Après des années de déclin, la population de baleines noires semble se stabiliser

Par Michael MacDonald 8:30 AM - 23 octobre 2023 La Presse Canadienne
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La population de baleines noires de l’Atlantique Nord, en danger critique d’extinction, comme le montre cette photo non datée fournie par l’Aquarium de la Nouvelle-Angleterre à Boston, semble se stabiliser après des années de déclin décourageant, selon de nouvelles données publiées aujourd’hui par une équipe internationale de scientifiques marins. La Presse Canadienne/Aquarium de la Nouvelle-Angleterre

La population de baleines noires de l’Atlantique Nord, en danger critique d’extinction, semble se stabiliser après des années de déclin, selon de nouvelles données publiées lundi par une équipe internationale de scientifiques marins.

Bien que ces nouvelles soient encourageantes, un scientifique du North Atlantic Right Whale Consortium souligne que les dernières données montrent également que le nombre de blessures d’origine humaine continue d’augmenter.

«Il y a un retard dans la prise en compte de ces blessures», a indiqué Philip Hamilton, scientifique principal à l’Aquarium de la Nouvelle-Angleterre à Boston, dans une entrevue accordée en fin de semaine.

«Les gens sont très concentrés sur le décompte des (baleines). Ils veulent réussir. Mais nous n’avons pas encore réussi, même si les choses se stabilisent. Nous sommes toujours dans une situation assez désastreuse.»

Autrement dit, le récent aplatissement de la tendance démographique indique que les activités humaines tuent désormais autant de baleines qu’il y en a qui naissent chaque année. Cela représente un «fardeau intenable pour l’espèce», a soutenu Heather Pettis, chercheuse à l’Aquarium de la Nouvelle-Angleterre, dans un communiqué publié lundi.

Les dernières estimations s’appuient sur de nouvelles données qui ont conduit à un recalcul des chiffres de population produits depuis 1990.

L’estimation recalculée pour 2021 s’élève désormais à un total de 364 baleines noires de l’Atlantique Nord, une augmentation importante par rapport à l’estimation de 2021 publiée l’année dernière, qui était de 340. Au total, 18 petits sont nés cette année-là, mais bon nombre d’entre eux n’ont été ajoutés que récemment à la base de données du consortium.

Pour 2022, l’estimation récemment publiée est de 356 bêtes, ce qui suggère que «la trajectoire descendante de l’espèce pourrait ralentir», a déclaré le consortium.

«Il y a toujours un retard dans l’ajout de petits à la population parce que nous devons être certains de leur identité, a expliqué M. Hamilton. Parfois, cela prend plusieurs années.»

Peu de décès, beaucoup de blessures

Pendant ce temps, des chercheurs au Canada et aux États-Unis n’ont enregistré que deux décès jusqu’à présent cette année: un mâle de 20 ans heurté et tué par un navire et un bébé nouveau-né et orphelin.

Encore une fois, ce faible nombre est une bonne nouvelle pour l’espèce, mais il continue d’y avoir un nombre élevé de blessures d’origine humaine. Jusqu’à présent, en 2023, les chercheurs ont détecté 30 enchevêtrements dans des engins de pêche et deux collisions avec des navires.

M. Hamilton a affirmé que bon nombre de ces blessures entraîneront probablement la mort, tandis que d’autres baleines blessées ou malades pourraient ne pas être en mesure de se reproduire en raison de leur mauvaise santé.

«Nous savons que nous avons encore un impact très fort (pour les blessures)», a-t-il rappelé.

«Nous parlons de très peu de baleines. Et nous avons beaucoup de femelles qui sont assez âgées pour mettre bas et elles ne l’ont pas fait.»

Le nombre de vêlages reste inférieur à ce que les scientifiques ont observé il y a dix ans. La saison dernière, seulement 11 petits sont nés. C’est moins que les deux années précédentes: 18 en 2021 et 15 en 2022.

En conséquence, la baleine noire de l’Atlantique Nord reste l’une des espèces de grandes baleines les plus menacées au monde.

«Nous continuons à blesser et à tuer ces baleines à un rythme alarmant, de telle sorte qu’elles ne peuvent plus remplir leurs fonctions biologiques de base comme la croissance et la reproduction», a souligné le président du consortium, Scott Kraus, dans un communiqué. 

«Même si les chiffres absolus de la population sont importants, d’autres indicateurs sont décourageants.»

Adaptation de l’industrie de la pêche

M. Hamilton fera partie des près de 500 délégués réunis à Halifax cette semaine pour la réunion annuelle du consortium, qui rassemblera des participants en personne et virtuels du monde entier. Les efforts visant à protéger les baleines figureront en bonne place dans l’ordre du jour des chercheurs, des représentants de l’industrie de la pêche et des défenseurs de l’environnement.

Entre autres choses, il y aura de nombreuses discussions sur les limitations de vitesse des navires et sur la nécessité de persuader l’industrie de la pêche de passer aux engins sans corde ou «à la demande».

Alors que les casiers à homards et à crabes traditionnels sont largués au fond de l’océan puis récupérés en tirant de longues cordes suspendues à des bouées, les engins sans corde n’utilisent pas des lignes ou des bouées. Les pièges sont trouvés à l’aide d’un dispositif de guidage électronique – une sorte de bouée virtuelle – et ils sont récupérés à l’aide de bobines de corde gonflées à distance ou de sacs de levage.

L’élimination des engins flottants pourrait réduire considérablement le risque d’empêtrement, qui représentait 82 % des décès documentés de baleines noires l’année dernière, selon l’Institut océanographique de Woods Hole à Falmouth, au Massachusetts.

«J’y ai mis beaucoup d’espoir, a affirmé M. Hamilton. Cela semble être une solution, même si la transition sera très difficile.»

L’industrie de la pêche a besoin d’un soutien financier et technologique, et des changements législatifs sont nécessaires pour faire avancer les choses, a-t-il déclaré.

«Le Canada fait beaucoup et j’applaudis cela. Mais malgré tous ces efforts, de nombreuses baleines se retrouvent empêtrées dans les eaux canadiennes.»

On pense que la population de baleines noires a culminé à environ 21 000 individus dans l’Atlantique Nord avant que la chasse ne fasse presque disparaître l’espèce dans les années 1920. Après l’interdiction de la chasse imposée en 1935, la population est passée à 483 en 2010, puis a entamé un nouveau déclin.

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