Faire le deuil de Suzanne Clermont, victime de Carl Girouard le 31 octobre 2020

Par Emelie Bernier 2:22 PM - 2 juin 2022
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Michel Clermont

Michel Clermont se souviendra toujours du 31 octobre 2020. Ce soir-là, il regardait les nouvelles et découvrait avec horreur le drame qui se déroulait dans le Vieux-Québec. Un homme déguisé attaquait des badauds, armé d’un sabre de type katana. Le nombre de blessés grimpait de manière effarante et on demandait aux citoyens du quartier de demeurer à l’intérieur et de barrer leurs portes. Quelques instants plus tard, il apprendrait que sa sœur, Suzanne, était l’une des victimes de la cavale meurtrière de Carl Girouard.

M. Clermont n’a pas suivi le procès de Carl Girouard, déclaré coupable le 20 mai de deux meurtres au premier degré et de cinq tentatives de meurtre. Peu importe le verdict. Le deuil de sa sœur Suzanne, assassinée à coups de sabre en cette soirée funeste, est toujours vif.

22 coups de sabre,  précise le frère endeuillé.

Car les détails, forcément, sont parvenus jusqu’à lui.

«Je ne suis pas allée au Palais de justice, je n’ai pas lu les journaux, mais tout le monde m’en parlait. C’est normal, mais c’est sûr que ça fait remonter la peine, chaque fois », confie-t-il, les yeux embués.

Difficile d’accepter la mort violence de son aînée. « Elle avait 2 ans de plus que moi, elle s’est beaucoup occupée de moi quand j’étais petit. On était proche. C’était vraiment une personne joviale, gentille, agréable… »

Il soupçonne même que cette gentillesse l’a mise sur le chemin du tueur. « Elle était sortie fumer une cigarette. Si ça se trouve, elle l’a attendu pour jaser avec lui. Il était costumé, c’était l’Halloween.  C’était une femme tellement chaleureuse, elle aimait jaser avec le monde… Mais ça a fini par 22 coups de sabre. Elle criait et j’ai l’impression qu’il lui en donnait chaque fois un autre pour qu’elle arrête de crier… C’est mon beau-frère Jacques Fortin qui est sorti et l’a trouvée… »

Renaissance avec Kallya

Certes, la peine est encore vive, un an et demi plus tard, mais la vie continue et elle sème des anecdotes touchantes dans le sillage de Suzanne Clermont.

« La blonde de mon fils, peu de temps après le décès de Suzanne, est tombée enceinte.  On s’est dit « Suzanne est toujours là, avec nous »… Ma bru est entrée 3 jours avant le 31 octobre à l’hôpital pour accoucher et la petite ne voulait pas sortir. Le 31, on a souligné le premier anniversaire. Puis Kallya est née, en fin de journée. Un an jour pour jour après le décès de ma sœur.  Pour nous, c’est comme si Suzanne revenait », raconte Michel Clermont avec émotion. La petite porte d’ailleurs le nom de Kallya Suzanne Clermont.

Lors du baptême il y a quelques mois, à la basilique Sainte-Anne, Michel Clermont s’est entretenue, peu avant la cérémonie, avec le prêtre. Il lui a parlé de sa sœur, du baume que Kallya est venu poser sur son cœur en peine.  « On a parlé de Kallya, dont le surnom est Kallya Suzanne Clermont. Il n’en revenait pas qu’elle soit née le même jour.  Il m’a dit « sais-tu comment je m’appelle? » Le prêtre s’appelait Jacques Fortin. Il avait le même nom que mon beau-frère. C’est Jacques Fortin qui a baptisé ma petite Kallya… »

Les échos de la tragédie du 31 octobre ont retenti aux quatre coins de la planète. « Tout le monde en a parlé à travers la planète. J’ai un bottin qu’on m’a donné à l’Assemblée nationale  de toutes les condoléances qui ont été envoyées, par des ministres à travers le monde. C’est épais comme une bible. Ils m’ont remis ça, relié. C’est impressionnant! »

L’autre victime, François Duchesne,  a aussi des liens dans Charlevoix. Michel Clermont aimerait peut-être que ces liens avec la région fassent l’objet d’une petite attention.  « J’aurais peut-être aimé ça qu’on fasse un petit quelque chose à La Malbaie, pour commémorer la mémoire de Suzanne et François.  Il y aura bientôt une plaque qui sera installée dans le parc devant le Château Frontenac. On va être convié. Si Charlevoix veut le souligner, j’aimerais ça», glisse M. Clermont, sans attente précise.

Suzanne Clermont Photo : Vincent Bernier

Dans cette histoire comme dans plusieurs autres du genre, les projecteurs sont longtemps tournés vers les meurtriers. « On parle beaucoup du meurtrier, mais ce serait bien aussi qu’on se rappelle de ceux qui sont tombés… »

Pour lire le texte publié lors du drame, c’est ici.

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