La CAQ prête à mettre fin au financement populaire des partis politiques

Par Patrice Bergeron, La Presse canadienne 2:05 PM - 31 janvier 2024
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Le ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne, Jean-François Roberge, répond à l’opposition lors de la période des questions, le mercredi 31 janvier 2024, à l’Assemblée nationale du Québec. LA PRESSE CANADIENNE/Jacques Boissinot

Éclaboussé par des controverses sur ses collectes de fonds, le gouvernement caquiste songe à interdire carrément la possibilité pour les citoyens de contribuer au financement des partis politiques.  

Le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, dit être prêt à rouvrir la loi, alors que les cas de députés caquistes qui monnayent l’accès à des ministres s’accumulent.

La Presse Canadienne a révélé lundi que près de la moitié des maires avaient contribué à la caisse caquiste depuis les élections municipales de 2021, pour un total de près de 100 000 $. 

La loi actuelle prévoit que chaque citoyen peut verser 100 $ à une formation politique, mais il ne peut le faire pour obtenir une contrepartie. 

Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a accusé la CAQ de vouloir, en évoquant une refonte de la loi, détourner le débat sur ses pratiques de financement jugées douteuses. Le Parti libéral (PLQ) a refusé net l’offre caquiste en affirmant que ce n’est pas aux contribuables à financer à 100 % les partis politiques avec l’allocation déjà versée par l’État. 

Le député Vincent Marissal, de Québec solidaire, a demandé formellement mercredi à la commissaire à l’éthique d’enquêter sur les députés caquistes Gilles Bélanger et Yves Montigny, alors que deux autres députés caquistes sont déjà visés par une enquête, Sylvain Lévesque et Louis-Charles Thouin.  

Un autre cas a également été rapporté par le magazine L’Actualité. Le député caquiste de Mégantic, François Jacques, a invité la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, à une activité de financement et des élus municipaux ont payé 100 $ à la caisse caquiste pour parler du financement d’une route locale. 

L’opposition dénonce en chœur ce qu’elle qualifie de système caquiste pour récolter des dons de 100 $ des maires en échange d’une rencontre avec un ministre, mais le gouvernement a contre-attaqué mercredi en suggérant de mettre fin au financement populaire – une source de financement importante pour le Parti québécois (PQ) notamment.  

«Si les choses changent, si les perceptions changent, parce qu’on doit avoir aussi la confiance des Québécois, si les perceptions changent et si les oppositions veulent qu’on rouvre la discussion, s’ils sont prêts, si les oppositions sont prêtes, tout le monde, à dire: faisons une croix sur le financement public», a lancé M. Roberge en mêlée de presse mercredi.

De son côté, l’organisme Élections Québec a fait savoir qu’il est prêt à resserrer et préciser les règles de financement populaire des partis politiques, a appris La Presse Canadienne.

Aux côtés de M. Roberge, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a admis que lorsque des ministres participent à des activités de financement, des personnes en profitent pour discuter avec eux et faire ainsi avancer leur dossier.

Pourtant, en entrevue avec La Presse Canadienne, la directrice générale du parti, Brigitte Legault, avait laissé entendre que dans ces activités de financement, «souvent, entre deux et cinq maires ou conseillers participent, et ils sont parmi un groupe de 50, 100 ou 200 personnes. Il n’y a pas vraiment d’échanges (avec le ministre invité). Si on lui parle, c’est saupoudré».

M. Drainville a minimisé l’influence de ces conversations lors de cocktails de financement caquistes, en martelant qu’on ne peut acheter un ministre à coup de 100 $. 

«Pensez-vous vraiment qu’au bout de deux, trois minutes, il va sortir de là avec un bout de route, un pont ou une subvention?» a-t-il lancé. 

«Y a-t-il quelqu’un qui pense au Québec qu’on peut acheter un ministre avec un don de 100 $?»

«La CAQ change le sujet», a déploré M. St-Pierre Plamondon en mêlée de presse.

«Ce n’est pas ça, le sujet. C’est qu’avec 100 $, on a accès à un ministre de la CAQ. Et si ce n’était pas de ce 100 $, là, probablement qu’on n’aura jamais accès. Et ça, c’est intolérable. Même chose pour l’idée que tu peux faire avancer ton dossier dans un cocktail de réseautage.»

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