Les enfants de Jeanne D’Arc

Par Émélie Bernier 3:48 PM - 11 février 2020
Temps de lecture :

Les commissaires qui ont été mis à la “retraite” par la loi 40.

 

Jeanne D’Arc Boivin Girard débutait sa 35e année à titre de commissaire scolaire. Triste, frustrée, mais surtout inquiète, la dame de 67 ans a appris au réveil samedi matin qu’elle ne complèterait pas cette 35e année, la CAQ ayant tenu plus tôt que tard et sous bâillon sa promesse électorale de saborder les commissions scolaires.

 

Jeanne D’Arc ne faisait pas l’autruche.  Elle savait très bien que les jours du conseil des commissaires étaient comptés. « Ce n’est pas une surprise, mais on s’attendait à terminer le 29 février. Disons que ça été un réveil un peu brutal, samedi matin », lance la dame, plus déçue qu’amère.

« Le problème, c’est pas de ne plus avoir de « job », c’est la façon qu’ils s’y sont pris. Ne pas reconnaître le travail que nous avons fait, c’est une chose, mais pour en arriver à une réforme comme ça, il faut que la démarche soit plus approfondie. Je m’inquiète pour les enfants, et pas seulement les miens! Est-ce qu’ils feront les frais de cette transition bâclée? », avance la mère de 5 enfants, grand-mère de 19 petits-enfants et même arrière-grand-mère de deux arrières-petits-enfants.

Depuis le jour 1 de son implication, elle a à cœur tous les jeunes qui fréquentent l’un ou l’autre des 17 points de services de la commission scolaire, du préscolaire jusqu’à la formation professionnelle, en passant par toutes les écoles primaires et secondaires du territoire. «Si je me suis engagée aussi longtemps, c’est pour voir à ce que tous aient la même chance! Et quand quelque chose ne faisait pas mon affaire, j’étais capable de le dire. On avait de bonnes discussions. Nos petites écoles étaient très importantes, on voulait que ce soit équitable pour tous et que tout le monde ait ce qu’il faut pour réussir! »

«Les commissaires, on était les chiens de garde de l’éducation, on était là pour tous les enfants.»

Le bon bilan de la commission scolaire prouve qu’ils ont réussi, selon elle. « On s’est battu pour avoir une formation professionnelle de qualité. On a d’excellentes équipes-école. Il y a 35 ans, il se vivait des choses épouvantables dans nos écoles… Il y en a qui se sont faits brasser… Heureusement, aujourd’hui, ce serait inadmissible de toucher un enfant! »

Depuis 35 ans, cette femme de bûcheron du rang Sainte-Philomène réservait tous ses mardis à son travail de commissaire scolaire, qu’une réunion officielle soit à l’agenda ou non. « Je ne prenais pas d’autres engagements, car on pouvait toujours être convoqué. Quand ma mère est morte, le soir avant qu’elle meure, je suis allée à l’assemblée parce que c’était important! Je prenais mon rôle, très au sérieux. Et je ne suis pas la seule. Les gens qui étaient là étaient tous très impliqués», indique-t-elle.

D’entendre les reproches peu subtils du ministre Roberge l’insulte d’autant plus. « Ce qui m’a choquée le plus, c’est d’entendre de la bouche du ministre « il faut avoir une meilleure administration ». On a fait du bon travail! Personnellement, j’ai peur que l’éducation mange une claque… »

Si elle-même n’a pas l’intention de tenter d’obtenir un siège dans la prochaine structure, Jeanne d’Arc espère que le milieu répondra présent.

Dans tout ça, elle se rassure car elle fait confiance à la directrice de la commission scolaire  Martine Vallée. Elle répondra présent si on lui demande son support pour la transition.  «Je n’abandonnerai pas mes enfants. Oui, je serais assez fâché pour jeter la serviette, mais pas au détriment de mes enfants! »

Mardi, une séance du conseil des commissaires était prévue. La CAQ en aura décidé autrement. Les commissaires souhaitaient tout de même passer la soirée ensemble. « On ne va pas siéger comme conseil mais on va se rencontrer comme humains , pour décanter. On ne peut pas partir sans saluer tout notre monde. Les commissaires, on était les chiens de garde de l’éducation, on était là pour tous les enfants.»

Partager cet article