Les 100 ans de monsieur Elphège

Par Karine Dufour-Cauchon 8:05 AM - 6 avril 2021
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Elphège Brassard est un homme fier et droit. Le 2 avril, à l’aube de ses 100 ans, il a pu partager un bon repas en compagnie de sa grande «bulle familiale» de la Maison Desmeules. Un geste bien apprécié, à la fin d’une année où les célébrations ont été rares.

La petite fête s’est déroulée dans les règles de l’art, COVID oblige. Les deux enfants de M. Brassard avaient l’intention de lui rendre visite, mais les récents développements de la Santé publique les ont fait changer d’idée. Avant la mise à jour du gouvernement le 31 mars, la Santé publique avait autorisé une sobre rencontre. M. Brassard a tout de même pu les revoir de l’autre côté d’un écran.

Un toast a été porté à un siècle de vie remplie de bons souvenirs et d’anecdotes.

Un siècle d’histoire

Le Clermontois est un «vieux de la vieille». Comme la plupart des hommes de sa génération, il a donné une bonne partie de sa vie à la «Donohue», l’usine de Clermont. À 18 ans, il est entré «aux rouleaux», selon l’expression de l’époque.

«Ma première nuit que j’ai faite, j’ai trouvé ça dur. Il fallait être fort, c’était pesant ces rouleaux [de papier]-là. Avec les gars, on savait travailler, pi on s’est habitués», se rappelle-t-il encore.

Les noms de ses collègues sont brumeux dans sa mémoire, mais M. Brassard se souvient qu’il a passé de bons moments avec eux. Rares sont ceux qui sont toujours vivants pour raconter cette tranche d’histoire alors que la papetière était en pleine expansion.

M. Elphège aurait bien voulu «aller à école» dans la grande ville, mais les fonds manquaient. Il ne cache pas que s’il en avait eu la chance, il aurait aimé aller faire un cours classique à Québec, comme le faisaient les «chanceux» de l’époque.
Il lui aurait fallu la rondelette somme de 1500$ pour payer l’inscription. Pas de chance, ni lui ni son père n’avait les précieux deniers pour lui garantir une place parmi les studieux.
En 2021, il ne regrette rien pour autant. Le centenaire aura donné 40 ans de sa vie à l’usine sans chercher d’autres boulots.

Dans sa jeunesse, le jeune Elphège a «patiné en masse». C’était l’époque où il était possible de remonter la Rivière-Malbaie sur ses patins, alors que la glace s’y installait plus solidement qu’aujourd’hui.
Alors qu’il avançait en âge, une place lui a été proposée à la Maison Desmeules. L’équipe de la résidence privée pour aînés (RPA) peinait à croire que M. Elphège Brassard avait déjà l’âge vénérable de 90 ans! Dès son arrivée en 2012, il s’est bien adapté à son milieu de vie.

Il ne se doutait alors pas qu’il vivrait, 11 ans plus tard, un événement aussi improbable qu’une pandémie mondiale, lui qui a pourtant vu passer son lot de guerres et de crises planétaires.

Même si les consignes sont bien intégrées aujourd’hui, il trouve toujours difficile de ne pas avoir de visites et de ne plus faire de sorties comme il le souhaiterait.

La RPA de la Maison Desmeules accueille une dizaine de résidents autonomes et semi-autonomes.
Depuis le début de la crise, les directives des gestionnaires du milieu ont évolué au fil des consignes de la Santé publique. À l’exception de raisons humanitaires, seules les visites des proches aidants sont permises.
À noter que M. Brassard n’est pas le seul centenaire de sa famille.

Sa sœur, Mme Marguerite Brassard a aussi dépassé le siècle de vie et est aujourd’hui âgée de 101 ans. Elle aura 102 en mai.

Joyeux anniversaire!

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