La maison de papier

Par Emelie Bernier 5:00 PM - 24 avril 2024
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Ce trio dynamique composé d’Émélie Bernier, Louise Lebel et Lisianne Tremblay avait été embauché en 2006 pour remplacer Brigitte Lavoie durant son second congé de maternité.

Rang Cache-toé-ben, Notre-Dame-des-Monts. Dans ma gazette préférée, la plus locale qui soit, j’aperçois une petite annonce : Recherchons journaliste pour remplacement de congé de maternité (ou quelque chose du genre).

À cette époque, j’avais la confiance en moi d’un petit pois. J’animais une émission qui portait mon nom à TVC-VM et je ne regardais jamais cette fameuse émission. Je n’étais pas journaliste, mais j’avais beaucoup de plaisir à rencontrer les acteurs du milieu, les représentants des organismes communautaires, à jaser de tout et de plus avec eux, à présenter chaque semaine les animaux de la SPCA (salut Marieve!), à faire des recettes et toutes sortes de salamalecs en rigolant, beaucoup, et en étant sérieuse aussi, parfois.

Cette petite annonce m’a fait de l’œil quelques jours. J’y revenais toujours avec un peu d’appréhension, la toisais du regard, m’interrogeant… Est-ce que ça se pourrait que cette opportunité soit pour moi? J’avais lâché l’université pour voir le monde (au grand dam de ma mère!) et n’avais en poche que mon DEC en lettres, langues et substances alors illicites…

Qu’à cela ne tienne. J’ai envoyé mon maigre CV : plusieurs années de ” waitressing ” dans les restaurants familiaux, beaucoup trop de voyages, quelques projets communautaires sympathiques et idéalistes, une couple d’années de wanna be speakerine à la télé communautaire. Rien de bien convaincant!

Le jour où j’ai rencontré Sylvain Desmeules pour une entrevue au chic Café chez nous, j’avais les mains moites d’une jeune première. Je bafouillais un peu. L’entrevue a duré tout au plus quatre minutes. Après, on a pris un café et on a jasé.

Une poignée de main (moite!) et c’était scellé. Je suis repartie du café avec un nouveau titre (et beaucoup de croûtes à manger pour l’honorer) : journaliste!

Parce que Brigitte Lavoie (encore aujourd’hui, l’âge de sa fille Alice m’aide à tenir le compte de mes années au service de ” l’hebdo “) était difficile à remplacer, on avait choisi d’embaucher trois recrues. Du nombre, ma collègue Lisianne Tremblay, de retour dans l’équipe depuis 2018 après quelques circonvolutions.

J’ai moi-même dû quitter quelques mois le giron de votre journal préféré quand la belle (et douée!) Brigitte est revenue de sa pause maternelle. Mais la vie fait bien les choses et m’a ramenée dans l’équipe peu de temps plus tard…

Avec Sylvain (aka manitou), Nancy, Lisianne, Dave, Josey (c’est elle le véritable cerveau de l’opération, mais ne le dites à personne…), Penny, MC, Brigitte, Pierre, Gilles, la “prismacolorée” et regrettée Mélissa Deschênes et les autres (bien souvent des comètes… Qui se souvient de Valérie Gagné-Vollant?), on en a vu de toutes les couleurs… 

Mais on n’a jamais sauté un journal. Parfois au prix de nos santés mentales… Il fallait le faire, on le faisait.

La ” lassitude morale “? On règlera ça plus tard.

Rush, papier, ciao

Depuis 2006, mes semaines au travail sont intimement liées au papier. Les papillons du deadline et mes nerfs ont entretenu durant de nombreuses années une relation amour-haine qui s’est apaisée depuis l’avènement du web.

D’abord imprimé les vendredis, puis les jeudis, puis les mercredis, les mardis et finalement les lundis, le journal ” papier ” comme vous le connaissez disparaît, mais on se souviendra longtemps des courses folles pour le boucler à temps lors des soirs d’élection. Des jours sombres de cataclysmes. Difficile d’être sur la nouvelle quand le monde s’écroule pendant que les presses roulent. Mais nous avons fait de notre mieux. Et c’est ce que nous ferons encore.  

On se souviendra longtemps des ” bogues ” informatiques. Des années Milenium, des années Melody, de la longue quête de l’appli… Et tant d’autres aventures/mésaventures qui nous ont construites.

Les pères

” On a fait un beau journal. ” J’entends encore notre cher Charles Warren, fier de nous comme si nous étions ses enfants, quand il tenait dans ses mains la copie fraîche du jour. La reconnaissance faite homme.

Et que dire de Guy Charlebois? L’autre moitié du duo qui a mis au monde l’Hebdo Charlevoisien, comme un pied de nez à l’empire Québecor, une prise de pouvoir, un f… you! bien senti.

Guy, merci pour tout. On a eu des petits moments plus difficiles (les protagonistes se reconnaîtront et je leur servirai les mêmes mots doux que toi à Québecor! Ah!ah!), mais on a traversé la tempête parce que ce journal est plus qu’un boulot.

C’est un projet collectif, un média dédié à l’information rigoureuse, une voix forte pour la représentation régionale. Quelque chose comme un vaillant soldat qui ne fléchit pas les genoux, même quand la guerre semble perdue. Elle ne l’est pas.

Parlant de soldat, il m’apparaît essentiel de saluer le récent départ du 3e ” père ” du Charlevoisien, fondateur des Éditions nordiques, le géant Paul Brisson. Son fils Simon lui succède avec le même feu au coeur.

Charles-Guy-Paul : ce power trio là a fait beaucoup pour l’information régionale et j’espère que l’Histoire s’en souviendra.

L’avenir vous le dira

Tous les deuils ne se valent pas. Faire celui du journal papier (et de son corollaire les circulaires) sera sans larme, j’en suis persuadée. Car nous serons toujours là, au bout de vos doigts, sous vos yeux et même bientôt dans vos oreilles (chut, c’est un secret!). Nous serons tout aussi dévoués et méticuleux, curieux et consciencieux que nous le sommes depuis 28 ans.

Nous ferons plus que survivre, nous nous épanouirons! Vous pourrez tenir en vos mains mon petit chouchou, le Destination Charlevoix, et d’autres publications dont nous gardons la surprise pour le moment. Il ne faudrait pas tout dévoiler!

Pour ma part, je n’ai plus les mains moites, mais j’ai encore très souvent des papillons quand vous m’ouvrez la porte de votre maison, que vous acceptez de partager vos hauts et vos bas et tout ce qu’il y a entre les deux, pour que je raconte vos histoires.

Nous sommes tous charlevoisiens. Nous sommes tous Le Charlevoisien.

Psst : Pis vous allumerez votre poêle avec de l’écorce! Ça fait moins de créosote!

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