Dur dur d'être un ado…

Par Emelie Bernier 12:35 PM - 12 Décembre 2018
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Ah, l’adullescence! Nostalgiques de votre « sweet 16 »?  Attention! Les résultats de la deuxième édition de l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire (2016-2017) de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) risquent d’égratigner vos lunettes roses. Dur, dur d’être un ado de nos jours.
 
Être ado n’est pas de tout repos, même si les tenants du titre semblent dormir plus souvent qu’à leur tour. Ils sont exténués, nos ados. Stressés, anxieux, bouleversés.
Sur les 62 000 jeunes sondées par l’ISQ pour son enquête, un sur cinq dit avoir reçu un diagnostic médical pour un trouble anxieux, une dépression ou un trouble alimentaire. Et un sur trois ne file pas, même s’il n’a pas d’étiquette à coller à son mal-être.
Miss Anxiété remporte la palme. Sous le couvert de l’anonymat du sondage, 17% les jeunes (comparativement à 9% il y a 5 ans) ont confié vivre au quotidien avec cette pernicieuse et tenace compagne. Elle est où, l’insouciance de la jeunesse? Gone, baby, gone.
Ça fait beaucoup beaucoup de jeunes qui capotent leur vie, ça. Beaucoup trop.
« Il semble que quelque chose fait que les jeunes se sentent un peu plus alarmés.» Ce sont les mots qu’utilisait par Guy Aublet, conseiller pédagogique en adaptation scolaire et directeur de la programmation à l’Institut des troubles d’apprentissage il y a quelques temps. Avec perspicacité, il mettait d’ailleurs le doigt sur une grosse partie du problème en rappelant avec justesse qu’intelligence et réussite scolaire sont deux éléments totalement différents. « Il faut protéger l’ego de l’élève, c’est la chose la plus importante, l’image qu’il a de lui-même. »
Profs, directeurs, conseiller, TES, parents, prenez des notes!
Ce ne sont pas tous les jeunes qui se glissent avec aisance dans le moule que leur tend l’école car il y a autant de formes d’intelligence qu’il y a d’individus… Votre travail, et il est d’une importance capitale, est d’assouplir le moule, pour que chaque jeune puisse s’y adapter sans se dénaturer et sans vivre ces échecs récurrents qui vous bousillent la confiance en soi. Car c’est elle qui permet aux ados, justement, de tenir tête à l’anxiété.
«En général, plus le niveau d’estime de soi, d’autocontrôle, d’efficacité personnelle globale, de résolution de problèmes et d’aptitudes aux relations interpersonnelles des jeunes est élevé, plus ils présentent une bonne santé mentale », résume l’étude. L’école n’est pas tout, bien sûr. Les habitudes de vie (alimentation, activité physique, sommeil), le travail, les pairs, le milieu de vie familial, l’intimidation, les réseaux sociaux sont autant de facteurs qui peuvent influer sur la santé mentale des jeunes. Constamment en spectacle sur les IG, Snapchat et Facebook de ce monde, où règne la dictature de la perfection, nos ados ont-ils le droit d’afficher leur failles, leurs doutes?
Qui plus est, l’adolescence, rappelons-le, est cette période où il faut, déjà, choisir une voie d’avenir. Rien que ça. A 16 ans, alors que vous peinez à gérer décemment votre présent, il faudrait que vous décidiez, là, maintenant, ce que vous voudrez faire plus tard! Stressant? Si peu! A 44 ans, je ne sais même pas encore ce que je vais faire quand je vais être grande! Imaginez à 16…
Il y a définitivement quelque chose qui cloche dans notre système. Que l’adolescence soit le début de la fin de l’insouciance, soit, mais peut-on slacker une roue à nos ados? Peut-on leur dire de prendre ça cool, les rassurer en leur disant qu’ils n’ont pas besoin, là, maintenant, de s’enligner sur une seule et unique track pour les 40 prochaines années s’ils ne sont pas rendus là? Peut-on les aimer pour qui ils sont, sans les juger, en les accompagnant, en les supportant, même quand l’envie nous brûle de les shiper au fin fond de l’Alaska sans adresse de retour?
L’enquête de l’ISQ met en opposition la santé mentale florissante et la santé mentale languissante, une expression toute baudelairienne qui évoque le spleen du poète. Nos ados sont occupés à apprivoiser la vie. Peut-on leur laisser le temps de la rêver un peu avant de devenir grands pour toujours?

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