DOSSIER Formation métier semi-spécialisé: Une voie alternative vers la réussite

Par Emelie Bernier 4:00 PM - 29 juin 2021
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Alexandra Moffatt-Mayette (avec le chat Mitaine Cabot), Aïsha Gagné (avec Pat le cheval) Magalie Boulet et Marika Murray à la Seigneurie de Mont Murray II. Courtoisie

Ils s’appellent Samuel, Aïsha, Pierre-Luc, Alexandre, Patrick… Ils ont en commun d’avoir éprouvé des difficultés dans le système scolaire dit régulier, jusqu’à ce qu’on leur offre l’option de la formation métier semi-spécialisé (FMSS). De l’échec à la réussite, il n’y a souvent qu’un pas de côté!

La formation métier semi- spécialisé est offerte dans tous les centres de service scolaires de la province, dont le Centre éducatif Saint-Aubin et l’École secondaire du Plateau. Pour y accéder, l’étudiant doit être âgé d’au moins 15 ans et ne pas être tout à fait à jour dans sa formation académique. Il doit aussi présenter un intérêt envers les stages, pierre d’assise du programme.

Lindsey Collins-Godin a effectué son stage chez Performance Ford.

«En fait, les élèves font de l’alternance travail-études. Sur un cycle de neuf jours, ils passent donc six journées à l’école pour faire les cours de français, de maths, d’anglais et de préparation au marché du travail et trois journées dans un stage qu’ils ont choisi, avec notre aide», indique François Kearney, qui enseigne le français et s’occupe de tout ce qui touche au volet «stage» de la formation à l’école secondaire de La Malbaie.


Les stages sont d’une durée de 300 heures. Le prof Kearney comptabilise les heures accomplies à la craie sur le tableau vert devant la classe. Au moment d’écrire ces lignes, mi-juin, certains avaient dépassé le nombre d’heures requises et tous se rapprochaient du but.



Lindsey Collins-Godin a effectué un stage en mécanique chez Performance Ford.

Les stages sont choisis en fonction des intérêts des jeunes et de l’ouverture des employeurs. Les élèves ne sont pas laissés à eux-mêmes. «Je les visite dans leur milieu de stage pour voir comment ça se passe, échanger avec l’employeur qui les accueille. Le stage fait partie intégrante du parcours et ce n’est pas toujours facile! Certains doivent s’y rendre tôt, il peut faire chaud ou froid, certaines tâches peuvent être plus complexes ou plates, il y a parfois des temps morts ou des périodes de rush. Au début de l’année, les élèves sont souvent crevés lorsqu’ils reviennent de leurs stages, mais ils persévèrent, pour la plupart», ajoute l’enseignant.

Depuis 15 ans, plus de 150 adolescents ont été qualifiés via le programme FMSS.

«En début d’année, quand je demande aux élèves pourquoi ils sont à l’école, ils me répondent presque toujours que c’est parce qu’ils sont obligés et qu’il s’agit de leur dernière année. Quand l’année finit, la plupart du temps, je remarque qu’ils changent d’idée. Certains ont en tête d’aller se chercher un diplôme (DEP), d’autres visualisent mieux ce qui les attend sur le marché du travail et se rendent compte qu’ils ne sont pas prêts à y accéder tout de suite », constate François Kearney.

Il salue la ténacité de ses pupilles. «Les élèves sont impressionnants, car malgré leur jeune âge, ils font preuve de maturité, d’adaptation et de persévérance!»

NDLR: Dans la version papier du Charlevoisien du 30 juin, une erreur s’est glissée et nous avons débaptisé l’entreprise OK Pneus ainsi que Pierre-Luc Carré. Toutes nos excuses.

Des histoires qui durent

Au fil des ans, François Kearney a eu le plaisir de voir plusieurs stagiaires «coller» dans leur milieu de stage. Cette année, environ la moitié de ses élèves se sont vu offrir un emploi d’été là où ils ont fait leur stage. «FMSS sert souvent de tremplin pour la vie professionnelle! De plus en plus, d’anciens élèves devenus employés forment les nouveaux stagiaires! Quand ça arrive, j’ai l’impression qu’une boucle se boucle et que mon travail a un certain sens!», confie François Kearney.

OK Pneus accueille des stagiaires depuis de nombreuses années. Trois employés à temps plein sont d’ailleurs des stagiaires qui sont restés, dont Maxime Lavoie qu’on voit ici avec Martin Dassylva et David Dufour.

Pour lui, chaque histoire qui se termine ainsi est une petite victoire sur le destin. Car la motivation, on s’en doute, n’est pas toujours au rendez-vous… «Ce sont des élèves qui ont un historique pas toujours jojo avec l’école. Le programme est une occasion de changer de perspective, plutôt que de décrocher», indique l’enseignant.


Pierre-Luc Carré a trouvé le bonheur dans son milieu de stage où il travaille désormais à temps plein et forme à son tour les stagiaires du programme FMSS.

Dans certains cas, un stage donnera l’impulsion nécessaire à un jeune pour aller chercher une formation de type DEP (diplôme d’études professionnelles). «On essaie d’encourager nos élèves à trouver un DEP adapté à leurs aspirations. Puisqu’il s’agit d’ados qui ont hâte d’accéder au marché du travail, c’est souvent la meilleure voie pour eux. Et les stages permettent à certains jeunes de réaliser que le métier de leurs rêves n’était pas fait pour eux.»

Une fois leur année en FMSS terminée, les élèves ont plusieurs choix: accéder au marché du travail, aller poursuivre leur formation à l’éducation des adultes (offerte aux 16 ans et plus), utiliser une passerelle leur donnant accès à certains DEP ou poursuivre leur parcours au secteur «jeunes» de l’école secondaire.
François Kearney tient à saluer les employeurs qui accueillent les stagiaires, souvent de façon récurrente. «Lorsque les stages s’avèrent autant avantageux pour l’entreprise que pour l’élève, c’est un match parfait!», dit-il. Selon lui, les entreprises qui s’impliquent le font pour diverses raisons, mais avant tout pour donner une chance aux jeunes. Les stages sont, à ses dires, «un éventail de portes qui s’ouvrent aux jeunes».


«On a la chance de pouvoir compter sur des employeurs qui prennent des stagiaires tous les ans depuis des années. Ils leur donnent du temps, mais ils insufflent surtout une bonne dose de confiance chez nos jeunes. Et ça, cette confiance, ce sentiment d’être compétents et enfin reconnus, c’est l’ingrédient de base qu’on veut à tout prix transmettre à ces jeunes avant qu’ils quittent les bancs d’école. C’est un investissement énorme dont les retombées ne sont pas toujours directes ou tangibles, mais qui participe au développement global de notre milieu», conclut François Kearney.

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