parc national de Pointe Pelée, dans l’extrême Sud de l’Ontario. Encore Pointe Pelée ! J’y étais en mai  pour la migration printanière, j’y suis encore retourné pour la migration d’automne. Mais les passereaux sont déjà partis, et les canards tardent un peu. 

Je me contente d’observer le vol de bandes de centaines d’étourneaux qui se rassemblent pour le grand départ. Le marécage est tranquille. Un héron, deux aigrettes, une sterne qui fait du sur-place avant
de plonger pour capturer un
poisson. Tiens, un martin-pêcheur vient nous distraire pendant quelques minutes. Au loin, au-dessus des quenouilles, un rapace se rapproche. C’est un superbe pygargue, en chasse. Mais il change sa route et s’éloigne.

Un banc. Petite pose.

Alors que je regarde un peu distraitement les nénuphars qui perdent leur éclat vert avec l’arrivée de l’automne, un mouvement attire mon attention. Jumelles.

Le branchu est devant moi, à moins de 20 mètres, totalement indifférent à ma présence.

C’est un mâle en plumage nuptial. Le plus beau canard, celui qui donne des complexes à tous les autres.

Je passerai 30 minutes à l’observer. Il se nourrit d’herbes aquatiques,  et grimpe sur une branche qui flotte. Il se laisse admirer.

La tête semble avoir été peinte par un artiste qui aimait les couleurs et les contrastes: Bec rouge et blanc, avec des narines orangées, oeil rouge, joues vertes, longue huppe noire et blanche, croissant blanc au bas du cou. Il ne  laisse personne indifférent.

Légèrement plus petit que le Colvert, on le prendrait pour un canard barboteur, car il passe son temps sur l’eau des marécages. Il n’en est rien. Les biologistes le classent dans la catégorie des canards percheurs. 

En effet, ce canard, qui passe l’hiver aux États-Unis, nous revient en avril et établit son nid dans un trou d’arbre qui se trouve non loin d’un plan d’eau. La femelle décide de l’emplacement. D’ailleurs, le canard branchu ne refusera pas d’établir résidence dans un nichoir installé non loin d’un plan d’eau.

Le nid est rendu confortable par le duvet qu’elle arrache de sa poitrine. Elle pondra entre 12 et 15 œufs qu’elle couve pendant 28 jours. Le mâle joue un rôle de figurant dans ce couple éphémère qui s’est souvent formé pendant la migration. Il disparaît rapidement afin d’aller rejoindre d’autres mâles avec lesquels il passera l’automne, souvent en bandes importantes.

Les petits, aussitôt sortis de leur coquille, grimpent à l’intérieur du nid, grâce à leurs petites griffes, jusqu’à l’ouverture,  et se précipitent au sol. Le nid se situe souvent à 5-6 mètres de hauteur, parfois plus, mais presque tous les petits survivent sans problème à ce saut dans le vide. Aussitôt au sol, ils se dirigent vers le plan d’eau, tout près. Ils seront guidés par la femelle pendant environ 4 semaines et apprendront à se nourrir et à voler. Vers la fin de l’été, chacun part de son côté, vers les États-Unis. Les femelles reviendront dans le secteur où elles sont nées.

La situation du canard branchu est assez stable depuis 30 ans. Jadis classé espèce menacée, le canard jouit de mesures strictes de protection adoptées par le Canada et les États-Unis vers 1900, ce qui a permis à l’espèce d’effectuer un retour. Au point tel que la chasse est permise depuis 50 ans, sans que l’espèce soit menacée.

Dans Charlevoix, on rencontre le branchu à l’occasion, surtout dans nos lacs un peu marécageux. Il apparaît régulièrement, tous les printemps, dans un bassin du parcours des berges de Clermont. Il y était présent la semaine dernière.  Chaque observation est mémorable.

Pour l’instant, je savoure chaque seconde de ma rencontre avec cet oiseau spectaculaire.

Bonnes observations

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