Hubert Reeves nous a quittés

Par Jean-Baptiste Levêque 11:23 AM - 13 octobre 2023
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Hubert Reeves en mars 2023. Photo Pierre Kitmacher

L’astrophysicien et vulgarisateur scientifique Hubert Reeves est décédé ce vendredi 13 octobre à l’âge de 91 ans.

« Toute ma famille se joint à moi dans la douleur de devoir vous annoncer que notre cher père est parti rejoindre les étoiles ce jour vendredi 13 octobre 2023 », a annoncé son fils, Benoit Reeves, sur les réseaux sociaux.

L’Espace Hubert-Reeves, un projet de musée interactif sur les sciences de l’environnement, l’astronomie et la géologie dédié à l’homme de sciences, est en développement depuis de nombreuses années pour prendre place à La Malbaie.

Le projet est mené par l’Observatoire de la géosphère de Charlevoix. Le président du c.a., François Tremblay, considère que « c’est l’humanité qui perd un de ses grands citoyens et ça nous donne encore plus de raisons de lui rendre hommage avec le projet d’espace ».

Si les astres s’alignent, l’Espace Hubert Reeves devrait voir le jour en 2025.

Les hommages envers le défunt ont afflué sur les réseaux sociaux. 

«Le Québec perd aujourd’hui un vulgarisateur hors pair, un astrophysicien de renom. Hubert Reeves a su trouver les mots pour nous faire comprendre l’humanité et l’infini. Il repart aujourd’hui comme il est venu, en poussière d’étoiles», a déclaré le premier ministre du Québec, François Legault.

«Il aura été un phare pour l’humanité. Il restera une étoile au firmament des grands de ce monde, un sage et un grand Québécois», a renchéri le député péquiste Joël Arseneau.

«Passionné et engagé dans plusieurs causes, il a marqué le Québec, la communauté scientifique et plusieurs d’entre nous», a ajouté le chef libéral Marc Tanguay.

Passionné par la beauté de l’univers, ce scientifique a participé au développement de la théorie sur l’origine du lithium, du béryllium et du bore et étudié les réactions thermonucléaires au coeur des étoiles.

Au cours de sa longue carrière au Québec, aux États-Unis et en Europe, il a été maintes fois récompensé, notamment par les prix Albert Einstein et Samuel de Champlain. Compagnon de l’Ordre du Canada, officier de l’Ordre national du Québec et détenteur de huit doctorats honorifiques, Hubert Reeves est reconnu comme l’un des plus grands astrophysiciens de sa génération. Il est l’auteur d’une quarantaine de livres et de centaines de publications dans des revues spécialisées.

Voulant partager son émerveillement avec tous, il a créé plusieurs spectacles et rédigé de nombreux ouvrages de vulgarisation scientifique, dont «Patience dans l’azur» et «Poussière d’étoile». Un concours canadien annuel du meilleur livre de vulgarisation scientifique porte son nom.

Une vie de curiosité et de découvertes

Né le 13 juillet 1932 à Montréal, Hubert Reeves s’est passionné pour la science dès son plus jeune âge, alors qu’il dévorait d’abord «L’Encyclopédie de la jeunesse»puis des vieux manuels scolaires trouvés dans son grenier, son «trésor inestimable de livres écornés».

Professeur à l’Université de Montréal lors de la Révolution tranquille, il a été déçu par le nationalisme qui imprégnait la communauté scientifique québécoise. Lorsque ses collègues ont abandonné un projet d’accélérateur de particules en collaboration avec l’Université McGill, par refus de devoir parler en anglais dans le laboratoire, en 1964, le Pr Reeves a accepté une offre d’enseignement en Belgique.

L’année suivante, il a rejoint une équipe de recherche française, avec laquelle il aura réussi à évaluer «l’abondance de l’hydrogène lourd avant la formation des premières étoiles», ce qu’il qualifie dans ses mémoires de l’«une des meilleures preuves» de l’existence du Big Bang.

Entre Terre et étoiles

Farouche défenseur de l’environnement, il est devenu, en 2001, le président de l’organisme militant Humanité et Biodiversité, dont il est demeuré président d’honneur jusqu’à sa mort.

L’astronomie et l’écologie étaient pour lui «deux volets d’un même thème», celui de «notre existence». «L’astronomie, en nous racontant l’histoire de l’Univers, nous dit d’où nous venons, comment nous en sommes venus à être ici aujourd’hui. L’écologie, en nous faisant prendre conscience des menaces qui pèsent sur notre avenir, a pour but de nous dire comment y rester», a-t-il écrit.

Son amour pour la nature était bien vivant dans son attachement à sa résidence du village français de Malicorne, lieu de nombreuses promenades campagnardes.

L’art était une autre de ses passions, une manière différente d’«accéder à la richesse et à la beauté de l’Univers». Féru de musique, il a même joué le rôle de récitant dans de nombreuses productions d’orchestre.

«Graceful exit»

Confronté à sa propre mortalité, un profond regret d’Hubert Reeves était de n’avoir bientôt «plus accès à la poursuite de cette fascinante exploration du cosmos» dont il a été un grand participant.

Son souhait était d’avoir une «graceful exit», une sortie gracieuse, à la manière des ballerines qui quittent la scène tout en douceur.

Avec La Presse Canadienne

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