Legault sur le point d’annoncer une entente «gagnant-gagnant» sur Churchill Falls

«Ça va être gagnant-gagnant», a lancé le premier ministre François Legault mercredi après-midi à propos d’une entente qui sera annoncée jeudi entre le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador sur le complexe hydro-électrique de Churchill Falls.

Pressé de questions par des journalistes à la sortie de la séance du conseil des ministres à Québec, il a ainsi laissé entendre, en montant à bord de sa limousine, que l’annonce de jeudi serait une bonne affaire pour les deux partenaires. 

«C’est certain que s’il y avait une entente, ce serait extrêmement positif pour le Québec», a pour sa part affirmé le ministre des Finances, Eric Girard, juste avant de se rendre au conseil des ministres, sans en dire plus.

Le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador régleraient ainsi un vieux contentieux de presque 60 ans.

La province voisine reproche au Québec de payer un tarif trop bas pour l’électricité de Churchill Falls, tandis que le Québec cherche de son côté à reconduire l’entente, peut-être même à la bonifier, alors que les surplus d’électricité d’Hydro sont en train de fondre et que les besoins sont en hausse en raison de la décarbonation de l’économie.   

En vertu d’une entente signée en 1969 et devant durer jusqu’en 2041, Hydro-Québec achète 85 % de l’électricité produite à Churchill Falls à un tarif très avantageux et donc récolte l’essentiel des profits. Le bloc restant de 15 % sert à alimenter les clients du réseau terre-neuvien au Labrador, ou est vendu sur les marchés d’exportation.

Hydro-Québec paie un tarif fixe pour l’électricité produite par Churchill Falls, soit 0,2 cent du kilowatt-heure, mais l’a revendue en moyenne à 8,2 cents du kilowatt-heure en 2022, a déjà précisé la société d’État. 

La province voisine a tenté de contester l’entente en cours, mais au fil des ans, plusieurs décisions de tribunaux ont confirmé sa validité.

Selon les données d’une étude d’un comité terre-neuvien, en 2019, il était estimé que l’entente de Churchill Falls avait rapporté en bénéfices près de 28 milliards $ au Québec, comparativement à seulement 2 milliards $ à Terre-Neuve-et-Labrador. 

En février 2023, M. Legault avait fait un acte de contrition en affirmant comprendre la frustration des Terre-Neuviens. 

Il avait ouvert la porte à renégocier l’entente avant son terme en 2041 et à verser une indemnisation à la province voisine. 

En septembre 2023, à la 44^e Conférence des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre et des premiers ministres de l’est du Canada à Québec, Andrew Furey avait pris bonne note du mea culpa du Québec. 

Mais il avait signifié qu’il était temps de traduire en gestes les bonnes intentions, avec un arrangement plus généreux pour sa province.

De son côté, M. Legault avait reconnu que «ce que veulent Andrew (Furey) et les gens de Terre-Neuve-et-Labrador, c’est qu’on augmente le prix qu’on paie entre maintenant jusqu’en 2041 pour l’électricité qu’on achète de Churchill Falls».  

Le chef du gouvernement du Québec avait pour sa part déjà exprimé sa convoitise, concernant les futurs projets de Terre-Neuve.  

En effet, un autre barrage pourrait harnacher la Churchill en aval, à Gull Island, un projet de 2250 mégawatts, alors que Terre-Neuve est déjà empêtrée dans un projet un peu plus bas sur la rivière, à Muskrat Falls, dont les coûts ont explosé.  

M. Legault avait donc dit souhaiter «plus de capacité venant d’un rehaussement éventuel de Churchill Falls et de la construction de Gull Island».

Churchill Falls constitue une pièce maîtresse de la stratégie énergétique du Québec et génère le tiers des bénéfices d’Hydro-Québec. 

Le complexe représente 15 % de la capacité de 210 térawattheures d’Hydro-Québec. La centrale dispose d’une puissance installée de 5428 mégawatts.