Euh, Bo Derek?

Par Emelie Bernier 16 mars 2016
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Les audiences du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur le pipeline Énergie Est ressemble étrangement à une joute de Génies en herbe qui opposerait une équipe de citoyens informés, cohérents et précis dans leurs requêtes (pour les initiés, le Lycée d’Entrailles-les-Oies) à une gang de clowns un peu nonos (l’école de réforme Saint-Jean-de-Bosco, d’où le titre…) qui cherche ses réponses l’air effaré en s’échangeant des bouts de papier…

Ça fait dur. On prendrait presque en pitié les seconds, sauf qu’on se retient car on sait très bien qu’ils représentent l’empire des énergies fossiles polluantes et du gros cash qui pue. On sait qu’ils ont des visées pas très nettes et plutôt dangereuses sur nos terres arables, qu’ils se soucient bien peu de mettre en péril le fleuve, les rivières, les lacs et in extenso la nappe phréatique, qu’ils ont derrière eux de puissants lobbys qui risquent, au bout du compte, de leur donner la victoire malgré leur piètre performance dans cette joute tragicomique.  Entre les deux « équipes », les médiateurs-commissaires du BAPE, articulés et vifs, qui n’en laissent pas passer une.

Parlant de pipeline, est-ce que les dés sont pipés? Ces audiences génériques sont-elles une mascarade, un semblant d’exercice démocratique pour donner l’impression aux citoyens qu’ils ont leur mot à dire sur le sort de leur environnement?  Le gouvernement du Québec ferait piètre figure s’il en était ainsi, déjà qu’il cumule les bourdes et les « avancez par en arrière »…  Le BAPE a plus que jamais sa raison d’être, mais quelle importance sera accordée à ses conclusions quand on sait que TransCanada a obtenu un indécent passe-droit qui lui permet de contourner les règles environnementales du Québec?  

Les quelque 4600 kilomètres du pipeline Énergie Est, le joujou toxique et hautement lucratif de TransCanada, toucherait à six provinces. Au Québec, il traverserait 860 cours d’eau dont maintes sources d’eau potable, notamment le fleuve. 75% de la structure serait enfouie sous les terres agricoles, au grand déplaisir des producteurs qui vous nourrissent et qui sont complètement dans le flou en ce concerne les ententes avec TransCanada, redevances et risques d’accidents inclus, sans compter le risque de déversements. Une importante partie du pipeline se retrouverait dans un secteur hypersensible aux perturbations sismiques. Les questions d’un citoyen à ce sujet sont elles aussi restées sans réponse, s’ajoutant à la longue liste des retours attendus par les commissaires.

Parce qu’ils n’ont quand même pas le choix de répondre à certaines questions, les sbires d’Énergie Est et de TransCanada ont quand même admis qu’un déversement hypothétique dans la rivière Etchemin, le « scénario catastrophe », souillerait 348 kilomètres de rives, dont 200 sur le bord du Saint-Laurent. Des milliers de citoyens se trouveraient privés d’eau potable et ce, durant plusieurs semaines!

Témoin  pour le ministère de la Santé et des Services sociaux, Michel Savard, docteur expert en santé publique et en mesures d’urgence pour de la Sécurité civile, a conclu que les usines de traitement des eaux n’étaient nullement équipées pour traiter des eaux contaminées aux hydrocarbures. A-t-on besoin de rappeler que la prise d’eau de l’usine de Lévis dans la rivière Chaudière avait été condamnée durant 64 jours après la catastrophe de Lac-Mégantic? 

Ce qu’on n’a pas non plus crié sur les toits, c’est que ce fameux pipeline censé sortir le Canada du trou aidera les États-Unis à exporter son pétrole de schiste à travers nos terres! La construction du Upland Pipeline  amènera chaque jour 300 000 barils du Dakota du Nord vers le Canada, barils qui seront ensuite acheminée vers l’est grâce à Énergie Est…Ben coudonc. « It’s already sold », comme chantait Félix…

Quelle que soit la couleur des lunettes qu’on se met sur le bout du nez, il n’y a rien de rose dans ce projet de pipeline.

Ce jeudi 17 mars sera la dernière journée des audiences du BAPE à La Pocatière. La question de l’acceptabilité sociale sera au cœur des discussions entre les commissaires du BAPE, les citoyens et les porte-paroles de TransCanada et de l’Office national de l’énergie. Parce que la force du nombre doit compter quelque part dans l’univers, tous les citoyens soucieux de protéger le Québec contre la dangereuse balafre de cet oléoduc sont invités à prendre la rue pour une marche citoyenne.

Pour regarder les audiences en direct : http://www.bape.gouv.qc.ca/sections/mandats/oleoduc_energie-est/webdiffusion_video/index_video.aspx (ou http://bit.ly/1QJhV8h).

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