Si on pouvait se passer du féminisme…

10 mars 2016
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Non, les femmes ne sont pas meilleures que les hommes. Mais le contraire est aussi vrai. C’est pour que ce vice-versa soit enfin posé en principe fondamental et universel qu’existe le féminisme. Appelez-le égalitarisme si ça vous chante, tant que vous ne perdez pas la cible de vue.

On n’a pas brûlé de brassières, mais on a déchiré pas mal de chemises sur le sujet ces derniers jours.  Certains et certaines se sont contorsionnés jusqu’à se mettre le pied dans la bouche jusqu’à la cheville. D’autres ont fait des amalgames tordus et des sauts de l’ange plus ou moins gracieux entre les causes et les effets. S’en est suivie une logorrhée où la sagacité faisait parfois cruellement défaut. Jusqu’à l’écoeurantite aigüe qui entache l’essentiel.

Revenons en au b.a. ba du féminisme. Et s’il vous plaît, n’enlevez pas vos soutiens-gorges et ne sortez pas les briquets. Ne brandissez pas non plus vos banderoles masculinistes. Tout va bien jusqu’ici : on ne cherche qu’à s’entendre.

Depuis la nuit des temps, l’homme tient le gros bout du bâton. Ça remonte aux homo- erectus, voire même avant. La femme, elle, ne traque pas le mammouth. Elle cueille les fruits, mais surtout, elle porte les enfants, les nourrit, les élève pendant que son chum est à la chasse. Noble vocation s’il en est, puisque c’est de l’avenir de l’humanité dont il est question. Ainsi se déroule plusieurs siècles où l’homme pourvoyeur ramène la pitance que la femme transforme en substance ingérable avec plus ou moins de talent tout en portant les héritiers, en passant la serpillère et en mangeant quelques claques à l’occasion avec son ragoût… Elle ne va peu ou pas à l’école, ne travaille guère que lorsqu’asservie, ne peut ni voter, ni prendre le plancher lors des assemblées. De là à dire qu’elle est une classe inférieure, il n’y a qu’un pas…

Quelque part entre le 18e et le 19e siècle, un certain philosophe, Condorcet, soutient que l’infériorité intellectuelle des femmes n’est en fait que le résultat de leur manque d’instruction. Il prône alors l’éducation des femmes. Quelque chose comme la naissance du féminisme et le début d’une longue marche!

Viendra ensuite la Révolution française qui reconnaîtra certains droits au sexe faible, tout en s’assurant de lui tailler les ailes juste assez pour que l’envol soit impossible. Mais la femme, quoi qu’on en pense,  n’est pas une perruche! Et ce sont des femmes comme Marguerite Durand, Simone de Beauvoir,  Elisabeth Badinter qui feront voler le mythe de la belle potiche en éclat! Hip!Hip!Hip! Hourra!

Renier le féminisme est un sacrilège, un affront à l’évolution des mentalités et un doigt d’honneur aux femmes qui en arrachent encore plus que nos aïeules parce que coincées dans des régimes qui les considèrent comme des moins que rien, des parias rien que bonnes à assouvir des pulsions animales, à torcher ces messieurs, à procréer et encore, mais des garçons s’il vous plaît. Elles n’ont ni le contrôle de leurs corps, ni celui de leur vie. Et certains osent penser que la lueur du féminisme doit s’éteindre en les laissant enterrées vivantes dans leur tombeau?

Plus près de nous, le féminisme n’a rien perdu de sa valeur car les iniquités demeurent flagrantes. À travail égal salaire égal n’est encore qu’un slogan pour bien des chefs d’entreprises. Les femmes sont sous représentées dans les instances décisionnelles. Ce sont elles qui portent encore, désolée pour tous les chéris dont le mien qui font ce qu’ils peuvent, une grande part du fardeau ménager. Qui prennent congé quand les enfants ont la fièvre. Qui gonflent les rangs des gagne-petits, même si elles travaillent fort, aussi fort et parfois bien plus que leurs vis-à-vis à quéquette.

Et encore elles qui doivent ramer pour compenser les coupes dans les services publics et les programmes sociaux.

Le féminisme ne doit pas être une maladie honteuse, il doit rayonner, se propager, contaminer chaque âme qui vive. Un jour peut-être, quand nous danserons tous sur le même pied d’égalité,  pourra-t-on l’enterrer, dans une grande fête joyeuse et lumineuse. Mais pour l’instant, et pour bien des années encore je le crains, on ne peut pas se passer du féminisme.

Des lectures inspirantes.

Pour une petite histoire du féminisme : http://bit.ly/1UbalW7

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