Saison d’adieu aux Foins Salés

Par Jean-Baptiste Levêque 5:00 AM - 18 juillet 2023
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Yolande L’Écuyer Mondou vous accueille à la boutique Les Foins salés pour une dernière saison.

Après 43 ans à proposer de l’artisanat québécois aux passants de la Route du Fleuve, la galerie-boutique Les Foins Salés des Éboulements vit sa dernière saison. Elle fermera définitivement au mois d’octobre.

Dès le mois de juin, Yolande L’Écuyer Mondou ouvre tous les jours la porte de sa boutique saisonnière aux visiteurs des Éboulements, qu’ils viennent du Québec ou d’ailleurs. « J’ai décidé que ça serait la dernière année, parce qu’en fin de compte j’ai 81 (ans) », explique d’emblée la propriétaire.

Le nom de la boutique tire ses origines de l’histoire agricole des Éboulements. « Les foins salés (désignent) les herbes qui poussent sur les battures ici. Au début de la colonie, les gens voulaient des terres avec accès au fleuve pour avoir les foins salés, parce que c’est un complément de nourriture pour les animaux. »

Provenant de la rive sud de Montréal, cette mère de famille voulait « amener les enfants à la campagne, vivre l’été à la campagne avec eux. »

« On a commencé à l’été 80 à Saint-Joseph-de-la-Rive. On était deux copropriétaires (avec) Louise Letendre, qui est décédée malheureusement en 85 d’un cancer fulgurant », se rappelle Mme L’Écuyer Mondou.

Finalement installée sur la Route du Fleuve en 1983, la boutique a d’abord été créée pour vendre les créations de Louise Letendre, elle-même artisane, puis a rapidement accueilli celles d’autres artisans du Québec.

« Au début j’allais les chercher, puis à un moment donné, les artisans entre eux se parlaient, puis ils sont venus. Comme je fais attention à mes artistes, que je les paye régulièrement, ils se disent : va là, t’as pas de problème », raconte l’octogénaire avec le sourire.

On a ainsi pu voir aux Foins Salés le travail de Louise Letendre bien sûr, mais aussi de Marie Joncas et Christine Audet de Baie-Saint-Paul, des pièces de porcelaine de Louise Bousquet, des vestes de TIB de la Montérégie, des bijoux d’André Gagnon et une panoplie d’autres artistes.

Les Foins Salés propose une grande diversité de pièces d’artisanat québécois.

Tenir boutique occupait Yolande L’Écuyer Mondou presque la moitié de l’année, et l’autre moitié était consacrée à garnir ses comptoirs et tablettes en vue de la prochaine saison. « Le travail d’hiver, c’était de faire les expositions pour trouver toujours des artisans nouveaux, mais des artisans québécois », souligne-t-elle.

Sa fille, Isabelle Mondou, affirme que sa mère « a toujours été fidèle à ses convictions. Elle aurait pu, pour faire un peu plus de sous, aller chercher des choses un peu plus commerciales. Elle a toujours voulu respecter l’artisanat québécois. Aller dans les métiers d’art, chercher les artisans, c’est un travail de toute l’année. »

Ces artisans qu’elle affectionne, Yolande L’Écuyer Mondou doit malheureusement leur dire que l’aventure est bientôt terminée. « Y en a à qui j’ai dit que c’était la dernière année. Par contre y en a que j’ai laissé entrevoir que ça pouvait être la fin. Aux fêtes, je vais leur envoyer une belle carte disant que l’année est terminée, que les Foins Salés sont fermés. Je les remercie… »

À ces mots, l’émotion prend le dessus. Avec un étranglement dans la voix, Yolande L’Écuyer Mondou revient sur la confiance et le respect qu’elle a développés avec les artisans. « De savoir que c’était dans une boutique qui représentait l’artisanat québécois, c’était important pour beaucoup. »

Aux côtés de sa mère, Isabelle Mondou concède que « prendre la décision puis le fait de le dire, ce n’est pas la même chose. Ça fait 43 ans quand même. Là, c’est beaucoup de choses qui tombent ».

Même si fermer boutique est une page difficile à tourner, celle des Éboulements durera encore. Yolande L’Écuyer Mondou garde sa maison de la Route du Fleuve et continuera, chaque année, de « vivre l’été à la campagne ».

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