Ma Société-L’homme est un loup pour la femme (et la femme parfois une louve pour elle-même) Partie II

Par Emelie Bernier 7:17 AM - 30 octobre 2016
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Dimanche soir. Un gala. Des femmes bien sapées, avec de la dentelle, du satin, des talons hauts. Des lèvres beurrées de rouge ou de rose, des cils longs comme des moustaches de chat, les boutons et imperfections dissimulés sous une couche de fard couleur peau. De la peau nue sous les projecteurs. Ici un dos, là un décolleté. Des femmes qui jouent le jeu. Qui sont belles parce que c’est ainsi qu’il faut être, parce que ça leur tente aussi sans doute de jouer le jeu. Sauf une. Safia Nolin. La repousse en cavale, les t-shirts à l’effigie de Gerry Boulet et de Céline rentrés tour a tour dans un jean confo et recouvert d’un cardigan informe, le corps hors norme tout court. Un langage familier, cru même. On croirait entendre une Leloup au féminin, une poète qui s’en « crisse» du décorum, mais qui dit ce qu’elle a à dire. J’applaudis. Enfin une qui se soustrait à l’obligation tacite d’être poupoune et de bien « perler » durant les quelques secondes qui lui sont allouées pour remercier la planète d’avoir fait d’elle ce qu’elle est. Juste du pur, du brut. Bref et touchant. Une force tranquille malgré les tempêtes, les angoisses, la pauvreté financière dans lequel la Safia a baigné, a failli se noyer. Mais ça, le monde ne l’a pas vu, ni entendu. Il l’a trouvée vulgaire, Safia, le monde. Il l’a trouvé bâclée pis pas fine fine. Parce que c’est une fille, une artiste, un modèle et que tout ça impose d’être coquette, soyeuse, polie. Poupoune.
Jamais on ne va dire d’un artiste qu’il est habillé comme la chienne à Jacques. Pierre Lapointe se déguise en clown, Jean Leloup n’a pas repassé sa chemise? Pas grave! Le troupeau aurait même sans doute applaudi collectivement un discours semblable à celui de Safia s’il avait été prononcé par un gars. Avec quelques sacres bien sentis, une gouaille de fin de party, pas un iota de bienséance.
Mais venant d’une fille, ça passe pas. Venant d’une fille ronde habillée pour une soirée au bord du feu au chalet? Encore moins. Ça, ça bouleverse les convenances. Ça choque. Ça ouvre la porte à toutes sortes de choses, la méchanceté en tête.
Safia Nolin a mangé un char de m… sur les réseaux sociaux. Les gens (étonnamment beaucoup de femmes d’ailleurs) sont entrés chez elle avec leurs bottes pleines de bouette. Ils, elles n’ont pas pris la peine de cogner. Ils, elles sont allés écrire sur son mur leur mépris cave.
Et elle a eu la plus belle réaction qui soit. «Hier, c’était comme un beau grand rêve qui finissait pu. ❤️
Le PLUS beau cadeau, Andréanne pis Phil qui me donnent le Félix de révélation. Jouer avec mes merveilleuses amies, rencontrer la reine du monde, Céline. ÊTRE MOI-MÊME, SAFIA. » (Lu en cours de redaction de cette chronique: elle a même pris le temps de répondre aux trolls pas drôles sur la plateforme d’Urbania. Du pur, du brut, du Safia. http://urbania.ca/236261/salut-les-gens/)
Heureusement, il y a les autres. Ceux qui ont décidé d’aller écouter ses « tounes », ceux qui ne se sont pas butés sur son image et son discours de petite gamine sauvageonne délicieusement spontanée.
Ceux qui ont écrit sur son mur des trucs gentils et « crissement » vrais comme ce commentaire de Julie Artacho : « Moi je pense à tous les jeunes qui se sentent outsiders et qui se font intimidés et qui rushent dans leurs vies, de voir une fille comme Safia réussir en étant elle, en étant singulière et en se foutant des standards que l’on essaie de nous imposer, c’est un foutu beau modèle. » Bien d’accord.
Je voulais écrire sur les femmes. J’avais pris plein de notes sur la misogynie, sur les combats qu’on a encore à mener. Pis finalement, c’est un peu ça.
Un conseil en terminant : écoutez Limoilou. Mieux encore, achetez le « record ». Pis allez voir le splendide vidéo de Noël partout. C’est pas parce qu’on n’est pas poupoune qu’on n’est pas « crissement hot », kapitch?
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Tous les coups bas sont permis
À quelques jours de l’élection présidentielle américaine, tous les coups bas sont permis. On a éludé la grossièreté chronique et la connerie abyssale de Trump par un rebondissement presque trop opportun pour être vrai dans l’histoire des courriels de Clinton. On ne lave plus le linge sale, on se le garroche en pleine face comme une patate chaude et le candidat qui perdra l’élection sera celui ou celle qui se retrouvera sous le plus gros tas le 8 novembre.

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