«On est rendu avec un dépanneur à vins» – Richard Berthiaume

Par Eric Maltais 4:22 PM - 22 mars 2017
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Furieux! Carrément furieux… L’homme d’affaires Richard Berthiaume brandit le spectre de l’effritement de l’économie des régions en constatant les décisions qu’il qualifie d’irréfléchies prises dans un contexte de rationalisation des dépenses et de désintéressement des sociétés d’État à remplir leur mandat de bons citoyens corporatifs.
En entrevue, M. Berthiaume, le plus ancien commerçant de Place Charlevoix, ne digère tout simplement pas la dernière décision de la Société des alcools du Québec de couper environ 35% de sa superficie, donc son offre de produits haut de gamme : « On est rendu avec un dépanneur à vins. C’est tragique pour Charlevoix et la communauté des affaires. Cette décision est passée sans que personne ne fasse quoi que ce soit pour sauver notre SAQ Sélection, parmi les plus belles au Québec. On a beau faire des pieds et des mains pour être beaux, fins et gentils pour recevoir la visite, si on a entre 50 et 60% moins de produits pour les accueillir, ils vont magasiner ailleurs ».

« Nous avons une clientèle estivale dont les familles viennent ici depuis plus de 100 ans. Ils arrivent ici avec la visite et consomment des produits haut de gamme que nous pouvions leur offrir grâce à notre SAQ Sélection.»

«Maintenant, nous leur disons: Achetez-les ailleurs avant d’arriver ici. Ces gens entraient dans le centre commercial, visitaient des boutiques, consommaient chez-nous. Vous seriez surpris d’entendre les commentaires négatifs que les touristes disent maintenant. Les gens nous parlent ».
Les sociétés d’État ont deux devoirs, selon M. Berthiaume, dont celui d’apporter des dividendes bien sûr afin de financer nos services sociaux. « Elles ont aussi un devoir social à remplir, surtout quand elles opèrent dans la plus belle région du Québec qui accueille du tourisme international. Tourisme Charlevoix, la Ville de La Malbaie, la MRC et les entreprises reliées à cette industrie font des pieds et des mains pour bien desservir. Et nous, nous ne pourrons plus leur offrir leurs produits. Pensez-vous qu’ils vont attendre ici pour commander par Internet pour avoir leurs vins? », rugit-il.
« La SAQ est un moteur économique. Elle doit rencontrer son devoir social et non rendre les clients insatisfaits parce qu’ils devront modifier leurs habitudes de consommation. C’est la seule entreprise qui coupe du service et ses produits sans avoir de réactions », ajoute le propriétaire de La Malbaie Communications.
Il va plus loin en questionnement aussi la présence physique des ministères dans Charlevoix : « Où sont les dirigeants de la Sûreté du Québec, des agents de conservation, du personnel hospitalier des établissements de santé? On nous enlève les gros salaires et on nous dit: “Organisez vous!” C’est rendu qu’on fait notre bouffe de l’hôpital de La Malbaie à Baie-Saint-Paul et la première affaire qu’on va savoir, ce sera rendu à Québec! Avant, on avait trois ministères ici. Que reste-t-il? », fustige encore celui qui s’est impliqué dans bon nombre d’organisations charlevoisiennes au fil des ans, dont le Rallye de Charlevoix, pour lequel il reprend du service afin de soutenir la nouvelle organisation.
Son cri du cœur va plus loin : « Dans le fond, on veut que Charlevoix fasse des beaux jardins d’été, qu’on vienne boire du vin et manger du fromage. Seules [les villes de] Montréal et Québec reçoivent tout. J’appelle ça la technique du porc-épic: on nous arrache les aiguilles une par une, le temps de tout ramasser. Avant on avait une fierté ».
M. Berthiaume conclut par le fait que Charlevoix n’a plus aucun poids politique : « Si les régions avaient du poids, on n’en serait pas là aujourd’hui. Les politiciens diront qu’ils ne peuvent s’ingérer dans les sociétés d’État. La réalité, c’est le fait qu’on coupe des services, qu’on fait manger du réchauffé aux malades, que nous ne sommes plus impliqués dans les décisions et que n’avons plus de recours pour combattre ».