Été agricole à oublier

Par Émélie Bernier 5:00 AM - 15 août 2023 Initiative de journalisme local
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Une partie de l’équipe des Jardins de Cap-aux-Oies (dont Laurence Gareau sur le tracteur) lors d’une « exceptionnelle » journée de beau temps. Courtoisie

Il n’y a pas que vos vacances qui ont été bien arrosées. Les champs des agriculteurs l’ont été aussi. Un mot clé revient dans la bouche des cultivateurs : résilience. Mais celle-ci a quand même des limites.

« Grosso modo, c’est une année de » m… « », lance en riant jaune Guillaume Hamel Dubois, des Jardins Écho logiques. Il relativise toutefois. « Ce n’est pas catastrophique pour des petites fermes non mécanisées, mais les grandes cultures, qui dépendent du tracteur, sont vraiment mal prises », estime-t-il.

Son entreprise, à Saint-Aimé-des-Lacs, surnage pour une raison principale: le producteur a choisi de faire dans la diversité. « Ce n’est pas un été que je vais pouvoir engranger des sous. Je suis très diversifié donc je m’en sors, peu importe ce qui arrive. On va passer au travers et on va souhaiter que ce soit mieux l’été prochain », résume-t-il.

Guillaume Hamel Dubois cultive en serre, sous tunnel et en champs. « Sous abri, ça va numéro 1, malgré qu’il manque de soleil. Les plantes sont des machines à lumière! 1% de lumière, c’est 1% de productivité! »

Les champs dits de terre noire sont les plus affectés par les précipitations abondantes. « Pour répondre à la demande, je me suis lancé dans de grands champs où je fais plus de travail mécanisé. Là, c’est catastrophique… La terre noire est comme une grosse éponge, c’est très long à sécher. J’ai été obligé de travailler à la débroussailleuse pour faucher deux hectares d’engrais vert parce que ça calait trop pour le tracteur. C’est une perte de temps et d’énergie… »

Guillaume Hamel Dubois. Archives.

Des espèces comme les crucifères réagissent mal à la pluie, occasionnant des pertes. « Les crucifères, avec les excès d’eau, vont fleurir beaucoup trop tôt parce qu’ils sont stressés… », illustre l’agriculteur.

Globalement, les chiffres de l’entreprise ont connu une baisse, principalement en raison de la restauration. « Après quelques années de vaches grasses, on est revenu aux chiffres d’avant la pandémie. Au lieu d’arriver en mai, en juin, les touristes sont arrivés aux vacances de la construction. Mais personnellement, dans les marchés, avec la clientèle locale, c’est encore meilleur cette année! La meilleure affaire que les gens peuvent faire, c’est d’aller acheter local dans les kiosques, les marchés… On reste positif, on va s’en sortir! », lance Guillaume Hamel Dubois.

Vive le microclimat de Cap-aux-Oies

Aux Jardins de Cap-aux-Oies, aux Éboulements, la saison va tout de même bon train. « On est béni des dieux malgré tout, estime la copropriétaire Laurence Gareau. Le bon drainage du sol et le microclimat du plateau de Cap-aux-Oies aident beaucoup. »

Les serres permettent un certain « contrôle » sur les aléas du climat, reconnaît-elle, mais malgré ces quelques atouts, les rendements sont clairement inférieurs à ceux des années passées. Le vent et la pluie sont en cause.

« Le printemps a été super venteux et le vent va abimer les plants, surtout ceux qui viennent d’être transplantés. On utilise beaucoup de géotextiles ici et avec le vent, c’est plus complexe. De son côté, la pluie va créer une pression racinaire et des problèmes de pourriture… À date, ça se passe bien de ce côté, mais il faut se rappeler qu’à la base, la chaleur et le soleil, ce sont deux éléments clés pour faire pousser des légumes! », explique Laurence Gareau.

L’impact du temps pluvieux sur le travail du sol n’est pas négligeable.

« On essaie d’avoir les pratiques les plus responsables et durables possibles pour notre sol, mais forcément, quand on travaille un sol mouillé, ça le compacte », indique-t-elle.  Tout au bout de la chaîne, le mauvais temps bouleverse également les habitudes des consommateurs.

« La météo joue énormément sur la mise en marché! Entre une journée ensoleillée et une journée pluvieuse au marché public de Baie-Saint-Paul, on peut vendre la moitié moins! »

Un message pour les amateurs de légumes? « Mettez votre imperméable… et venez encourager vos maraîchers! », conclut Laurence Gareau en riant.

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