À peine sorti du Cirque du Soleil, Daniel Gauthier a commencé à jongler avec l’acquisition d’un centre de ski dans la région avec laquelle il est tombé en amour dans le milieu des années 70. Il a connu l’ère des remontées en autobus pour plus tard signer l’implantation du premier Club Med au Canada. Vingt ans après avoir acheté le Massif, il estime avoir livré ce qu’il avait promis même si la route a été plus longue que prévu.
Le bilan des 20 ans du Massif de Charlevoix se chiffre à « 320 M$ », dit l’homme d’affaires. S’il admet que l’expression « anti-resort aurait mérité des explications supplémentaires » au moment où il l’a utilisée, Daniel Gauthier se rappelle d’avoir souvent répété « qu’il était un entrepreneur ». Il n’a pas de regret puisque ce mot ne fait pas partie de son vocabulaire. « Il y a eu des choses plus difficiles et un peu de découragement, mais aujourd’hui on a plus de fun. Ça marche plus », lance-t-il.
Son aventure sur les hauts plateaux de Charlevoix a débuté en 2001. L’ancienne Société de développement du Massif de Petite-Rivière-Saint-François manque cruellement de fonds. Daniel Gauthier, qui fréquentait régulièrement la station, est appelé à la rescousse. Il prête de l’argent autant que la banque en avait avancé. « Il manquait quelques millions $. J’ai joué au banquier », dit-il.
L’année suivante, la SDM était prête à passer le flambeau. « J’étais peut-être le seul qui voulait. La famille Beaudoin (Bombardier) avait été également approchée. Je partais à la pêche au moment de la proposition. J’ai pris trois semaines pour y penser. Le Massif, c’est un coup de cœur. Il fallait que ça continue. Je me disais qu’il y avait sûrement de quoi à faire. Je ne savais pas dans quoi je m’embarquais. Avec le Cirque, on a réussi à réinventer le cirque. Je pensais au succès », rappelle Daniel Gauthier, qui confesse qu’avec le Cirque du Soleil « il a été partout dans le monde pour présenter la culture du Québec, ce qui est plus simple que de faire venir le monde dans Charlevoix ».
Un soir, alors qu’il est dans ce qu’il appelle son « chalet » de Cap-aux-Corbeaux, il voit au loin les lumières du centre de ski. « Qu’est-ce que tu viens de faire là? », se demande-t-il en pensant à la transaction conclue.
Annonce majeure
L’annonce de son projet avait soulevé enthousiasme et créé des attentes. L’explosion de dollars promise allait changer le visage de la région. Le promoteur voulait « réinventer le tourisme ». Les intentions y étaient, mais à un moment donné, la faisabilité de certains éléments ne tenait plus la route de la rentabilité. « J’ai souvent dit que je venais ici pour faire de la business », rappelle Daniel Gauthier.
Au départ, on parlait du projet Territoire le Massif. L’homme d’affaires se donnait quelques années pour mettre en place les pièces maîtresses. Le plan a pris plus de temps que prévu. Le feu qui a rasé la ferme Filbaie, qui devait au départ être transformée en un hôtel, a forcé une certaine réécriture du projet. Les négociations avec Club Med étaient loin d’être du grand divertissement. Elles ont même été rompues jusqu’à ce que l’ex-députée Caroline Simard les relance.
Les gouvernements supérieurs ont largement contribué dans les projets du propriétaire du Massif de Charlevoix. Toutefois, pendant 15 ans, il confie « avoir perdu des millions $ » avec des opérations déficitaires. « J’ai rapidement compris que la station devait devenir une destination pour qu’elle puisse vivre. Québec et Charlevoix n’étaient pas assez grands pour faire vivre le Massif et le Mont-Sainte-Anne. La rentabilité passait par une clientèle de l’extérieur du pays qui effectuerait des séjours ici », ajoute Daniel Gauthier.
« Ç’a été long de mettre ça en place. On voit une partie de l’ensemble de l’œuvre. Ça commence à faire ce qu’on voulait que ça fasse. On a une clientèle de qualité. Les voyageurs dépensent et dépensent plus depuis deux ans. C’est vrai chez nous et ailleurs dans la région », analyse le président du Massif de Charlevoix.
Explications manquantes
Le fondateur du Massif de Charlevoix, qui a multiplié l’utilisation de l’expression « anti-resort », constate aujourd’hui que des explications supplémentaires auraient dû venir avec. « Je voulais dire que, comparativement à des resorts, les clients ne seraient pas captifs du site et qu’ils pourraient visiter toute la région. Je voulais surtout dire que le site ne serait pas coupé du monde et aseptisé. Mon idée d’anti-resort était de dire que ce ne serait pas un endroit fermé. Je n’aurais pas dû utiliser ce terme qui a créé de la confusion. C’est plus l’esprit que je qualifiais. On a toujours dit qu’on voulait que les clients profitent de la région. C’est encore ça, l’esprit. Il n’y a aucune raison que les touristes n’aillent pas dans les parcs nationaux et découvrent ce que Charlevoix offre. On a de super actifs régionaux. On veut juste être un lieu dans la région », résume-t-il.
La COVID, un tournant
La COVID est venue aussi changer le cours des choses. « Toutes les entreprises pouvaient essayer n’importe quoi. On était pendant deux hivers à peu près la seule activité permise en gang dehors. On a donné un coup de barre et on s’est positionné comme un produit haut de gamme. C’est à ce moment qu’on a décidé de charger ce que ça coûte alors que tous les coûts ont explosé. Les assurances, les salaires, l’énergie ont augmenté. On s’est dit : on arrête de perdre de l’argent, sinon on ne sera plus là dans quelques années. On a fait du ménage dans les escomptes parce qu’on ne pouvait plus se le permettre », soutient le #1 du Massif.
Argent frais
Daniel Gauthier estime que la direction prise s’inscrit en droite ligne avec le discours du premier ministre François Legault et les poids lourds de son cabinet qui prônent la création de valeur et de richesse avec de l’argent neuf. « On est en plein dedans. Ce n’est pas de l’argent de Québécois qu’on se passe entre Québécois. On va chercher de l’argent partout dans le monde. On est passé à un autre niveau. Nos cibles sont Boston et Toronto. On cherche à développer les marchés extérieurs. Les clients sont prêts à payer, mais nous, on doit livrer la marchandise. Les standards internationaux doivent être atteints. La région est positionnée, maintenant », croit-il.
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