Chronique : des bras pour le patrimoine

Par Brigitte Lavoie 3:58 PM - 4 février 2020
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Il importe de s’occuper du patrimoine bâti avant qu’il ne soit trop tard.

On répare avec les moyens du bord, on arrache la tôle à baguettes au profit des bardeaux d’asphalte, on change les fenêtres à battant pour le modèle en PVC du moment, on massacre la balustrade de bois pour s’éviter de la peinture, on cache les moulures d’époque sous le soffite et on met du mono partout. Notre patrimoine bâti a eu la vie dure, et l’a encore.

Heureusement, s’il y a une certitude avec nos vieilles maisons et nos bâtiments d’une autre époque, c’est que ceux à caractère exceptionnel sont de moins en moins nombreux, et qu’il est toujours possible de faire mieux.

Une petite actualité a attiré mon attention la semaine dernière : le gouvernement du Québec octroie une aide de 30 millions $ sur trois ans pour soutenir les efforts de conservation et de mise en valeur du patrimoine bâti en région. Dans les prochains mois, plusieurs localités pourront notamment embaucher un agent de développement en patrimoine culturel immobilier (alias spécialiste en vieille maison.) L’aide financière du gouvernement permettra de défrayer en partie le coût de ces nouvelles ressources, mais prévoit aussi de l’argent pour soutenir des propriétaires de bâtiments patrimoniaux (immeubles construit avant 1975) dans leurs travaux de restauration et les propriétaires privés qui veillent sur un bâtiment patrimonial tel qu’une maison ancestrale au cœur d’un village par exemple.

Mais concrètement, qu’est-ce que ça signifie pour les M. et Mme Tremblay qui habitent une vieille ancestrale au cœur d’un village charlevoisien ou pour une organisation qui veille sur un bâtiment patrimonial? En appelant à la MRC, ils pourront parler directement avec une personne compétente qui tout comme elle, se préoccupe de l’avenir de leur vieille maison. Ils auront ainsi accès à une oreille attentive, mais également à tout un monde de connaissances, d’expertises et de ressources en patrimoine bâti. L’agente culturelle Annie Vaillancourt fait déjà ce type de travail dans l’ouest. Mais grande nouveauté, Mme Vaillancourt et tous ses collègues pourront désormais guider certains propriétaires vers des programmes de subvention.

Sur le terrain, souhaitons aussi que l’initiative du gouvernement permettra de mieux connaître notre patrimoine bâti et les immeubles qui valent la peine d’être préserver. Car il est évident qu’on ne peut pas tout sauver. Parmi la série d’actions pertinentes et concrètes dont on peut rêver, citons la réalisation d’un inventaire du patrimoine bâti complet du territoire de notre MRC. Selon notre collègue Karine Dufour-Cauchon, c’est d’ailleurs l’une des actions que la MRC de Charlevoix-Est souhaite mettre de l’avant si elle obtient sa part de l’aide gouvernementale. Identifier l’ensemble des bâtiments de notre territoire qui ont une valeur patrimoniale est le premier pas à faire pour la valorisation et la sauvegarde de ce patrimoine.

On dit souvent que le patrimoine bâti est l’affaire de tous. Beaucoup de gens se sentent concernés et interpellés. Par contre, quand les temps sont durs et que des décisions difficiles et coûteuses sont à prendre, rien n’est à personne. Et ceux qui ont le pouvoir de décider sont à bout de ressources ou ne croit pas à l’importance de préserver ces héritages. Trop souvent, les initiatives concrètes en préservation du patrimoine bâti sont rares et les moyens font défauts. Et on sort le mono.

Est-ce que ce 30 millions $ à se partager à la grandeur du Québec sera suffisant? Sans doute que non. Plusieurs bâtiments et cœur villageois en ont déjà beaucoup sur les bras. Plusieurs propriétaires supportent sans aide un patrimoine que pourtant personne ne veut voir disparaître. Mais il faut un début à tout. Alors saluons le fait que le gouvernement ait entendu les régions et mette l’épaule à la roue pour la conservation du patrimoine, et que la MRC de Charlevoix-Est saisisse la balle au bond et prenne le train.

 

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