Santé Québec met dehors son vice-président Frédéric Abergel

Par Katrine Desautels et Thomas Laberge, La Presse Canadienne 2:22 PM - 3 mars 2025
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Frédéric Abergel, vice-président exécutif des opérations et de la transformation de Sainte-Québec, fait le point sur l'engorgement des urgences de Montréal, à Montréal, le vendredi 10 janvier 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Christinne Muschi

Moins d’un an après sa nomination, le vice-président exécutif aux opérations et à la transformation chez Santé Québec, Frédéric Abergel, a été remercié de ses fonctions au sein de la société d’État chargée de redresser le réseau de la santé. 

La présidente et cheffe de la direction de Santé Québec, Geneviève Biron, en a fait l’annonce lundi. Dans une déclaration écrite, Mme Biron a remercié M. Abergel pour sa contribution au lancement de Santé Québec, qui est officiellement entré en fonction le 1er décembre 2024. 

« Après quelques mois de fonctionnement, j’ai fait certains constats qui m’amènent à apporter des changements au sein de l’équipe exécutive afin de la rapprocher encore davantage du terrain. Je commence dès maintenant l’analyse de candidatures de personnes pouvant mettre leur connaissance du réseau et leurs compétences au service de la population. D’ici à ce que les changements soient annoncés, je superviserai directement les équipes concernées », a déclaré Mme Biron. 

Le conseil d’administration de Santé Québec a entériné la décision.

En entrevue sur le réseau LCN, le premier ministre François Legault a fait une comparaison avec la crise de SAAQclic, rappelant qu’il avait remplacé le président de la SAAQ après avoir pris connaissance des déboires. « Là, on se rend compte qu’il y a des choses à améliorer à Santé Québec et Geneviève Biron agit. C’est son rôle et c’est ce que je m’attends [d’elle] », a-t-il déclaré. 

M. Legault a ajouté que pour assurer «de bons services aux Québécois», Mme Biron devait parfois prendre des décisions difficiles et qu’il l’appuyait dans ses choix. M. Legault a dit ne pas être au courant des détails de la situation, spécifiant seulement que Mme Biron « n’était pas satisfaite » et qu’elle avait demandé à M. Abergel de laisser sa place. 

Sur la plateforme Bluesky, le ministre de la Santé, Christian Dubé, s’est distancié de cette annonce en soulignant qu’il s’agissait d’une décision de Santé Québec qui est « une société d’État autonome et indépendante ». 

« J’ai pleinement confiance en la compétence des personnes qui dirigent l’organisation et qui siègent au CA, cette décision permettra de rapprocher la direction des opérations et améliorer les services à la population », a écrit le ministre.

Il a poursuivi en disant que les orientations du ministère sont claires et que leurs objectifs sont ambitieux. Il a affirmé que les anciennes fonctions de M. Abergel sont « névralgiques » pour l’atteinte des objectifs et « pour la réussite de cette grande transformation ». 

Selon une source au fait du dossier qui a requis l’anonymat car elle n’était pas autorisée à s’exprimer publiquement, il y avait des divergences de vision entre Geneviève Biron et Frédéric Abergel. Ce dernier voulait laisser plus d’autonomie aux établissements, alors que Mme Biron préconisait davantage une approche d’accompagnement sur le terrain afin de prendre ce qui fonctionne bien dans certains établissements pour l’implanter ailleurs.

Le directeur des communications chez Santé Québec n’a pas confirmé si un événement en particulier avait motivé la décision. Comme Mme Biron, il a lui aussi indiqué que Santé Québec avait la volonté d’être plus près des établissements et du terrain et qu’il pourrait y avoir un changement dans la structure de l’agence. Il a fait savoir qu’il n’y aurait pas d’autre départ que celui de M. Abergel d’annoncé. 

Les oppositions réagissent 

Le responsable de Québec solidaire en matière de santé, Vincent Marrissal, a critiqué la réaction de M. Dubé. «Une autre tuile de Santé Québec tombe sur la tête du ministre Dubé et il ne semble point s’en préoccuper, a-t-il commenté dans un communiqué. M. Abergel était la caution du terrain pour Santé-Québec et l’un des seuls dirigeants provenant du réseau public. Avec son départ, qui est aux commandes du réseau de la santé? Qui travaille pour que les Québécois et Québécoises aient accès à des soins sans sortir leur carte de crédit une 2e fois?» 

Le porte-parole du Parti québécois en santé, Joël Arseneau, a lui aussi une lecture sévère de la situation. « Nommé par le ministre et congédié par Biron, c’est l’échec du ministre. Choisi pour sa connaissance du réseau, congédié pour que “l’équipe exécutive se rapproche davantage du terrain”. De mauvais augure », a-t-il écrit sur le réseau X. 

Le chef intérimaire du Parti libéral, Marc Tanguay, semble aussi exaspéré de cette nouvelle. « Moins de trois mois après le lancement de Santé Québec, la numéro 1 vient de congédier le numéro 2. Santé Québec, c’est la créature de François Legault qui devait sauver le réseau », a-t-il mentionné sur X. 

M. Tanguay a rappelé que le ministre Dubé avait fait l’éloge de ce duo complémentaire, Mme Biron était issue du secteur privé et M. Abergel du public. « Aujourd’hui, plus que jamais, les Québécois n’ont pas accès aux services de santé. Autre échec de ce mauvais gouvernement Legault, en fin de régime », a déploré M. Tanguay. 

Au moment de sa nomination en avril dernier, le gouvernement vantait les 20 années d’expérience en tant que gestionnaire du réseau public de la santé de M. Abergel. Il a notamment été président-directeur général du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) ainsi que du CIUSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal.

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