Elle est encore là

Par Emelie Bernier 7:33 AM - 15 septembre 2021
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La COVID est entrée sans frapper dans la vie d’Alice (nom fictif). La mère de famille, qui œuvre auprès des personnes âgées, est doublement vaccinée. Elle ne comprend que trop bien les risques associés à la pandémie, surtout pour sa clientèle, parmi les plus vulnérables.

Lorsque le plus jeune de ses enfants s’est réveillé fiévreux, la voix enrouée, Alice s’est tout de suite mise en mode vigilance…


Après deux jours à le couver, voyant que son état ne s’améliorait pas, elle s’est rendue à l’hôpital dans l’objectif avoué de faire examiner son enfant d’abord, mais aussi de lui faire subir un test COVID.


« Le dépistage pour la COVID me semblait la bonne chose à faire. J’ai quatre enfants qui fréquentaient alors le camp de jour et la garderie. Je ne voulais pas prendre de chance. Je n’avais pas envie que ma famille soit à l’origine d’une éclosion! »


Étonnamment, quand elle s’est présentée à l’urgence avec son petit de moins de deux ans, la possibilité que ce soit la COVID n’a même pas été envisagée par le personnel en place.


« La laryngite court beaucoup, madame, c’est sûr que c’est ça», lui a dit l’infirmière. Sûr? Vraiment? Dans une période comme celle-ci, est-ce «qu’être sûr» ou à peu près suffit?

« Je ne comprends pas pourquoi ils ne lui ont pas fait au moins passer le test… Je suis retournée à la maison, avec un papier me disant qu’il pouvait continuer à aller à la garderie parce qu’une laryngite, ce n’est pas contagieux… »

La vie a donc suivi son cours. Le petit est allé de mieux en mieux, les autres enfants avaient de l’énergie à revendre. Mais le virus, lui, faisait son chemin dans leurs petits corps.


« Mon 2e a été un peu enrhumé, mais à part ça, rien ne pouvait me faire croire qu’ils avaient la COVID… », raconte Alice.


Jusqu’à ce qu’un membre de sa famille, affecté de symptômes s’apparentant un peu trop au virus du moment, soit officiellement diagnostiqué et l’annonce aux proches qu’il avait côtoyés. Dont Alice et sa famille.

«Là, j’ai dit à mon conjoint : il faut qu’on aille tous se faire tester! Les enfants sont allés à la garderie, au camp, on est allé là, et là… On a vu mes parents, ceux de mon chum, la sœur de ma gardienne venait d’avoir un bébé… La liste des gens qu’on avait fréquentés s’allongeait au fur et à mesure que j’y pensais», dit Alice. Paniquée, elle a commencé à craindre le pire.

Le vendredi, toute la famille a subi le test de l’écouvillon. Samedi, le résultat a tardé à rentrer, ce qui a mis la puce à l’oreille d’Alice.


« Quand c’est négatif, c’est rapide. Mais là, je regardais sur le site et ça n’arrivait pas… ça disait « en traitement », un peu trop longtemps à mon goût … »

Elle a pris le téléphone et au bout du fil, on a confirmé ses craintes.

Les tests de ses quatre enfants et de son conjoint étaient indéniablement positifs.

« Après ça, ça a été le branle-bas de combat! Tu appelles partout, les membres de ta famille, les gens que tu as vus… et tu croises les doigts pour que personne ne soit malade », dit celle qui a immédiatement dû cesser de travailler pour s’occuper de ses petits louveteaux.

Heureusement, ils ont eu peu ou pas de symptômes. Son conjoint, par contre, a été plus affecté.
« Il a perdu le goût, l’odorat, il n’a vraiment pas bien filé… » Contrairement à Alice, il n’était pas vacciné. Au moment d’écrire ces lignes, son rendez-vous était pris.

Les deux semaines qui ont suivi ont été longues.

«On était tous coincés à la maison à ne pouvoir voir personne. Les enfants s’ennuyaient. Moi, j’ai dû composer avec une importante perte de revenus, car je n’avais pas droit à la PCRU. Mon conjoint aussi a manqué des journées de travail… Disons qu’on se serait passé de ça », dit Alice.

Elle pense aussi aux milieux qui ont été affectés, comme la garderie, qui a dû fermer durant plusieurs jours.
Heureusement, la catastrophe appréhendée n’a pas eu lieu. La mésaventure date du début du milieu du mois d’août et aucune éclosion n’a été déclenchée par sa tribu.

Si elle témoigne aujourd’hui, c’est parce qu’elle déplore que l’hôpital l’ait renvoyé à la maison sans tester son bébé, exposant ses proches ainsi que de nombreuses personnes de sa communauté à un risque indu.

Elle invite les personnes qui pourraient se trouver dans une situation similaire à insister auprès du personnel.
Les statistiques indiquent que deux personnes qui éprouvent des symptômes sur trois ne se dirigent pas d’emblée vers le dépistage.

Les enfants, quoique rarement affectés outre mesure par la maladie, sont de plus en plus nombreux à la contracter.
La rumeur d’une 4e vague se fait de plus en plus insistante. On évoque même un autre confinement…Pourrait-on les éviter?

«Il ne faut pas relâcher la vigilance. Je ne me serais jamais pardonné si j’avais contaminé un aîné dans mon milieu de travail, mon père, ma mère… La COVID est encore parmi nous, même si on se sent un peu au-dessus de tout ça », conclut Alice.

(« Alice » a demandé à témoigner sous un nom fictif pour éviter que ses enfants soient pointés du doigt dans leurs milieux respectifs.)

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