Les oiseaux se cachent-ils vraiment pour mourir ?
Vers la fin des années ’70, le roman à succès de Colleen McCullogh avait grandement attiré mon attention à cause de son titre. C’était bien avant l’Internet, je n’avais pas d’information autre que le titre… Une visite rapide chez la libraire et je repartais avec le livre. Je fus déçu. Bien qu’intéressant, le titre du roman n’était qu’une métaphore et ne répondait pas du tout à la question de l’ornithologue en moi (c’est tout de même une lecture très recommandée, encore aujourd’hui…).
En faisant récemment le ménage de ma bibliothèque, je suis tombé sur ce vieux roman, assez jaunit. Je me suis reposé la question qui m’avait incité à acheter ce livre il y a près de 50 ans.

Chaque année, ce sont des milliards d’oiseaux qui meurent un peu partout sur la planète. Les collisions avec les édifices (1 milliard de décès mondialement, 16 millions au Canada) et la prédation effectuée par les chats (entre 2 et 4 milliards de décès) constituent deux causes que l’on peut constater facilement. À Toronto, lors des périodes de migration printanières, on ramasse au petit matin, au pied des grands édifices éclairés, des centaines de cadavres d’oiseaux qui furent attirés par les lumières des édifices après leur traversée nocturne du lac Ontario. Et les chats, assez fiers d’eux-mêmes, se plaisent à venir déposer à nos pieds leurs proies capturées.

Mais cela ne constitue qu’une partie des oiseaux qui décèdent. Où se trouvent les milliards d’autres? Il est très rare de découvrir un cadavre d’oiseau sur un terrain, dans un parc, dans la forêt.
C’est ce qui a un peu alimenté la croyance que les oiseaux se cachaient toujours pour mourir.
La réalité est plus banale. Les oiseaux sont nombreux, environ 50 milliards sur la terre, et ils vivent en moyenne de 10 à 15 ans, bien que certaines espèces puissent vivre beaucoup plus longtemps, jusqu’à centenaire pour l’albatros. Lorsqu’un oiseau est malade, faible, blessé, ou simplement en fin de vie, il cherche à survivre, à se reposer, à reprendre des forces. Pour cela il cherche un abri qui le protègera des intempéries et des prédateurs. Le plus souvent il s’agira d’un buisson dense, ou sous les branches d’un conifère dans nos latitudes. Il ne fait pas de bruit pour ne pas attirer les prédateurs. Mais ce répit pour se refaire une santé fonctionne rarement. Faute de s’alimenter et de s’abreuver, il s’affaiblit rapidement et meurt souvent la nuit alors que le froid s’installe.

Étant près du sol, le cadavre de l’oiseau se décompose assez rapidement. Évidemment les conditions atmosphériques jouent un rôle important. Un temps chaud et humide fera disparaitre la carcasse en moins de 2 semaines. Les insectes, bactéries et champignons ont vite fait de consommer tous les tissus. Le squelette prendra plus de temps, parfois plusieurs semaines, selon la taille de l’oiseau. Dans les grands déserts où règne une chaleur intense, les cadavres d’oiseaux morts ont tendance à s’assécher complètement, voire se momifier. Ils peuvent se préserver ainsi pendant des mois. Dans les forêts amazoniennes, il suffit de quelques jours pour que toute trace ait disparu.
Ce sont les plumes qui sont les plus résistantes. Surtout composées de kératine, comme vos cheveux, il s’agit d’une protéine qui est très résistante et qui prend du temps à être dégradée par les micro-organismes. Il n’est donc pas rare de découvrir des plumes en forêt, au sol, qui appartenaient à un oiseau mort il y a plusieurs mois. Plus l’oiseau est de grande taille, plus les plumes prendront du temps à se dégrader complètement.

Ici au Québec et dans Charlevoix, c’est vers la fin de l’hiver que le randonneur a le plus de chance de trouver les vestiges des oiseaux décédés. Le froid et la neige retardent beaucoup la décomposition pendant la saison froide. Lorsque la neige commence à fondre, regardez au pied des haies, buissons, sous les branches des grands conifères. Vous serez étonnés, et surtout vous vous demanderez pourquoi vous n’avez jamais remarqué ces oiseaux morts par le passé. Cette période qui permet de découvrir ou nos amis ont vécu leur dernier souffle ne dure pas longtemps. Fonte des neiges signifie humidité et dégradation rapide. Les cadavres conservés, dès que la neige se met à fondre, permettent aussi aux petits animaux de se nourrir.
Il s’agit du cycle normal de la nature. Tout cela se déroule sous nos yeux, il suffit de prêter un peu attention.
Bonnes observations.
Michel Paul Côté
oiseauxcharlevoix@gmail.com
Horizon
Horizon, des contenus marketing présentés par et pour nos annonceurs.