Travailleurs étrangers temporaires: « sans eux, on ferme » -Simon Lavoie

Par Emelie Bernier 7:35 AM - 21 février 2024
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Simon Lavoie et Guillaume Hamel-Dubois.Courtoisie

Simon Lavoie, copropriétaire de l’entreprise Cèdréco de Saint-Aimé-des-Lacs, ne mâche pas ses mots. Les nouvelles sur la volonté de la Coalition Avenir Québec de restreindre le nombre de travailleurs étrangers temporaires (TET) et d’exiger une certaine maîtrise du français inquiètent au plus haut point l’entrepreneur. Sur 22 employés, 9 sont originaires d’Amérique du Sud. Et leur apport est vital non seulement à la prospérité de l’entreprise, mais à sa survie.

« Je n’étais plus capable de développer. Ça doit faire dix ans que je n’ai pas eu de CV de Québécois. Je n’ai pas eu le choix de me tourner vers les TET et j’ai attendu 18 mois, presque deux ans avant que les premiers arrivent. Aujourd’hui, je ne pourrais jamais m’en passer. Ils ont sauvé ma compagnie! Avec eux, j’ai quelqu’un au poste, ils sont fiables, travaillants et motivés », confie l’entrepreneur. 

Un peu plus loin vers le parc des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie, le producteur agricole Guillaume Hamel-Dubois confie également une « dépendance » à ces membres à part entière de son équipe. 

Sur six employés qui travailleront aux Jardins Écho Logiques cet été, trois sont originaires du Guatemala. « En agriculture, c’est difficile de trouver la main-d’œuvre et là, on dirait que le gouvernement québécois a oublié à quel point on était dans la merde durant la pandémie quand on ne pouvait plus les faire venir. On devait laisser les légumes pourrir dans le champ! », rappelle Guillaume Hamel-Dubois. 

Le 1er novembre dernier, la Coalition Avenir Québec annonçait son intention d’ajouter une nouvelle exigence linguistique pour les TET (voir autre texte). « Une aberration » selon les deux employeurs, bien que ceux du secteur agricole ne soient pas concernés par cette exigence. 

« Le gouvernement veut limiter le nombre de TET, leur faire faire des tests de français… Ce sont des travailleurs temporaires, le nom le dit! Ils ne viennent pas habiter ici, ils viennent travailler, faire un coup d’argent, et ils tiennent à retourner dans leur pays pour réinvestir dans leurs communautés, supporter leurs familles! », s’exclament-ils.  

Grâce à ses employés modèles, qui sont également devenus des amis, Guillaume Hamel-Dubois a pu retrouver une certaine qualité de vie et même envisager une croissance de son entreprise. « J’étais obligé de faire 90 heures de travail par semaine avant d’avoir l’aide des TET. Avec eux, j’ai réussi à baisser mes heures à environ 60 l’été. S’ils ne sont pas là, je vais devoir fermer des divisions, que ce soit les marchés publics, les paniers de famille ou la restauration. Je n’arriverai pas à tout faire! »

On n’obligera pas un anglo de Westmount à parler français, mais un travailleur du Sud qui vient nous donner un coup de main quelques mois, lui, on va l’obliger… Un Canadien de l’Ouest vient travailler chez nous, pas besoin, mais le Guatémaltèque, le Philippin, oui!

Simon Lavoie est sidéré qu’on envisage d’exiger un niveau de français à ses collègues du Sud. « Ça fait un bout de temps qu’ils m’ont donné la documentation pour les examens de français, c’est une brique de 60 pages. On n’obligera pas un anglo de Westmount à parler français, mais un travailleur du Sud qui vient nous donner un coup de main quelques mois, lui, on va l’obliger… Un Canadien de l’Ouest vient travailler chez nous, pas besoin, mais le Guatémaltèque, le Philippin, oui! J’ai des travailleurs qui savent à peine écrire… On ne tape pas sur le bon clou ici! », se désole M. Lavoie. 

Le Québec a beaucoup à perdre si de nouvelles contraintes s’ajoutent à la venue des TET. « Notre économie et notre agriculture en dépendent. Sans eux, je ferme demain matin », lance M. Hamel Dubois, convaincu.

Simon Lavoie abonde dans le même sens. « Oui, c’est à renouveler à chaque année, c’est beaucoup de paperasse, ça coûte cher! Les gens pensent qu’ils sont mal payés parce qu’ils gagnent un peu moins que nos travailleurs d’ici, mais c’est un prix qui est fixé par le gouvernement et on leur fournit le logement, le transport… Malgré tout ça, ça vaut la peine. Il en va de la survie de nos entreprises », lance-t-il.

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