Évaluations foncières des terres agricoles: les agriculteurs des Éboulements au front

Par Émélie Bernier 5:00 AM - 4 avril 2023 Initiative de journalisme local
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Des initiatives sont financées pour soutenir le secteur agricole et agroalimentaire. Photo Émélie Bernier

L’impact du plus récent rôle d’évaluation sur la valeur des terres agricoles et forestières sème la grogne chez plusieurs agriculteurs de la municipalité des Éboulements qui se sont déplacés en grand nombre au conseil municipal pour se faire entendre.

Pour une rare fois, le conseil municipal des Éboulements a fait salle comble lundi. Majoritairement composée d’agriculteurs et d’agricultrices et de propriétaires de terres forestières consternés par la hausse de l’évaluation de leurs terres, l’audience a attendu patiemment la période de questions avant de se manifester, souvent avec émotion.

Présent à l’assemblée, Sébastien Tremblay est le premier à avoir demandé des explications au conseil sur la hausse fulgurante de l’évaluation d’une de ses terres agricoles. «  Ce qu’on constate,  c’est qu’il y a beaucoup de disparité.  On comprend que le budget augmente à chaque année et que ça coûte de plus en plus cher, tout le monde doit faire sa part, mais comment expliquer des différences notables dans les mêmes secteurs? Une de mes terres évaluées à 147 000$ passe à 355 000$, une augmentation de 240%. Mon autre est passée de 79 000$ à 84 000$! Comment ça s’explique?», a-t-il questionné avec ferveur, soutenu par ses compatriotes.

Sébastien Tremblay.

Sylvain Gauthier, également sur place, est producteur de bovin de boucherie à la frontière entre les Éboulements et Saint-Irénée. «Si mes calculs sont exacts, la valeur de ma terre aurait monté de 140% depuis 2016, soit de 147 000$ à 420 000$ », explique-t-il.

Les taxes foncières ont évidemment suivi la même courbe ascendante, bien que le taux d’impôt foncier ait été maintenu lors des deux derniers budgets.

« De notre côté, on n’a pas plus de revenus, c’est limite rentable… On est des passionnés, mais il faut arrêter de nous mettre des bâtons dans les roues! Si on veut rester producteurs, ça va prendre un coup de main. Des producteurs, il en reste une poignée! Si on n’est plus à demain, il n’y aura plus de vue, on va être dans le bois… », lance-t-il.

La salle du conseil de ville des Éboulements était bondée en ce 3 avril.

Jean-Yves Audet, producteur porcin des Éboulements, voit pour sa part la hausse de la valeur de ses terres et de son compte de taxes s’ajouter à la crise actuelle qui sévit dans l’industrie porcine.

«La valeur de la terre autour de la maison a monté de 92% juste dans le dernier rôle! La partie forestière a moins monté, mais ça donne une hausse moyenne de 35% », relate M. Audet.

Jean-Yves Audet a l’intention de contester le rôle. «Je vais rencontrer la MRC pour avoir des explications. On ne comprend pas comment ils en viennent à ces montants-là », dit celui qui a toutefois subi une hausse beaucoup moins drastique pour sa seconde terre, près du noyau villageois.

Durant près de deux heures, les propriétaires terriens et le maire Pierre Tremblay se sont renvoyé la balle.

«On va faire une résolution au niveau de la MRC pour parler de la problématique des évaluations et à la MRC, on peut faire une résolution et monter ça à la FQM (Fédération québécoise des municipalités) pour avoir une force de frappe », commente le maire qui rappelle toutefois que de telles démarches  ont déjà été entreprises, sans grand succès. Il a toutefois invité les producteurs qui se sentent floués à faire une demande de révision auprès de l’évaluateur.  

Sébastien Tremblay aurait préféré un engagement plus ferme. «J’ai l’impression qu’on pourrait faire plus et on va faire une rencontre avec l’UPA et le conseil là-dessus. La valeur de ma terre dépasse le 500 000$, je vais payer 300$, mais est-ce que je vais être capable de convaincre l’évaluateur? Tantôt, on ne sera plus capable d’exploiter nos propres terres! Il faut se mobiliser parce que la situation va juste aller en empirant.»

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