Chronique de Brigitte Lavoie : Quand tes enfants font comme tu dis

Par Brigitte Lavoie 6:30 AM - 6 Décembre 2018
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Si j’étais politicienne, Pauline Marois pourrait facilement m’accuser d’avoir une cassette. Il y a des journées où j’ai l’impression de me répéter, à l’infini. Comme le jour de la marmotte. Ou une trop courte playlist.
Mais si les enfants pouvaient juste faire ce qu’on leur dit, ce qu’on économiserait de temps et d’énergie! Une énergie renouvelable, digne d’un parc éolien. Les devoirs seraient faits, les chambres ne seraient pas tant pire, les tiroirs bien garnis, le chat brossé et l’ultime fantasme, ils joueraient dehors!
Plusieurs études le démontrent, les bienfaits pour un enfant de jouer dehors, beau temps, mauvais temps, sont nombreux. Que dis-je, infinis. C’est d’ailleurs un des seuls points sur lequel tous les experts, blogues et références en matière d’élevage d’enfant s’entendent. Jouer dehors, c’est bon pour la santé physique, pour stimuler le système immunitaire et favoriser le sommeil. Il y a même des médecins qui prescrivent d’aller prendre l’air. C’est à croire qu’il y a un lobby hyper puissant sur la question.
D’ailleurs, le gros bon sens aussi prescrit la joute extérieure. Gros bon sens dont la majorité des parents exaspérés sont pourvus. Aucun chercheur n’a encore planché là-dessus, mais c’est clair que jouer dehors a un bienfait réel sur les parents et les adultes qui côtoient des enfants. Lire ici des effets positifs sur la santé mentale et l’humeur, mais également sur le niveau de stress, l’hypertension, le rythme cardiaque, la santé des cordes vocales. Sans compter l’estime de soi puisque c’est usant pour un adulte de répéter inlassablement la même chose sans que l’enfant bouge de là.
De toute façon, que vous soyez parent, éducateur en garderie ou enseignant, vous le savez.
En 2018, les outils, applications et innombrables objets pertinents pouvant stimuler l’intérêt des enfants pour l’extérieur ont tous été inventés. Et il y a aussi la tendance à inscrire l’avenir de l’humanité à des cours, ligues ou stations de ski qui obligent à mettre le nez dehors. Utilisant des ressources premières telles que la neige ou le gazon, ces « activités extérieures » nécessitent aussi l’achat de matériels spécialisés et parfois coûteux comme des souliers à crampons, vélo en carbone, skis de toute sorte, raquettes à neige, ballons multicolores en plus d’exiger des municipalités des investissements en infrastructures pour l’aménagement de courts de tennis ou de patinoires extérieures. Le lobby du jouer dehors existe bel et bien et se marchande.
Et puis soudain, voilà que novembre réinvente la météo et largue assez de neige en deux jours pour faire blêmir les Alpes. Réjouis, les enfants finissent par s’habiller d’eux-mêmes, ou presque, et ne plus rentrer. Des bonshommes de neige s’élèvent ici et là, les voisins débarquent avec des pelles et la gang des tuques n’a qu’à bien se tenir.
Et derrière la fenêtre, voilà t’y pas le parent tout seul avec sa cassette à off. Il trouvera sans doute à rouspéter un peu sur le séchage des habits de neige mouillés, à moins qu’il décide lui aussi de s’écouter et d’aller prendre l’air. Car le gros bon sens, c’est aussi faire comme tes enfants qui font ce que tu dis.

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