Surtout ne pas oublier le fleuve

Par Emelie Bernier 7:57 AM - 12 mai 2024 Initiative de journalisme local
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Une maquette de l’Espace La Rive. Courtoisie

Sur papier, c’était parfait! Une belle plage de sable où piquer des parasols ou un roupillon, une terrasse sur l’herbe avec tables bistro, cantine mobile, petits concerts sympathiques… Un coup d’œil à la maquette donne envie de s’y prélasser de longues heures durant. Mais un petit tour sur les lieux sème le doute. Réaliste, l’Espace La Rive, en 2024?

Parfois, la synchronicité fait drôlement les choses. Je viens tout juste de mettre la dernière touche au Destination Charlevoix de l’été 2024, notre magazine touristique. Parmi les nouveautés qui y ont droit de cité, on déniche un petit encadré sur un bien beau projet: l’Espace La Rive.  

« L’ancienne école Jean XXIII, à Saint-Joseph-de-la-Rive, a accueilli tour à tour des élèves, une caisse «pop», des conseils municipaux, des mariages, des baptêmes, des enterrements, le Cercle des Fermières, un théâtre d’été, maintes veillées carnavalesques… Aujourd’hui, cet espace aux 1001 vies devient l’Espace La Rive, la nouvelle place du village, le lieu parfait pour un tête-à-tête avec le fleuve. En plus d’une très jolie plage de sable où pique-niquer ou piquer une tête à marée haute (frileux, s’abstenir!), terrasse publique avec buvette décontractée (sporadique cet été), petits concerts sympathiques et ambiance conviviale vous y attendent », pouvait-on y lire dans la version initiale.

In extremis, après ma visite, j’ai eu le temps d’enlever la mention de la « très jolie plage ». Car force est de constater que celle-ci n’existe pas. Et que sa présence cet été relèverait du miracle. Ou d’une sacrée job de pépine…

L’état des lieux.

Saint-Jo, c’est mon village. J’ai grandi en face de l’École Jean XXIII. J’ai patiné sur la patinoire qui se trouvait dans sa cour. J’ai joué à la balle au mur sur sa façade. J’ai même fait des graffitis (à la craie!) sous la rampe d’accès menant à sa salle paroissiale, graffitis semi méchants qui ont valu à mes parents un appel de la direction d’école de Léonce-Boivin…

Dans ladite salle, j’ai vu mon père siéger à la table du conseil municipal. J’ai assisté à maintes partys…

Et je garde un vif souvenir de ma performance de lipsync dans un gala organisé par notre cher, et regretté curé Jean Moisan, sur Holiday, de Madonna. J’avais 12 ans.

Je n’ai jamais fréquenté l’école Jean XXIII en tant qu’élève (très peu l’ont fait!), mais j’y ai ouvert mon premier compte épargne à la caisse pop, bu mes premiers drinks, pratiqué mon piano. Comme nous n’avions pas ce discret instrument à la maison, j’allais tous les jours chercher la clé chez le maire qui vivait tout près, le gentil Bruno Trudel…

Saint-Jo, c’est mon bled. Je n’y vis plus depuis belle lurette, mais j’y retourne souvent. Et l’idée de l’Espace La Rive, un lieu, plein de promesses, rassembleur, festif, me plaît. C’est le Saint-Jo que j’ai connu, celui des belles années, du Loup-Phoque, de chez Barbara, de la piscine Beauséjour, de la Perdriole, du Castel. Le Saint-Jo joyeux en été, où débarquaient les estivants comme un vent chaud après le long hiver.

Celui d’avant l’accident qui a lui a sérieusement plombé le moral.

Comme la petite église à laquelle les Gestionnaires d’en bas veulent redonner vie,  comme le musée maritime et la papeterie qui se démènent, comme ce superbe projet de piste cyclable entre « Saint-Jo » et Baie-Saint-Paul, l’Espace La Rive est un pan important de la renaissance attendue du village où j’ai grandi.

Il ne faudrait juste pas oublier le fleuve et ses marées, qui font à la fois le charme et la vulnérabilité du village.

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