Du foin de l’Ontario pour les producteurs de Charlevoix

Par Gilles Fiset 4:19 PM - 15 août 2018
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La sécheresse force les agriculteurs à trouver du foin ailleurs pour espérer nourrir leur bétail dutrant l’hiver. Certains magazinent jusqu’en Ontario et même plus loin.
Le temps chaud et sec de l’été est une bénédiction pour les vacanciers, mais une catastrophe pour les producteurs agricoles et particulièrement pour les éleveurs et les producteurs laitiers qui peinent à trouver du fourrage pour leurs animaux.
« Beaucoup d’agriculteurs ont perdu 50 % de la première coupe de foin et même jusqu’à 60 % de leur deuxième coupe de la saison. Les besoins en foin sont d’un ordre que l’on n’a jamais vus », affirme, affirme Jacynthe Gagnon, présidente de l’Union des producteurs agricoles (UPA) Capitale-Nationale-Côte-Nord.
Le problème est particulièrement aigu dans Charlevoix où 60 producteurs cherchent désespérément du foin (chiffre en date du 14 août et qui ne tient compte que des producteurs assurés) sur un total d’environ 200 producteurs dans la région.
« Charlevoix et la Côte-Nord sont les deux aires les plus touchées sur le territoire de notre UPA», énonce la présidente.
La rareté du fourrage a fait exploser les prix. « La balle de foin ronde se paie environ 30 $ l’unité habituellement, mais ces temps-ci, on peut débourser jusqu’à 60 $ et même 80 $ pour en avoir une, quand il y en a », précise Jacynthe Gagnon.
Pour aider les producteurs à se procurer du foin, exceptionnellement, la financière agricole, une société d’état qui compense monétairement les producteurs pour les pertes dues aux mauvaises saisons, avancera les paiements dès cette semaine au lieu d’attendre au mois de décembre, comme elle a l’habitude de faire, selon la présidente de l’UPA.
L’objectif est de donner un peu de liquidité aux producteurs pour les aider à passer à travers la crise et préparer l’hiver. Chaque cas sera évalué individuellement cependant.
Mais encore faut-il trouver du fourrage. La situation est telle que certains éleveurs d’ovins et de bovins devront se défaire d’une partie de leur troupeau s’ils veulent que leur entreprise survive à la saison froide. Une solution qui s’avérera peu rentable. La grande quantité de viande disponible cet automne devrait faire chuter les prix de leur viande.
Les producteurs laitiers, eux, n’ont même pas cette alternative. « Ils doivent produire leur quota de lait et pour cela, ils ne peuvent pas se permettre de vendre leurs animaux », explique Mme Gagnon.
Actuellement, un comité d’entraide a été mis sur pied pour trouver du fourrage partout au Québec. Les producteurs sont invités à passer des annonces dans le média La Terre de Chez-Nous afin de stimuler les recherches et les échanges dans la province.
Cependant, les besoins sont d’un tel ordre cet été, 400 à 600 balles rondes par producteur en moyenne, selon MM. Gagnon, que certains producteurs devront s’approvisionner jusqu’en Ontario et même plus loin, avec les coûts de transport qu’une telle mesure impliquerait.
« Pour l’instant, on est en mode solution, mais c’est certain que si on n’en trouve pas au Québec, il va bien falloir aller s’en procurer ailleurs, s’il y en a », s’exclame la présidente de l’UPA.

Un producteur doit trouver 900 balles rondesJean-Claude Tremblay, un producteur de bœuf du rang 4 à Saint-Hilarion, doit trouver 1 million de livres de foin avant l’hiver s’il veut conserver son troupeau intact.
Comme 59 autres producteurs dans la région de Charlevoix, Jean-Claude Tremblay est gravement affecté par le manque de foin dans la province. « J’ai environ 900 balles rondes de 1 200 livres de prêtes et j’ai besoin de 900 autres balles pour me rendre à la prochaine saison », affirme-t-il, lors de notre passage à Saint-Hilarion.
Même durant l’été, M. Tremblay doit toucher à ses précieuses réserves, une balle ronde à tous les deux jours, mais l’hiver, ce sera presqu’une dizaine de balles rondes qui devront être distribuées chaque jour au 150 bêtes de son troupeau s’il veut les garder en bonne santé jusqu’au printemps.
La prochaine coupe de foin de la saison pourra peut-être lui venir en aide, si la température le permet.
« J’avais prévu récolter au moins 300 balles à ma deuxième coupe, mais il ne pleut pas. J’ai étendu du fumier pour aider à le faire pousser, mais s’il n’y a pas de pluie, il ne poussera pas », dit.
Le producteur de Saint-Hilarion a fait de nombreux appels pour trouver du fourrage, mais quand il y en a, le prix est bien trop souvent exorbitant. « Ceux qui en ont ne le donnent pas. J’en ai trouvé à Saint-Tite, mais à 80 $ du rouleau et je dois payer la livraison, 10 à 15 $ du rouleau en plus », confie le producteur de bœuf qui pense envoyer une cinquantaine de bêtes à l’encan bientôt. « Je vais garder le nombre de bêtes que je pourrai, selon le foin que j’aurai en réserve. Je ne peux pas me permettre de payer du foin 100 $ la balle. Ça va me couter plus cher de foin que le prix de la vache », pense-t-il.
 

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