La commissaire à l’éthique enquête sur Andrée Laforest, qui restera en poste

Par Patrice Bergeron, La Presse Canadienne 5:28 PM - 22 mai 2025
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La ministre des Affaires municipales du Québec, Andrée Laforest, répond à l'opposition lors de la période des questions, le jeudi 20 avril 2023, à l'Assemblée nationale du Québec. LA PRESSE CANADIENNE/Jacques Boissinot

La commissaire à l’éthique et à la déontologie de l’Assemblée nationale a ouvert jeudi une enquête sur la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest.

La porte-parole de la commissaire, Anne-Sophie St-Gelais, a confirmé que la commissaire analyse la demande de l’opposition officielle sur un conflit d’intérêts potentiel de la ministre. 

Pas plus tard que jeudi matin, le premier ministre François Legault a réitéré sa confiance en sa ministre.

Un porte-parole du gouvernement a confirmé jeudi après-midi que la ministre allait rester en poste pour la durée de l’enquête.

« On vérifie s’il y a des motifs raisonnables de croire qu’il y a eu des manquements au Code d’éthique », a affirmé Anne-Sophie St-Gelais dans une entrevue avec La Presse Canadienne jeudi après-midi. 

Dans sa demande d’enquête transmise mercredi, le député libéral Monsef Derraji soutient que la ministre a violé le Code d’éthique des élus dans une affaire impliquant la garderie de ses deux filles. 

Un citoyen aurait ainsi dénoncé une pratique de facturation impliquant une fausse déclaration, une pratique illégale qu’on appelle les « places fantômes », et la ministre et députée de Chicoutimi aurait alors défendu l’établissement de ses filles.

« Il est question de violation de la Loi sur la protection du consommateur et d’incitation à commettre une fausse déclaration pour obtenir un crédit d’impôt alors que leur enfant n’occupait pas encore une place au sein de ce service de garde », a écrit M. Derraji.

« Un citoyen raisonnablement informé pourrait être porté à croire que la ministre aurait agi, tenté d’agir ou omis d’agir de façon à favoriser les intérêts personnels de membres de sa famille. »

Dans la lettre en réponse à cette demande, la commissaire Ariane Mignolet indique qu’elle « cherchera à établir si (…) la Ministre a commis un manquement au premier paragraphe de l’article 16 du Code, qui interdit à un député d’agir, de tenter d’agir ou d’omettre d’agir de façon à favoriser ses intérêts personnels, ceux d’un membre de sa famille immédiate ou ceux d’un de ses enfants non à charge ou, d’une manière abusive, ceux de toute autre personne ».

M. Derraji soupçonnait aussi la ministre de contrevenir à la disposition du Code selon laquelle elle devait aviser la commissaire dans les 60 jours si elle était placée en conflit d’intérêts, mais Mme Mignolet a fait savoir qu’elle n’allait pas enquêter sur cet enjeu.

Legault fait encore confiance à Laforest

Après avoir passé son tour mercredi, le premier ministre François Legault a finalement réitéré sa confiance jeudi matin envers Mme Laforest.

À la période de questions, le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a fait remarquer que la veille, le premier ministre avait refusé de se lever en Chambre pour défendre sa ministre. 

En effet, c’était le leader parlementaire du gouvernement, Simon Jolin-Barrette, qui avait répondu qu’une enquête était en cours à l’Office de protection du consommateur (OPC).

Le chef du PQ est donc revenu à la charge jeudi: « est-ce que le premier ministre peut aujourd’hui se lever en Chambre et réitérer sa confiance envers sa ministre des Affaires municipales? »

« J’ai toujours entièrement confiance en la ministre des Affaires municipales », a alors répondu M. Legault.

Mais par la suite, le climat s’est rapidement envenimé au Salon rouge entre le PQ et la CAQ. 

M. St-Pierre Plamondon a reproché aux caquistes d’avoir rejeté leur motion sur « le caractère illégal des places fantômes en garderie » et a demandé à ce que le gouvernement reconnaisse que la ministre « s’est placée en position de conflit d’intérêts ».

M. Jolin-Barrette l’a alors accusé de « salir un membre de cette Chambre » et « d’attaquer » la famille d’une collègue députée et ses enfants. Il a répété que l’OPC allait faire son enquête. 

Rappelons qu’à l’origine, c’est Radio-Canada qui rapportait mercredi le cas de ce couple de parents de Saguenay qui souhaitait avoir une place dans une garderie privée, l’Académie des Mini-Amours, administrée par les filles de Mme Laforest, Raphaëlle Laforest-Allard et Andréanne Laforest-Allard, un établissement dont la ministre a été propriétaire jusqu’en 2019.

Les parents souhaitaient inscrire leur garçon à compter de février 2025. Mais Andréanne Laforest-Allard aurait demandé aux parents de payer rétroactivement la place à partir de septembre, soit 6300 $, de septembre à février, pour pouvoir ensuite réclamer le crédit d’impôt du gouvernement. 

Le père, Maxime Simard, s’est plaint à l’OPC, puis il a voulu dénoncer la situation à sa députée, Mme Laforest, et ils se sont parlé au téléphone. 

En mêlée de presse mercredi matin, la ministre a affirmé qu’elle avait réitéré plusieurs fois au citoyen qu’elle était en conflit d’intérêts et ne pouvait pas se mêler du dossier, qu’elle dit avoir transféré à un employé de sa circonscription.

En réponse aux journalistes mercredi, elle a assuré qu’elle n’avait pas facturé de « places fantômes » quand elle était propriétaire, mais elle a aussi défendu ses filles en disant qu’elles non plus ne s’étaient pas livrées à ce stratagème.

En entrevue à Cogeco mercredi matin, Raphaëlle Laforest-Allard a soutenu que ce sont les parents qui voulaient payer pour une place à l’avance et qu’il y a eu un malentendu avec sa soeur Andréanne.

La ministre de la Famille, Suzanne Roy, a confirmé que demander à des parents de payer pour une « place fantôme » est illégal et a indiqué que les parents avaient la possibilité de porter plainte.

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