Travailleurs étrangers temporaires: des retards aux coûts humains et financiers

Par Emelie Bernier 7:30 AM - 28 avril 2021
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Rony Trochez, Manuel Ponce Munoz, Jose Ines Ponce Munoz, Daniel Ponce Munoz et Olman Trochez ont enfin pu commencer à travailler dans les serres de la Pépinière Charlevoix. Les Honduriens ont confié être très heureux d’être enfin sortis de leur quarantaine. Courtoisie.

Depuis une douzaine d’années, l’entrepreneur Jean-Claude Bernier de la Pépinière Charlevoix embauche cinq travailleurs étrangers temporaires en provenance du Honduras. La pandémie a mis du sable dans un engrenage auparavant bien rodé.


Les cinq travailleurs honduriens sont au Québec depuis le 3 avril. Ils n’ont pu commencer à travailler que le 22 avril.
«Les tests de dépistage du 10e jour (voir autre texte) sont partis avec Purolator en Ontario pour analyse le 14 avril. On a reçu les résultats au goutte à goutte durant la semaine du 20, mais il fallait avoir tous les résultats avant qu’ils puissent se mettre au travail », explique M. Bernier.


Ce dernier ne remet pas en cause l’importance des dépistages, mais bien les délais indus, des doléances exprimées par de nombreux agriculteurs québécois qui comptent sur les TET pour lancer leur saison.
Ces délais dans l’obtention des résultats du dépistage s’ajoutent à d’autres retards.

«Il y a eu un problème lors du premier vol prévu. Ils n’ont pas pu embarquer dans l’avion parce qu’il y avait un cas dans l’autobus qui les avait menés du Honduras au Guatemala. Ils ont dû retourner chez eux et attendre qu’un autre vol soit disponible », explique M. Bernier.
Par la suite, des vols ont été plusieurs fois reportés. Enfin arrivés, les travailleurs ont été sur le carreau durant près de trois semaines.


Sans vouloir chiffrer les pertes encourues avec précision, M. Bernier les estime à plusieurs milliers de dollars.
«Oui, le fédéral nous en rembourse une partie, mais avec tout le temps qu’on a mis là-dessus, les frais qui n’en finissent plus… Il y a une grosse marge qui n’est pas comblée. Dans les faits, ça fait deux mois qu’ils n’ont pas travaillé et qu’on avait besoin d’eux », résume-t-il.

L’impact sur la production est non négligeable.
Jean-Claude Bernier apprécie énormément sa petite équipe venue du Sud.
«Ils sont motivés, rigoureux. On engagerait bien des gens d’ici. On a plusieurs postes affichés, mais sur 15 CV reçus, on a passé une dizaine d’entrevues et seulement quelques-uns sont entrés. C’est possible que la PCRE soit en partie responsable du désintérêt des gens à travailler pour nos entreprises qui sont toutes en manque de main d’œuvre», conclut Jean-Claude Bernier, avec un brin d’exaspération.

Rappelons que l’Union des producteurs agricoles a fait pression pour des délais moins longs dans l’obtention des résultats de dépistage. Lundi, la ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Marie-Claude Bibeau, annonçait l’octroi d’un contrat de 2 M$ à la firme québécoise Dynacare afin de soutenir les entreprises dans le dépistage de leurs TET.

Des impacts jusqu’au Honduras


Ces retards ne sont pas coûteux que pour les entreprises. Pour les travailleurs, de précieuses semaines de revenus réguliers ont été perdues.

«Comme ils sont arrivés plus tard que d’habitude, ils auront moins de semaines de salaire. Chaque dollar compte pour eux parce qu’ils font vivre plusieurs personnes dans leurs pays. Ça fait deux ans que c’est plus difficile, ça paraît!», lance Jean-Claude Bernier.


Daniel Ponce Munoz, Manuel ponce Munoz, Jose Ines Ponce Munoz, Olman Trochez et Rony Trchez. Courtoisie.

Coincés entre quatre murs, Rony Trochez, Manuel Ponce Munoz, Jose Ines Ponce Munoz, Daniel Ponce Munoz et Olman Trochez ont trouvé le temps long.

Ils confient d’ailleurs avoir eu très hâte de recevoir les résultats de leurs tests.
«Ils ont eu le temps de s’inquiéter, surtout qu’avec le changement de tempéra-ture, ils attrapent toujours un petit rhume», illustre leur collègue Amélie Métayer.

Les cinq Honduriens étaient heureux de pouvoir enfin mettre main à la pâte après ces «vacances» forcées loin de leurs.
Heureusement, ils ont pu communiquer régulièrement avec leurs familles, nous explique Mme Métayer. Leurs travailleurs ont tous des téléphones intelligents, un accès à Internet et un compte Facebook pour leurs communications.

« Avec Messenger ils ont accès à leur famille en vidéo régulièrement. Ils n’ont probablement jamais autant de temps de temps libre de leurs vies!», conclut Mme Métayer, heureuse de pouvoir enfin compter sur ces collègues motivés.

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