Territoires informels au Musée de Charlevoix : « photo à numéro » et anti-obsolescence à Haïti

Par Emelie Bernier 3:00 PM - 20 mai 2024 Initiative de journalisme local
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Emmanuel Gallant.

Durant ses séjours à Haïti, l’artiste et commissaire Emmanuel Gallant s’est pris au jeu de photographier les habitants du pays en optant pour un angle plutôt original. Chacune des photographies présente un numéro, généralement affiché sur un chandail sportif, plus rarement sur un mur ou un objet. Les clichés, qui permettent de jeter, en périphérie du sujet principal, une œillade intime sur le quotidien des Haïtiens, sont réunis sous le titre Recensement 2000-2020. 

« À la base, les gens là-bas portent beaucoup de t-shirts sportifs. Ces photos, je les prends souvent à la volée, en marchant. C’est l’anti-studio! La stratégie, c’est d’aller là où il y a du monde! Les chiffres venaient à moi! », explique celui qui se définit comme artiste multidisciplinaire.

La plupart des photos ont été prises de dos, de façon anonyme. Lorsque les visages des sujets sont exposés, une permission a évidemment été accordée.

Peu de femmes figurent dans la proposition. « Il y en a huit. On est loin du 50/50, mais ce n’est pas du sexisme. Y’a moins de femmes qui portent ce genre de t-shirts! Je ne suis pas dans un studio, ce n’est pas arrangé », explique M. Gallant.

L’exposition, lorsque complète, présente les nombres de 1 à 90 dont certains comptent plusieurs photos, mais d’autres une seule. Au Musée de Charlevoix, sur les murs dédiés, au rez-de-chaussée, les photographies s’arrêtent au nombre 42.

« J’aime bien comment l’exposition a été montée, ça sort du cadre très formel », indique M. Gallant.

L’anti-obsolescence programmée

À l’étage, une série de photographies signées Roberto Stephenson présente des objets utilitaires du quotidien, Made in Ayiti. Bancs et coffres portent la trace des années et ont été photographiés sur un drap blanc, directement sur les lieux où ils sont utilisés quotidiennement. « Pas question d’extraire les objets de leur milieu, ce sont des outils de travail! Ce qu’on voit ici, ce sont des sculptures, carrément! Tant que l’objet remplit sa fonction, pourquoi le remplacer? C’est l’anti-obsolescence programmée », lance, admiratif, Emmanuel Gallant.

Ses deux séries de photographies s’ajoutent à celles de la série Noctambules de Josué Azor pour former l’exposition collective « Haïti- territoires informels », commissariée par Emmanuel Gallant. Celle-ci est présentée en parallèle avec l’exposition principale Fabuleuse culture d’Haïti dont le vernissage est prévu le 15 juin.

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