L’Aigle d’Océan : vérité cachée par la Guerre froide

Par Eric Maltais 22 août 2015
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Avec la sortie de Naufrage dans l’Ungava, le réalisateur Jean Bergeron dévoile une partie du mystère entourant le naufrage de l’Aigle d’Océan, le 20 août 1975 dans la Baie d’Ungava, dans lequel six personnes y ont laissé leur vie, au courage de leurs actions.

La première de ce documentaire a été présentée hier soir à l’église de Saint-Joseph-de-la-Rive, 40 ans et un jour plus tard, devant 150 membres des familles impliqués, toutes aussi émues les unes que les autres. En entrevue au Musée maritime avant la présentation, M. Bergeron a avoué s’intéresser à ce sujet parce qu’il trouvait anormal que des gens qu’il avait côtoyé en toute intimité n’avaient jamais eu accès à la vérité.

Ayant eu recours à la Loi d’accès à l’information pour se documenter, malgré les embûches, M. Bergeron s’est inspiré d’images tournées avec une caméra Super 8 du temps, fait témoigner les principaux artisans et a tourné des scènes d’action grâce à l’implication de généreux partenaires de Charlevoix.

« On retrouve des survivants et des familles qui ne savaient pas. Les documents avaient toujours été gardés secrets pour une raison bien évidente. En 1975, au beau milieu de la Guerre froide, le gouvernement canadien ne voulait pas que les Russes découvrent que nous avions des navires déficients équipés d’hélicoptères inefficaces pour protéger le Grand Nord canadien. Ils auraient alors pu y expédier leurs sous-marins à leur gré pour nous espionner», confie M. Bergeron, natif de Québec qui fait aujourd’hui carrière à Montréal. Il a noué ces liens dans Charlevoix parce que sa belle-famille du temps résidait ici.

Yvan Desgagnés, armateur, Jeannot Belley, 1er officier, Gérard Belley, 1er  officier, Julien Tremblay, second mécanicien, de l’équipage de l’Aigle d’océan, et Hubert Desgagnés, 3e officier de la Garde côtière sur le Norman Mcleob Rogers, entre autres, nous racontent l’histoire. « Jamais cependant, nous saurons pourquoi le bateau a coulé. Il n’y a jamais eu de blâme », a lancé M. Belley, la vraie raison étant aujourd’hui au fond de l’Ungava, où jamais le bateau ne pourra être récupéré, les eaux étant trop profondes. Les deux autres derniers survivants de l’Aigle encore vivant, Pierre-Paul Bouchard et Pierre Hamel, n’ont jamais voulu reparler de cette aventure.

Pour confirmer comment le monde de la mer est petit, M. Desgagnés rappelle que l’Aigle d’Océan avait son port d’attache à Saint-Joseph-de-la-Rive. Son cuisinier Marcel Tremblay avait travaillé sur plusieurs goélettes d’ici, en plus d’être cuistot au Restaurant Le Marsouin, situé à l’époque près du quai. Lucien Pilotte, 3e mécanicien du brise-glace, était originaire des Éboulements. Jeannot et Gérard Belley, de même que Hubert Desgagnés et Julien Tremblay étaient cousins dans leur famille respective.

Les tournages ont été possibles grâce à la participation de la Traverse Rivière-du-Loup Saint-Siméon et son directeur général le capitaine Marc Harvey, qui a permis au traversier Trans Saint-Laurent de devenir le vrise-glace Norman Mcleod Rogers. Le propriétaire du remorqueur Le Théodore, Luc Lachapelle, a lui aussi permis que son navire joue le rôle de l’Aigle d’Océan.

L’Aigle d’Océan avait comme mission d’alimenter les villages inuits du Nord du Québec. Encore aujourd’hui, ce mode de navigation permet l’alimentation de villages nordiques

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