Les tourments d’une rentrée scolaire

Par Lisianne Tremblay 7:00 PM - 6 mai 2020
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Marina, Alexye et Léo-Gabriel Simard retourneront à l’école le 11 mai.

Le retour en classe suscite de nombreuses réactions. Voici les opinions de quatre parents d’enfants qui fréquentent les écoles de Charlevoix.

Les Simard

Stéphanie Chouinard et Tony Simard enverront leurs trois enfants, Marina, Alexye et Léo-Gabriel, à l’école le 11 mai. Elle ne comprend pas pourquoi il y a de si grandes différences entre le retour à l’école et les services de garde d’urgence en milieu scolaire.

« Je suis infirmière auxiliaire et mon conjoint travaille dans un  service essentiel, a-t-elle précisé. Nos enfants avaient accès au gymnase au service de garde par exemple. S’ils jouaient à quatre autour d’une table au Monopoly, leur jeu était désinfecté à la fin. Ils n’avaient même pas à s’occuper de la distance de deux mètres entre eux. Ils se lavaient les mains plus souvent, c’est le seul changement pour eux. Les mesures d’hygiènes étaient déjà très bonnes. Ils retournent dans la même école et là, ils seront dans le même local toute la journée. En plus, les enfants n’auront plus accès aux vestiaires. Ce sera pas facile pour les journée de pluie. »

L’horaire prévu sera aussi compliqué pour les parents. « Les enfants termineraient à 14 h, mais ils devront être au service de garde jusqu’à 16h30. Ce sont les éducateurs qui se déplaceront dans leur classe. Je ne suis pas à l’aise qu’ils les emprisonnent. Je sais que mes enfants vont bien s’adapter, mais je trouve que c’est long pour eux. Je ne comprends pas pourquoi il y a autant de restrictions et que cet été ils vont quand même ouvrir les camps de jour. »

D’autre part, les Simard déplorent que les enseignants ne puissent même pas aider les enfants s’ils se blessent. « Ils ne peuvent pas leur mettre un pansement parce qu’ils ne peuvent pas les toucher, a affirmé Mme Chouinard qui ne comprend pas cette situation alors que les enfants ne seraient pas des vecteurs de transmission de la COVID-19. Il lui sera aussi interdit d’aider un élève à ouvrir son plat pour son repas de dîner parce qu’ils ne peuvent être en contact avec eux. »

Leurs enfants, qui sont âgés de 10 ans, 9 ans et 6 ans, ont tout de même hâte de revoir leurs amis.

Les Lemieux

Christina Dallaire et son conjoint sont indécis. Ils se donnent encore une semaine pour décider si ils enverront leurs  trois enfants âgés de 6, 7 et 9 ans à l’école Beau-Soleil  de Saint-Aimé-des-Lacs. « Mes deux garçons Ryan et Casey sont asthmatiques, a raconté la maman. J’en ai parlé avec leur médecin. Je me sens déchirée par tout ce qui se passe. Pour le moment, il y a peu de cas de COVID-19 dans la région, mais avec la levée du barrage, il risque d’y en avoir plus.»

Le retour en classe impose de nombreux changements aux élèves. Mme Dallaire trouve dommage qu’ils soient «confinés dans leur classe alors qu’avant ils venaient dîner à la maison.» «Ma mère, qui est âgée de 77 ans, arrivait tôt le matin et elle était là pour le repas du midi et en fin d’après-midi. On devra se débrouiller autrement puisqu’elle ne peut plus venir ici. Il y aura tellement de restrictions à l’école. Nous avons encore beaucoup d’interrogations. La Commission scolaire et les enseignants n’ont pas encore toutes les réponses. Mes enfants ne veulent pas y aller, mais c’est à nous que revient la décision.»

Le fait que les enfants n’aient plus accès au gymnase et à la bibliothèque est également un irritant. « Mes enfants ont besoin de bouger, ce sera difficile pour eux de rester dans la même classe surtout pour ma fille qui est en maternelle. Je ne suis pas d’accord avec toutes ces mesures. J’ai pensé qu’ils pourraient commencer la première semaine et après on verra. J’ai changé plusieurs fois d’idées. Mon conjoint retourne travailler dans le domaine de la construction le 11 mai. J’occupe un emploi dans un service essentiel et mon horaire ne concorde pas avec celui de l’école. »

Mme Dallaire pourrait avoir droit à la Prestation canadienne d’urgence si elle décide de rester avec ses enfants à la maison. « Ils sont déjà habitués à faire des devoirs sur leur tablette. Ils parlent aussi à leurs amis virtuellement », conclut-elle.

Ryan, Elsa et Casey Lemieux pourraient ne pas retourner en classe.

Les Fortin et Gagnon

Alexis Gagnon retournera à l’école Laure-Gaudreault, mais seulement le 19 mai.  « Je veux d’abord voir comment se passera la première semaine, a précisé sa mère Jasmine Fortin. Mon fils n’aime pas l’école, mais je suis contente qu’il veuille y retourner pour voir ses amis. Je comprends que c’est un gros défi pour la commission scolaire. La classe de mon fils a 19 élèves et c’est une classe de 3e et de 4e année. Des groupes d’élèves devront être jumelés. »

Alexis a fait un minimum de travaux à la maison, mais ça demande beaucoup d’efforts pour le motiver. « Son enseignante était exceptionnelle donc c’était plus facile cette année, a confié Mme Fortin. Il a fait quelques travaux avec la trousse pédagogique. C’est un choix volontaire pour le retour en classe, mais on ressent quand même une petite pression comme parent. C’est comme si le bateau était reparti. Je trouve que c’est important qu’il puisse revoir d’autres enfants. »

Si le jeune Alexis avait craint d’attraper le virus, il serait resté à la maison. « Je suis seule avec lui donc si j’ai le virus, ce serait compliqué puisque son père est à trois heures et demie de route, a ajouté la maman. J’aurais été plus rassurée si nous avions gardé le barrage routier jusqu’à la fin de l’année scolaire. »

Elle demeure près de l’école. Son fils pourra continuer de marcher pour s’y rendre. Il devra changer ses habitudes puisqu’il se tenait avec ses amis en petits groupes à la sortie de l’école. Ce sera encore possible de le faire, mais la distance de deux mètres leur sera imposée.

Alexis Gagnon, âgé de 10 ans, retournera à l’école le 19 mai.

Les Rochette

Marie-Pier Gaudreault et Pierre-Luc Rochette ont hésité longtemps avant de décider de garder leur fille âgée de 4 ans à la maison. « Ce qui m’a fait changer d’idée, ce sont les procédures en classe, a soutenu Mme Gaudreault. Ma fille est en maternelle 4 ans à l’école Dominique-Savio. Tout repose sur l’enseignant qui ne doit pas les toucher. Même pour la prématernelle, les enfants n’ont plus accès au gymnase, à la bibliothèque et aux modules de jeux. Elle adore les livres, elle a déjà une collection incroyable. Ma fille a besoin de bouger, elle restera donc avec moi. À son âge, c’est plus difficile de comprendre qu’il faut se laver les mains en plus des autres mesures.»

Mme Gaudreault effectuait le transport de sa fille à Saint-Urbain puisque la maternelle 4 ans n’est pas offerte à Baie-Saint-Paul. « C’était sur mon chemin vu que je travaille à l’Hôtel du Petit Manoir du Casino à La Malbaie. Elle aime ça apprendre, elle était rendue là. Elle pourra quand même faire des activités que son groupe fait à l’école. Je continuerai à communiquer avec son enseignante une fois par semaine. »

Ses parents ont aussi eu des doutes à la retourner à l’école parce qu’Abigaëlle a fait des otites à répétition. « Elle a une santé un peu fragile. Elle a déjà eu des tubes et elle s’est fait opérer pour ses oreilles. En mars, elle a subi une chirurgie pour se faire enlever les amygdales. Ce sera donc préférable pour elle de rester à la maison. Elle ne me parle pas beaucoup de ses amis. Elle est capable de jouer seule et elle m’aide à faire de petites tâches. »

Abigaëlle retournera à l’école en septembre, mais cette fois ce sera à Baie-Saint-Paul.

Marie-Pier Gaudreault et la petite Abigaëlle.

 

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