L’itinérance est « réelle, croissante et souvent invisible » dans Charlevoix

Par Jean-François Dufour 4:50 AM - 12 juin 2025
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Une minimaison a été construite à la fin de l'année dernière pour accueillir des ménages en transition. Elle se situe au carrefour du boulevard Raymond-Mailloux et de la rue Tremblay, à Baie-Saint-Paul.

On pourrait croire que l’itinérance et l’instabilité résidentielle affectent uniquement les grands centres urbains, mais il ne faut pas se leurrer. À la lumière des informations et des données fournies par le CIUSSS de la Capitale-Nationale, force est d’admettre que la région de Charlevoix n’échappe pas du tout à ces problématiques.

« L’itinérance dans Charlevoix est réelle, croissante et souvent invisible », explique Francis Peuch, organisateur communautaire pour le secteur Charlevoix au CIUSSS de la Capitale-Nationale et coordonnateur du Comité Itinérance-Instabilité résidentielle Charlevoix (CIIRC).

Selon lui, cette réalité se manifeste sous différentes formes, comme des situations de rue, de l’hébergement temporaire ou chez un proche, de l’instabilité résidentielle ou des résidences non adaptées.

Des chiffres à l’appui

Bien qu’il soit difficile de déterminer le nombre exact de personnes en situation d’itinérance dans la région, le coordonnateur du CIIRC avance que « plus de 350 interventions ont été effectuées […] auprès de personnes ou de ménages – souvent composés d’enfants – en situation d’itinérance ou d’instabilité résidentielle », et ce depuis janvier 2024. On parle ici de quatre et cinq interventions par semaine dans le grand Charlevoix.

M. Peuch ajoute également que dans les trois derniers mois, 33 personnes ont dû se tourner vers le programme fédéral Vers un chez-soi (VCS) sur le territoire de Charlevoix « car elles se trouvaient en situation d’itinérance ou à grand risque de le devenir ». Comme quoi l’itinérance est loin d’être un mythe dans notre région.

Une situation qui perdure depuis plusieurs années

Selon l’organisateur communautaire, l’itinérance fait partie du portrait depuis 2017 ou 2018 dans Charlevoix. La situation s’est toutefois détériorée de manière importante à la suite de la pandémie de COVID-19.

Une panoplie de facteurs peuvent expliquer cette détérioration, précise Francis Peuch. Il cite à titre d’exemples la crise du logement, la pauvreté structurelle causée par des revenus insuffisants ou par l’absence de mesures rehaussant le niveau de vie des plus démunis, les ruptures familiales, la violence conjugale, ou encore le manque de solutions transitoires ou de logements supervisés.

Des causes centrales

La rareté des logements et la hausse du coût de ces derniers constituent les deux causes principales de cette recrudescence pour M. Peuch.

Il soutient d’ailleurs que le taux d’inoccupation, qui se situerait sous les 1 % dans les secteurs de Baie-Saint-Paul et de La Malbaie, « freine fortement les personnes avec une situation précaire de se trouver un toit ».

À cela s’ajoute la hausse fulgurante des coûts des loyers, qui, d’après les données fournies par le coordonnateur du CIIRC, ont connu une hausse allant de 20 % à 40 % entre 2020 et 2024. Et c’est sans compter le fait qu’environ 4 % du parc locatif a été ou est en voie d’être converti en locations de type Airbnb.

Si l’on considère le fait que « le peu de logements abordables disponibles sont souvent inadéquats (insalubres, mal isolés, trop petits ou trop éloignés) », on se retrouve pratiquement dans une tempête parfaite.

En mode solution

Heureusement, Francis Peuch souligne que plusieurs actions sont menées depuis janvier 2024 afin de lutter contre l’itinérance et l’instabilité résidentielle dans Charlevoix, ce qui témoigne de la « très grande mobilisation régionale autour de cet enjeu ».  

C’est d’ailleurs à ce moment que le Comité Itinérance-Instabilité résidentielle Charlevoix  (CIIRC) a été mis sur pied afin d’établir une concertation en lien avec cet enjeu grandissant. Ce comité regroupe autour d’une même table une trentaine de partenaires régionaux qui touchent de près ou de loin à la question de l’itinérance.

De plus, M. Peuch mentionne qu’avec le temps, « certains organismes communautaires ont […] élargi leur mission sociale pour inclure la lutte à l’itinérance et l’instabilité résidentielle dans leur mandat ». Qui plus est, « des intervenants dédiés (2) sont maintenant présents sur le territoire pour venir renforcer le soutien précis dont cette clientèle a grandement besoin » grâce à différents programmes gouvernementaux.

Concrètement, le programme fédéral Vers un chez-soi et le Plan d’action interministériel en itinérance, qui est géré par Québec, soutiennent plusieurs initiatives ayant actuellement cours sur le territoire de Charlevoix.

D’autre part, Centr’hommes Charlevoix, Vision d’espoir et l’Éveil charlevoisien « bonifieront leurs services spécifiques pour cette clientèle, grâce au financement reçu lors des derniers appels de projets publics », déclare l’organisateur communautaire.  

Mentionnons finalement que plusieurs partenaires du CIIRC redoublent de vigilance à l’approche du 1er juillet, « un moment charnière où des ménages perdent leur logement ».

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