Seconde journée remplie d’émotions à l’enquête publique du coroner

Par Dave Kidd 7:06 PM - 16 avril 2024
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Alain Tremblay et sa conjointe Kathy Lavoie ont témoigné .

La 2e journée de l’enquête publique de la coroner Andrée Kronström sur le décès de deux pompiers de Saint-Urbain a aussi été ponctuée de témoignages émotifs.

Kathy Lavoie, la sœur de Régis Lavoie, lui a parlé pendant qu’il amorçait l’opération qui lui aura été fatale.

Elle a raconté à l’enquête publique du coroner que son frère avait décidé de lui emprunter son Argo pour aller évacuer deux personnes parce qu’il était sur une remorque et prêt à partir.

« Je lui ai dit t’es sur que tu dois prendre l’Argo .  Oui, il n’a y aucune autre option. Je lui ai dit d’être prudent. Il était habitué à l’Argo puisqu’il l’utilisait pour aller à la pêche avec Alain (son conjoint). Pour lui c’était un champ. Il n’y avait pas de danger pour lui. Ça va bien aller, m’a dit Régis ».

Kathy Lavoie reçoit un appel de son frère alors qu’il était sur l’eau dans le véhicule amphibie. Il lui dit que ça va bien.  15 minutes plus tard, elle le rappelle et il lui dit qu’il y commence à avoir des vagues. C’est la dernière fois qu’elle lui a parlé. « J’ai rappelé, mais il n’a jamais répondu », raconte-t-elle avec émotions.

C’est son gendre, Jeff Guay qui l’a avisé que Régis et Christopher étaient tombés à l’eau en tentant de réaliser l’évacuation. « J’ai dit ça ne se peut pas je viens de lui parler. Non, il est parti », a continué son gendre.

C’était la première fois que Régis Lavoie utilisait un Argo comme pompier pour une opération de sauvetage. « Pour lui, c’était important d’aller secourir ces gens. Il aurait donné sa vie pour les autres », a poursuivi Kathy Lavoie.

Elle  voulait garder pour elle ces deux conversations avec son frère qu’elle adorait. Elle n’avait pas dit aux enquêteurs de la SQ qu’elle lui avait parlé. « C’était personnel. C’était pour moi. Régis c’était presque mon garçon. Depuis que ma mère est décédée, on en prend soin. Il venait manger tous les jours. C’était mon frère, mon garçon, mon ami », a-t-elle expliqué en entrevue.

« Mon frère a sacrifié sa vie. Il a fait son possible. On se dit en famille : s’il avait réussi, il aurait dit je suis un héros, malheureusement il n’a réussi. Avec tout ce qu’on a vu comme débris, c’était impossible. Lui, il ignorait quand il est parti. C’était un champ calme », a-t-elle conclu.

Son conjoint Alain Tremblay a aussi témoigné.  Il a affirmé que le moteur utilisé pour l’Argo était en bon état . D’ailleurs Kathy Lavoie a dit avoir entendu les deux moteurs lors des conversations avec son frère. « Votre témoignage est très émotif et il sera très utile » , a indiqué la coroner Andrée Kronström.

L’Argo utilisé était muni de chenille. Elles étaient sur l’engin parce qu’Alain Tremblay l’utilisait l’hiver pour entretenir sa cour. Jeff Guay au courant de la mission avec l’Argo a contacté Mélanie Simard d’Univers traction sports de Château-Richer pour lui demander si ce véhicule peut flotter avec des chenilles.

« Oui, il va flotter, mais n’avancera pas. Les chenilles tapent l’eau ajoutant que « les pneus sont conçus pour propulser le véhicule dans l’eau sans les chenilles».

Franck Croft (photo) bien connu dans le milieu du transport a aussi témoigné. Il avait été contacté par Lynda Simard pour qu’il tente de les évacuer. « C’était trop dangereux d’aller les chercher avec un loader (chargeur sur roue). Il y avait trop d’eau c’était impossible », a-t-il témoigné.

Natif de Saint-Urbain, il en a vu des inondations durant sa vie, « mais jamais comme ça en 50 ans », a-t-il déclaré. « Le courant est très fort. On entendait les roches cogner ensemble et on voyait des arbres passer. C’était l’apocalypse », a-t-il poursuivi.

L’entrepreneur est demeuré en contact avec Lynda Simard toute la journée tant qu’elle n’a pas été évacuée par la Sûreté du Québec. Il s’informait régulièrement du moment de l’arrivée de l’appareil auprès des policiers postés près du pont au pied de la côte à Matou.

La journée s’est terminée avec le témoignage de Sylvain Girard (photo) . Ce policier et pompier retraité de la Ville de Québec habitait près du champ où l’Argo a chaviré.

Dans son témoignage, il a raconté avoir suggéré aux pompiers de mettre leur véhicule à l’eau en passant par son terrain « ou le courant était moins fort ». Une suggestion qui on le sait maintenant n’a pas été retenue.

L’homme qui est aussi conseiller municipal à Saint-Urbain avait décidé aussi tôt que vers 10h30 d’évacuer sa propriété. « J’ai fait une tournée des rivières avant et les débits étaient très forts. Cédric Châtigny (directeur service incendie) est passé me voir et il m’a demandé si je quittais. Il est revenu plus tard pour m’emprunter une chaloupe pour l’évacuation des voisins, mais je n’en ai pas », a-t-il mentionné.

Sylvain Girard a aussi vu que le véhicule dans lequel Régis et Christopher Lavoie prenaient place éprouvait un ennui. « Le moteur était dans les airs »,a-t-il confié. « J’ai vu l’Argo dériver à reculons. Je n’ai pas vu de signe de détresse de leur part ni le véhicule chavirer. Je tentais d’aller fermer le courant dans ma maison. Cédric est revenu et me demande sont où les gars? Il est parti rapidement et revient ensuite me demander du cordage. Il me dit les avoir vu passer sous le pont », a-t-il aussi déclaré.

Il a aussi mentionné que l’embarcation du service incendie de Baie-Saint-Paul avait été demandée, mais qu’elle n’était pas disponible.

Sylvain Girard a aussi précisé ne pas avoir reçu d’ordre d’évacuation. L’ancien pompier a indiqué qu’il ne serait pas embarqué dans un Argo avec son habit de combat. « Un bunker, ce n’est pas fait pour l’eau », a-t-il dit en guise de réponse à une question de l’avocat de la CNESST.

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