S’amuser dans la rivière… sans déranger le saumon

Par Karine Dufour-Cauchon 6:00 AM - 3 août 2021
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Les pêcheurs aux saumons sont réglementés par les organismes de gestion des rivières, comme Saumon Rivière-Malbaie.

Les rivières à saumon du Gouffre et de la Rivière-Malbaie sont invitantes pour les vacanciers qui veulent profiter de la saison estivale. Toutefois, l’habitat du saumon ne devrait pas être un terrain de jeu, croit une association de protection du saumon de l’Atlantique dans Charlevoix.

Toutes les perturbations que subit l’espèce en période estivale donnent des maux de tête aux gestionnaires de rivières à saumon comme Marc-André Lussier.

Le président de Saumon Rivière-Malbaie en appelle au bon jugement des gens qui se divertissent dans l’habitat du saumon atlantique.

Une situation problématique dans l’ensemble de la province perdure depuis quelques années.
Les kayakistes, plongeurs et nageurs s’amusent dans des zones où le saumon fait une halte repos: les fosses.
La pandémie ayant propulsé le tourisme régional et la popularité des sports nautiques, les saumons sont de plus en plus dérangés.

Le site de montaison du cran Martel.

«La descente de rivière en canot, en kayak, en pneumatique, perturbe le saumon. Certains vont même jusqu’à plonger en apnée pour aller voir les saumons ou se baignent dans une fosse à saumon. Ça, ça n’a pas d’allure», indique M. Lussier. Il convient que les rivières sont «multiusages». «Mais ce n’est pas toujours compatible avec le saumon, qui est fragile», ajoute-t-il.

D’un autre côté, il est impossible d’empêcher les citoyens de profiter des rivières, l’accès au plan d’eau et aux rivières est un droit reconnu.
La sensibilisation reste donc la seule arme des protecteurs du saumon.

«On est dans un milieu où tout le monde a le droit d’aller sur la rivière. On demande aux gens de faire attention», ajoute M. Lussier.

Zoé Maltais, préposée à l’accueil, Marc-André Lussier, président, Gaétan Tremblay, préposé à l’exploitation, Rose Bhérer, préposée à l’accueil, Lucie Forgues, directrice générale, et Mireille Ouellet, responsable de l’exploitation.

La communication entre les plaisanciers et les pêcheurs au saumon peut contribuer à maintenir la tranquillité du poisson dans son habitat.

« Si vous êtes en embarcation et que vous voyez des pêcheurs, faites leur signe que vous approchez. Ils pourraient vous indiquer par où passer, puisqu’ils peuvent avoir une idée où sont les saumons et les fosses. La Fédération québécoise du saumon atlantique (FQSA) a des discussions avec le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs pour trouver une solution», ajoute le président.

M. Lussier est également président régional de la FQSA. Il parle donc aussi au nom de la rivière du Gouffre.

Le cas du cran Martel

Le cran Martel est très populaire auprès de la population locale en saison estivale. Les baigneurs s’y rejoignent pour une sortie entre amis et les kayakistes en profitent pour embarquer et débarquer de la rivière par le cran rocheux.

Cet achalandage sur la rivière où se trouve le quartier général de Saumon Rivière-Malbaie (SMR) est dérangeant. Pour le saumon qui arrive d’un tour de camion, davantage de paix serait bienvenue.

Deux fois par jour, des préposées de SMR vont au barrage de l’usine de Clermont de Produits Forestiers Résolu pour vider la cage à saumon. Comme ils ne peuvent remonter le barrage, les saumons doivent passer par une échelle spéciale pour se rendre dans une cage aménagée pour eux.

Les préposées vident le contenu à l’intérieur d’un camion où un bac oxygéné reçoit les poissons. La moyenne de captures varie entre 6 et 12 saumons. Ils s’en vont par la voie terrestre au tuyau de montaison du cran Martel.

Une ballade en camion d’une dizaine de minutes et un tour de glissades d’eau, puis le tour est joué. Le saumon a atteint sa destination. Tout ce mouvement le force à aller chercher de la tranquillité dans le fond de la fosse.

Le problème, c’est que son havre de paix se transforme vite en piscine. Plusieurs y font des plongeons, créant du mouvement. Encore une fois, la sensibilisation est la clé, indique le président de SMR Marc-André Lussier.

«Quand les gens vont dans les rapides, il n’y a pas de conséquences, le saumon n’y est pas. Quand ils sautent directement dans son habitat, c’est nocif. On ne peut par contre pas reprocher aux gens des choses qu’ils ne savent pas. Il y a un devoir d’information pour renseigner les gens. On demande aux gens de faire attention, au moins dans les fosses», ajoute M. Lussier.

Pour arriver à une coexistence harmonieuse des humains et des saumons, du travail reste à faire. L’augmentation de l’affichage est une option envisagée. Le cran Martel est l’une des 76 fosses sous la gestion de Saumon Rivière-Malbaie.

Le barrage de Clermont à l’usine de Produits Forestiers Résolu. C’est là ou se trouve l’échelle à saumon.

Quand la pêche vient en aide au saumon

La pêche aux saumons n’est-elle pas dommageable pour l’espèce? Si et c’est pourquoi elle est réglementée.
Sans organisation dédiée à la gestion des rivières, la pêche au saumon sportive laisserait place au braconnage.

«Ça sonne contre-intuitif, mais la pêche au saumon, c’est ce qui sauve le saumon. L’émission de permis et le contrôle empêchent le braconnage. Plus il y a de pêcheurs dans une rivière, moins il y a de braconnage, et meilleur est le saumon au bout de la ligne. De plus, pour gérer une rivière et la protéger, ça prend des revenus», explique Marc-André Lussier.

La principale source de revenus de l’organisation provient de cette activité. Selon les derniers chiffres (2018) de Saumon Rivière-Malbaie et de la FQSA, les retombées économiques de la pêche au saumon et les dépenses engendrées avoisineraient 3,5 millions $ annuellement pour la région.

Du côté de la rivière du Gouffre

Du côté de la rivière du Gouffre, la corporation qui gère les accès de pêche au saumon collabore bien avec l’entreprise d’excursions en kayak, Katabatik.

Sébastien Savard, directeur général de Katabatik, soutient que la coexistence des activités de l’entreprise et de celle de la Corporation de la rivière du Gouffre va bon train.

Il ajoute que lorsque le client fait une réservation pour une excursion sur la rivière, ceux-ci sont avisés qu’ils s’en vont sur une rivière à saumon. Lors du breffage de mise à l’eau, les kayakistes sont informés une seconde fois qu’ils vont sur une rivière à saumon. Le mot d’ordre est donné de contourner les pêcheurs s’il y en a et de ne pas croiser leurs lignes de pêcheurs.

Ceci étant dit, les zones de pêche sont généralement en amont des zones où Katabatik entame ses excursions.

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