Projet de loi 106: les médecins confrontent Dubé en commission parlementaire

Par Caroline Plante, La Presse Canadienne 2:30 PM - 27 mai 2025
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Le ministre de la Santé, Christian Dubé, en commission parlementaire lors de l'étude du projet de loi 106, le 27 mai 2025. La PRESSE CANADIENNE/Jacques Boissinot

Plusieurs médecins se sont déplacés jusqu’à Québec, mardi, pour confronter le ministre de la Santé, Christian Dubé, sur son projet de loi 106 visant à lier jusqu’à 25 % de leur rémunération à des indicateurs de performance.

« Je suis inquiète pour mes patients, a déclaré la Dre Pascale Breault. S’il faut que je double le nombre de patients que je vois demain matin, (…) ça conduit à une médecine de mauvaise qualité. (…) On s’en va vers une médecine “fast-food”. »

Alors que s’amorçaient les consultations sur le projet de loi 106, le ministre Dubé a réitéré son objectif que 100 % des Québécois soient pris en charge par un milieu de soin d’ici l’été 2026.

Or, « ça prend un engagement mutuel », a répondu le Dr Benoit Heppell, qui accompagnait mardi la Dre Breault, la Dre Isabelle Gaston et le président de la Fédération des médecins omnipraticiens (FMOQ), le Dr Marc-André Amyot.

« Je peux faire différent, comme le ministre le nomme, mais il va falloir un engagement que la première ligne, on veut y mettre des ressources », a souligné Dr Heppell.

Le médecin de famille a calculé qu’il pourrait offrir 650 rendez-vous de plus par année à des patients orphelins si seulement il avait accès à plus d’infirmières, de travailleuses sociales, de psychologues, etc. 

« Malheureusement, en première ligne et dans les groupes de médecine de famille, l’accès à ces professionnels-là est insuffisant », a-t-il déploré. Le Dr Heppell a également tenu à informer M. Dubé qu’il passait un mois par année à « remplir de la paperasse ».

De son côté, la Dre Gaston a fait valoir que les médecins ne pouvaient pas tous travailler à plein régime. « On insinue qu’on est paresseux. (…) Vous savez, des fois, on ne choisit pas ses épreuves, a-t-elle dit. Moi, je vois des humains qui font leur possible. »

« Il nous manque deux infirmières, une ergo. (…) Notre CLSC ferme ses portes le week-end. (…) Elle est où la responsabilité, puis l’imputabilité du gouvernement dans l’accès à la première ligne? » a lancé la Dre Breault au ministre de la Santé.

« Que vous brassiez vos médecins, c’est déjà ordinaire, mais moi je ne commencerai pas à brasser mes patients pour contenter votre bilan », a-t-elle renchéri.

La FMOQ, tout comme la Fédération des médecins spécialistes (FMSQ), soutient que le projet de loi 106 sape le moral des médecins, ce qui risque de provoquer leur exode. D’ailleurs, 22 % des omnipraticiens ont plus de 60 ans, a-t-on souligné.

Le président de la FMSQ, le Dr Vincent Oliva, a lui aussi ramené le gouvernement à ses responsabilités. 

« On parle de performance: pourquoi les blocs opératoires ne roulent-ils pas à pleine capacité? Pourquoi y aura-t-il une seule salle d’opération ouverte cet été pour tout l’Outaouais? », a-t-il demandé au ministre.

À ses côtés, l’hémato-oncologue Gabrielle Gagnon a dénoncé les conditions de travail dans certains hôpitaux, où les patients doivent se servir d’une clochette en attendant la réparation du système de témoins lumineux.

Le projet de loi 106 a été déposé le 8 mai dernier en pleine négociation pour renouveler l’accord-cadre avec les deux fédérations médicales. M. Dubé n’a pas exclu d’adopter la pièce législative sous bâillon.

« Le gouvernement (…) a complètement détourné le débat dans les deux dernières semaines de la session parlementaire », a dénoncé pour sa part le député libéral André Fortin. 

« On n’est pas en train de parler du bilan du gouvernement, (…) des hôpitaux qui ne se construisent pas. On est en train de parler d’une guerre ouverte entre le gouvernement et les médecins », a-t-il ajouté.

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