Un dernier adieu à l’Hôtel Saint-Siméon

Par Karine Dufour-Cauchon 6:30 AM - 21 octobre 2020
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Lily Duchesne et Marc Asselin tourne la page sur leur carrière de tenanciers de l’Hôtel Saint-Siméon. Ils partagent quelques souvenirs avec Le Charlevoisien avant de partir à la retraite.

En près d’un demi-siècle derrière son comptoir, Marc Asselin aura entendu maintes histoires et rencontré des milliers d’adeptes de «p’tites» bières et de jasette. À 71 ans, il ferme les portes de son bar, l’Hôtel Saint-Siméon, avec l’intention ferme de profiter de la vie en compagnie de sa vaillante conjointe Lily Duchesne. Leur seul regret : aucune relève n’est prête à reprendre le flambeau.

Le 11 octobre, le glas de 47 années de carrière a sonné pour Marc Asselin. Au cours d’une dernière soirée émouvante, ils ont tourné une page d’histoire de la municipalité. Le Charlevoisien retrace les grands moments de cette histoire qui a débuté en 1973.

Alors âgé de 24 ans, Marc Asselin, un jeune homme de Saint-Siméon, poursuit des études en administration à Limoilou. Il n’a pas le temps de terminer son diplôme que lui prend l’envie de plonger dans le concret du monde des affaires. Avec trois autres actionnaires, il reprend l’Hôtel Saint-Siméon en 1973. À ses côtés, on comptait entre autres Raymond-Marie Tremblay, pilier des loisirs de la municipalité, qui sera «un second père» pour le jeune entrepreneur.

Marc prendra la barre de l’administration des lieux, mais ce qu’il préfère ne se trouve pas dans ses papiers comptables: c’est d’entendre les mille et une histoires des voyageurs de passage, des monteurs de ligne, des motocyclistes ou de ses concitoyens de Saint-Siméon. C’est l’époque où tout roule à flot : les familles sont nombreuses, l’économie se porte bien et le village est vivant. Les années s’écoulent et le prospère hôtel est un incontournable pour tout bon «jaseux» qui se respecte.

L’Hôtel Saint-Siméon est dans le paysage de la municipalité depuis près d’une centaine d’années. Photo : 1944

En 1993, de grands changements s’imposent. On rénove le bar, l’offre d’hébergement disparaît et fait place à un appartement pour M. Asselin et sa nouvelle compagne de vie. Lily Duchesne, passionnée d’hôtellerie et de service à la clientèle, travaillera dans l’ombre à «garder la place propre» et servira les clients avec la passion qu’on lui connaît.

Des soirées enflammées Le duo se rappelle de soirées empreintes de grandes passions dans les années 1990. Les diffusions des matchs de hockey entre les Nordiques de Québec et les Canadiens de Montréal soulevaient certaines tensions partisanes dignes de soirées référendaires! À cette époque, les affaires vont bien, mais des actionnaires se retirent du projet graduellement.

C’est en 2008 que Marc Asselin deviendra l’unique propriétaire de la compagnie alors que son mentor, malade, lui cède ses parts. Les années qui suivront seront bonnes alors que la ChantEauFête donne l’occasion au couple de faire connaissance avec de nombreux artistes et d’accueillir les festivaliers pour des fins de soirée mémorables. Le départ de l’événement marquera le début d’une baisse d’achalandage. La belle époque s’essouffle.

2020 : Le dernier droit

Le temps venu, on renouvelle les permis pour l’année 2020. Marc et Lily s’entendent alors pour dire qu’il s’agit de leur dernière année. La COVID viendra ensuite amputer de quelques mois leurs opérations printanières, mais ils prennent la décision d’ouvrir et de profiter une dernière fois de l’été. Les masques et les visières n’ont pas affecté leur enthousiasme à rencontrer les Québécois en quête de bon temps.

Le secret de leur retraite leur pesait cependant lourd sur le cœur, sachant qu’ils n’accueilleraient bientôt plus les visiteurs sur leur grande terrasse surplombant le fleuve. Ce n’est qu’une semaine avant la fermeture que Lily et Marc ont dévoilé leur décision à leur clientèle. Tristes de perdre une véritable institution, les habitués se sont toutefois dits heureux que les vaillants propriétaires s’offrent enfin un peu de temps pour eux. Très attachée à ses clients, Lily Duchesne ne cache pas que la décision de fermer l’établissement mythique de Saint-Siméon l’a émue.

«C’était une famille, carrément!, commente Lily Duchesne. Quand quelqu’un arrivait, c’était comme si de la visite débarquait. C’était un travail très agréable. On savait par contre que notre décision ne changerait pas. Cet été, Marc et moi, on regardait les clients sur la terrasse… Ça m’a fait un «motton» au cœur! On est un peu triste qu’il n’y ait pas de relève. Mais bon, nous n’attendrons pas que la bâtisse soit vendue avant de profiter de nos vies!»

Pour sa part, M. Asselin tient à remercier tous ceux qui l’ont encouragé, qui se sont confiés à lui et qui ont organisé une tonne d’événements pour animer la municipalité. Marc et Lily invitent ceux qui seraient tentés de reprendre le flambeau à les contacter. Un nouveau chapitre s’ajoutera-t-il à l’histoire de l’Hôtel Saint-Siméon ? Seul l’avenir le dira.

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