Le visage des banques alimentaires (vidéo)

Dans les dernières semaines, les Charlevoisiens et Charlevoisiennes ont donné généreusement des dollars et des denrées afin d’offrir des paniers de Noël à ceux et celles pour qui les Fêtes ne sont pas tout aussi festives. Malgré l’anonymat de cette campagne de bonté, les bénéficiaires des banques alimentaires ont un visage et un nom et Patricia fait partie de ceux-ci. Elle a reçu de l’aide lors de périodes difficiles, mais elle redonne maintenant que ça va mieux dans sa vie.
Patricia est certes une femme généreuse. Bien qu’en apparence timide, elle donne sans compter aux personnes dans le besoin. Alors que la vieillesse et la maladie ont frappé sa mère, celle-ci est devenue son aidante naturelle, et a quitté son emploi. « Il n’y a pas d’aide financière pour ceux qui prennent soin des membres de leur famille », souligne-t-elle à juste titre.
La mère de Patricia est décédée en 2006. « Les factures se sont accumulées. Il fallait payer Hydro-Québec, le loyer et les frais funéraires. Je n’étais plus capable d’arriver, » décrit la femme. Celle qui avait pris soin des autres a alors eu besoin de l’aide d’autrui. Elle a alors dû s’adresser au Service d’aide alimentaire et budgétaire de Charlevoix-Est (SAAB) afin de pouvoir s’alimenter convenablement. « L’organisme m’a donné de la nourriture, mais m’a aussi aidé à faire mon budget », poursuit-elle.
Lorsque Patricia est revenue chez elle, son premier panier du SAAB sous le bras, elle s’est mise à pleurer. Sa fierté venait d’en prendre un coup. Mais le temps et la bonne volonté arrangent bien souvent les choses. Un an plus tard, elle était sortie de la pauvreté, occupait un travail et volait de ses propres ailes financièrement.
Or, le destin est parfois cruel. En 2010, le conjoint de Patricia a développé une grave maladie. Elle a été à ses côtés tout au long de son combat qui a duré plus de deux ans en tant qu’aidante naturelle, encore une fois. Après le décès de ce dernier, elle a été complètement épuisée moralement et financièrement. « J’ai dû redemander l’aide du SAAB », confie-t-elle. Petit à petit, elle s’est reconstruite, soutenue par la banque alimentaire. Elle a pu ainsi vivre son deuil, sans s’inquiéter d’avoir ou non les moyens de se nourrir. Il a fallu un an afin qu’elle retourne sur le marché du travail et redevienne indépendante.
Aujourd’hui, Patricia va mieux. Elle travaille. Elle possède un logement et une voiture. Mais il y a des ces moments où la vie semble s’acharner. Parce que son emploi est saisonnier, elle est présentement prestataire de l’assurance-emploi. L’année 2017 a été prospère pour certains dans notre région économique aux fins de calcul des prestations versées, le secteur 19. Le taux de chômage est à un niveau historiquement bas, à 6,7 %. Et les travailleurs saisonniers écopent. En mars 2018, les prestations de Patricia cesseront, et elle entrera dans le trou noir de l’assurance-emploi pour une durée de six à huit semaines. Bref, elle retournera temporairement dans un état de pauvreté.
« Je ne sais pas comment je vais passer le trou noir », soupire Patricia avec de la tristesse dans la voix. Encore une fois possiblement confrontée à la faim, celle-ci envisage de demander les services du SAAB pour passer cette période difficile. « Je ne sais pas comment je vais faire pour boucler les fins de mois, et si j’aurai d’autres options que de redemander de l’aide alimentaire. » avance-t-elle.
Néanmoins, à l’orée de la période des Fêtes, encore loin du printemps noir que connaître Charlevoix en 2018, elle utilise son temps pour aider les autres. En effet, elle collecte des denrées et des jouets pour le SAAB. Elle désire retourner ce qu’elle a reçu, tout en regagnant sa fierté. « Je me sens utile ! », s’exclame-t-elle en souriant. Comme si d’un coup, les déchirements du passé et les soucis du futur n’existaient plus.
En 2004, les Cowboys Fringuants chantaient La Reine : « La nuit avec son pick-up elle faisait sa tournée, distribuant des toasts et un peu de café, pour donner un p’tit brin de chaleur, à ceux qui ont l’hiver dret dans le cœur ». Encore cette année, grâce à leur générosité, les Charlevoisiens et Charlevoisiennes ont été dignes de la royauté. Et Patricia est aussi à sa manière une reine.
https://www.youtube.com/watch?v=h0yTJKEzRMA