Don d’organes: Greffée du rein, Annie Desgagnés raconte…

Par Emelie Bernier 7:00 AM - 24 avril 2019
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Annie Desgagnés vit sa 2e vie comme sa première: à fond la caisse!

UNE RENCONTRE UNIQUE

J’avais 28 ans et toi 42 quand on s’est rencontrés.
Tu venais de terminer ton chemin avec celle qui t’avais offert ta première chance. Moi, j’étais perdue , abandonnée par le mien. Ça faisait plus de 10 ans que durait cette longue agonie qui s’est terminée en me faisant larguer… comme ça, sans plus d’explication.

Incertaine de la suite, un soir de mars il y a maintenant 17 ans, je reçois un appel d’une gentille personne qui souhaitait nous présenter.

Un blind date toé en ce beau samedi soir! J’étais pas maquillée, habillée en mou, les cheveux à l’époque bleus en bataille après mes 15 km de ski de fond et un teint blafard,  mais je n’avais qu’une envie. Cette envie indescriptible de te rencontrer, de te connaître!

Alors j’ai dis “ oui, je le veux” quand elle m’a demandé si j’acceptais cette incroyable invitation!! Folle de même!

C’est drôle hein, je t’espérais tellement et à la place de faire la fête, une grande paix s’installa en moi. Je suis allée vers toi sereine et fébrile avec des frissons tous le corps, la sensation de sentir des moutons de vague qui dansent comme sur le fleuve autour de mon isle.

J’étais convaincue qu’on allait bien s’entendre dès la première seconde, le premier contact , le premier toucher. Tu t’es installé à mes pieds la première fois, comme pour me dire “ je marche maintenant avec toi, n’aie plus peur”.

On est parti ensemble , comme ça vers cette grande salle froide et lumineuse. Je me souviens d’absolument tout. Tout ce qu’il y avait dans cet endroit. L’odeur, les gens autour de nous et surtout, surtout la lumière. Cette lumière blanche, brillante, aseptisée, enveloppante malgré tout mais GOD que c’était lumineux. J’esquisse un large sourire à la personne qui se penche au dessus de ma tête, je regarder la grosse horloge au dessus de son épaule et comme par enchantement, je me laisse aller à notre douce et ô combien attendue union.

Je me souviens de chaque détail des jours qui ont suivis. Je me souviens de chaque visage. Chaque cadeau. Chaque mot. Chaque soupir de soulagement et les rires et larmes de bonheur que tous mes proches et amis m’ont donnés. Sincèrement avec le cœur.

Depuis qu’on est ensemble, je ne vois plus les choses de la même façon. Je ne laisse plus les choses importantes me glisser entre les mains. Je m’éloigne des récifs que je peux éviter. Je garde le cap. Sourire au cœur.

Toutes ces années ont passées si vite !! Comme par magie ! Et on sait tous les deux que de la magie, il en faut pour avancer. La magie c’est croire qu’on peut. Croire que sa bataille peut être parfois douce et des fois rugueuse dans les coins. Mais au centre il y a toujours, depuis toujours, l’espoir. L’espoir de croire que vivre est un privilège, un bonheur qu’il faut chérir et en profiter chaque seconde.

Mais il ne faut pas que ça. On a une équipe incroyable autour de nous. Qui veille à ce qu’on fasse encore une longue, très longue route pleine de beau, de fabuleux et de merveilleux… tous les 2.

Croire fort nous a aidé à passer au travers. Croire grand, rêver géant.

Je vais dévoiler un doux passage de notre relation …. Il y a 2 ans, pour célébrer nos 15 ans, tu as comme senti le désir de sortir de mon cocon. Ou c’est mon corps qui en avait assez puisqu’il a développé une armée prête à t’attaquer pour nous séparer. Mon corps a voulu te rejeter en entier. Un rejet. C’est comme ça qu’ils appellent ça à l’hôpital. Un rejet. On a pas sauver tous les meubles mais on a gardé les 2 mains ( souvent une seule!) sur le gouvernail pour garder le cap.

Après il y a eu le méchant virus l’été dernier! Ouin … on a rasé le sol encore plus bas cette fois-ci. Mais tu sais quoi, on est remonté non sans peine sur notre monture et on a réussis à maintenir le cap contre toute attente. Maintenant, je sais que la tempête des 2 dernières années est derrière nous. On ne peut garantir de rien mais pour vrai, toi et le reste de mon corps ne vous avisez plus de me mettre au défi comme ça. C’est beau, j’ai compris!

15 ans, c’était peut être ta crise d’adolescence qui sait? On a maintenant 17 ans, c’est différent.

Ouf… la route est parsemée de défis et l’est encore des fois mais je reste confiante et forte . On ira encore très loin ensemble crois-moi.

Je suis toujours émue, chaque jour devant le miracle de la vie. Je choisi de garder sur ma route le doux, le simple, l’exaltant, le merveilleux, le vrai, le fabuleux et le lumineux.

C’était notre anniversaire hier petit rein. On fête ma fête de greffe chaque année. Ben oui avec un gâteau, des chandelles pis des fois des ballons pis toute !!! Ça se souligne une 2e chance de vivre ! J’ai 2 fêtes, yé!!

17 ans que tu vis dans mon ventre grâce à cette douce personne qui a signé sa carte de don d’organes et qui en a informé sa famille. Cette personne qui en a sauvé 5 autres dont moi. Où qu’elle soit maintenant, elle peut être fière de ce que tu me procure comme bonheur. Mon coup de départ de mai dernier, je l’ai fait pour elle. Sur son vert de départ, j’ai Swigner un grand coup, dans l’allée … un peu à droite mais une belle claque et j’ai senti un rayon de soleil plus chaud que les autres me caresser la joue. J’ai senti , j’ai souri , merci la vie.

Chaque 24 mars que la vie amène depuis, sous la douce lumière du printemps, la vie me rappelle que tout est possible encore et toujours.

Sentir sa vie en gage et y déposer ses espoirs, j’y joue chaque instant depuis et je chéri le bonheur d’être unique et ici.

Merci de signer votre carte pour le don d’organes et d’en parler à votre famille.

Merci de passer à votre tour, le relais une fois la lumière éteinte.

Merci de redonner la vie.

Annie, greffée du rein
24 mars 2002

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