Du papier, mais encore

Par Brigitte Lavoie 3:51 PM - 23 avril 2024
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La rédaction du billet “Mes humeurs” demeure un des plus beaux souvenirs de Brigitte Lavoie.

J’ai commencé à travailler au Charlevoisien à l’âge de 23 ans, comme journaliste. Ce qui tient un peu du miracle. C’est que j’avais oublié d’éteindre mes phares de voiture pendant mon entrevue d’embauche… Je ne l’ai jamais avoué à Guy Charlebois et Sylvain Desmeules, mais j’ai passé l’heure suivant notre rencontre à attendre au Tim Hortons que ma batterie de voiture se recharge.

(NDLR: dans le cadre de la parution de la dernière édition “papier” du Charlevoisien, nous avons demandé à une poignée de collaborateurs de partager avec nos lecteurs quelques souvenirs de leur passage dans l’équipe.)

Brigitte Lavoie a troqué le journalisme pour l’agriculture. Photo Bon Appétit

Ce truc de mon père, l’art de laisser la batterie ressusciter, m’a évité de nombreuses fois la honte de me « faire booster », comme en ce jour d’hiver 2003. Parce qu’une batterie à plat, c’est connu, ça entache la crédibilité. Ce jour-là, j’ai donc lu deux fois le journal local d’un couvert à l’autre en buvant un café et mes futurs patrons, ignorant tout du drame, m’ont embauchée. Hourra!

Au fil de mes 12 années suivantes au Charlevoisien, dans la valse du journal à produire, des reportages à réaliser ainsi que des articles et des chroniques à écrire, mes sympathiques patrons ont eu largement le temps de découvrir à quel point j’étais une jeune femme débrouillarde et autonome… avec une prédisposition pour les batteries à plat et les problèmes technologiques. Appareil photo, cellulaire, ordinateur portable.

Publier un journal demande un petit attirail polyvalent très sollicité. Charles Warren a légèrement sourcillé lorsque mon premier cellulaire a terminé sa vie utile dans le souffleur à neige familial. Guy Charlebois a dans sa collection mes appareils photo déchus.

Et Simon Warren pourra sans doute évoquer ce jour où mon ordinateur portable s’est consumé de l’intérieur parce que je l’avais scrupuleusement déposé sur le tapis de plancher de ma voiture, en mode veille, à l’abri des regards, pendant une chaude journée de juin, le temps de mener un reportage sur des planchistes téméraires dans la côte des Éboulements… Cette nuit-là, puisque tous mes articles étaient cuits et que l’heure de tombée, elle, ne l’était pas, j’ai tout réécrit… Un journal papier, c’est une responsabilité!

Des anecdotes de l’intérieur ayant animé la publication du Charlevoisien, il y en a des milliers. Chacun des collègues a les siennes. La publication d’un journal exige ses habitudes et génère des éditions parfois épiques. À chaque semaine, pourtant, Le Charlevoisien arrivait à bon port et était distribué aux quatre coins de Charlevoix avec les histoires et les publicités des gens d’ici, portant l’espoir d’être lu. Nous avions, lecteurs de Charlevoix, sans trop en avoir conscience, le grand privilège de lire en marge des algorithmes. Un privilège en voie de disparition que celui de s’intéresser à des sujets divers non triés par l’intelligence numérique et de découper au passage la photo de la patineuse de la famille pour le frigo de papi.

Les temps changent, il faut s’adapter, disent les sages… J’ai maintenant une voiture un peu électrique, avec un fil. La belle ironie. Mon cellulaire est une loque. Mon identifiant Apple m’exaspère et complique le téléchargement de la nouvelle application mobile du Charlevoisien. Heureusement, le journal local est toujours vivant avec des collègues arpentant notre territoire pour dépeindre notre ici. C’est indispensable. Oui, la vie d’aujourd’hui fait de nous, lecteurs, des sans-papiers. Mais l’essentiel demeure puisque nous sommes Charlevoisiens!

QUESTIONNAIRE 

Entrée en poste : 2003

Départ : 2014

Poste : Journaliste, chroniqueuse et directrice de l’information (2013-2014)

Que faites-vous aujourd’hui?

« Des granolas. Je suis copropriétaire d’une ferme de céréales biologique à La Malbaie, avec agrotransformation à la ferme. »

Quelle nouvelle, parmi toutes celles que vous avez couvertes, vous a le plus marqué?

« L’accident au lit d’arrêt à Petite-Rivière-Saint-François. L’événement était triste et spectaculaire. Et le ministère des Transports était nonchalant et déconnecté du terrain. »

Quelle a été la plus difficile à couvrir?

« En général, tous les événements qui demandaient une conciliation travail-famille, en dehors des heures régulières de travail… Et certaines histoires avec les pompiers. C’était compliqué. Tout dépend du chef? Je vais m’arrêter là 😉 »

Quel est votre plus beau souvenir de vos années au sein de l’équipe du Charlevoisien? 

« J’ai quitté le journalisme il y a 10 ans et, encore aujourd’hui, j’ai un profond attachement envers mes collègues du Charlevoisien. Nous avions une belle camaraderie. Je suis toujours tellement heureuse de les croiser, j’ai le sourire qui colle! 

Et la chronique Mes Humeurs, publiée pendant plusieurs années, c’était un grand bonheur à écrire. Merci Sylvain Desmeules pour la confiance. »

Avez-vous un mot à dire à nos lecteurs?

« Merci aux lecteurs d’être là. Et continuez de lire, de tout. Surtout tout ce que les géants du web ne vous ont pas mâché d’avance. Soyez fous, prenez le large des algorithmes.

Et tant qu’à y être, veillons tous ensemble sur le français, parlé et écrit. Des publications sur les réseaux sociaux et des textos, ça se corrige 😉 Majuscule, ponctuation, accord du participe passé, allez, on est capable!

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