Pub pop

Par Emelie Bernier 30 juin 2014
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Andy Warhol s’affiche-Art et image de marque au Musée d’art contemporain de Baie-Saint-Paul

 

Couleurs vives, traits francs, contrastes assumés: aucun doute, on est bien ici dans l’univers esthétique d’Andy Warhol. 

 

Paul Maréchal, un féru d’Andy Warhol, est l’homme derrière cette exposition. « Chaque œuvre présentée ici est le fruit d’une commande spécifique destinée à faire la promotion d’un produit, d’une marque ou d’un événement, un corpus méconnu de l’artiste, explique-t-il. En choisissant ce fil conducteur, M. Maréchal voulait redonner ses lettres de noblesse au travail publicitaire d’Andy Warhol. «Les affiches qu’a faites Warhol étaient noyées dans une mer d’affiches qui reproduisaient ses œuvres, comme celle de la boîte de soupe Campbell. Ça n’a aucun intérêt, c’est le tableau qu’il faut voir! Si vous voulez voir une affiche, il faut que vous regardiez une affiche originale qui a été faite pour un média», explique le collectionneur qui côtoie l’univers de Warhol depuis plusieurs années.

L’exposition réunit toutes les affiches de commande créées par Warhol, sauf une. « La seule qui me manque, je n’en connais qu’un seul exemplaire et il est dans la collection du propriétaire qui a acheté la filiale de chaussures dont elle fait la promotion à Charles Jourdain dans les années 1980», explique le collectionneur.

 

Paul Maréchal est quasiment certain d’avoir mis la main sur un exemplaire de chacune des autres œuvres publicitaires de son artiste chouchou.  « Les commandes publicitaires arrivent en 1964 à partir du moment où Warhol devient une méga star de l’art contemporain suite à son exposition des tableaux de boîte de soupe Campbell.  Les commanditaires veulent voir son nom figurer sur l’affiche. Ils vendent leur produit, mais ils vendent l’œuvre de Warhol aussi. La notoriété de l’artiste est mise au service de la promotion du produit», explique-t-il. Il relève aussi la présence marquée de la signature de l’artiste sur les affiches, alors que ce dernier signait plutôt discrètement ses propres tableaux.

 

Selon lui, les affiches de Warhol sont des œuvres d’art à part entière et ce, même si elles ont été reproduites parfois jusqu’à 500 exemplaires. «La reproduction n’enlève pas de valeur à l’oeuvre puisqu’elle a été faite pour l’affiche, c’est le médium choisi par l’artiste », clame-t-il, une opinion partagée par son amie, la directrice du Musée des Beaux-Arts de Montréal Nathalie Bondil. «Warhol avait compris que la diffusion à grande échelle lui permettait d’avoir un impact énorme. (…) Il ne faudrait pas rabaisser la valeur de l’œuvre à son médium puisque la valeur de l’œuvre est intrinsèque! », dit

 

 

celle qui admire le travail abattu par le collectionneur, dont un « magnifique catalogue qui fera date.»

 

 

«Pour chacune des 44 affiches, j’ai écrit un texte qui explique quand, comment, pourquoi, avec qui et combien, pour que les gens comprennent la différence entre une affiche de commande et une affiche décorative, pour approfondir la connaissance sur l’œuvre de Warhol. Le défi, c’était de les collectionner pour pouvoir les regarder, les examiner et mieux en parler.  Avec la publication du catalogue, j’ai bon espoir que ça fasse en sorte qu’une affiche des chaussures qui sorte pour compléter ma collection », rigole le collectionneur.

 

 

« Ce que vous voyez, ce sont les affiches qui ont faites par Warhol dans le but précis de servir le médium de l’affiche, pas des tableaux transposés en affiches », insiste le collectionneur.

 

 

Pourquoi tout ce travail autour de Warhol? Paul Maréchal veut « rendre justice » à l’artiste dont il admire l’imagination, la versatilité… et l’humanité. « Des bouquets de fleurs, des bouteilles, des groupes rock, des animaux, il n’y a aucun sujet à son épreuve! Il est mis au défi par la commande. Il a commencé sa carrière comme ça, il a bien  intégré ça en tant que jeune artiste et il a continué », explique Paul Maréchal qui considère que Warhol s’est ainsi sciemment rendu accessible. « Ça démontre que Warhol ne réservait pas son œuvre qu’aux galeries et aux musées. C’est l’artiste pop par excellence, parce qu’il s’adressait à tout le monde et il utilisait les mediums pour que tout le monde ait accès à son œuvre.  Andy Warhol est né d’un milieu très pauvre dans le Pittsburgh des années 1930 et il a toujours gardé ce souci pour les gens moins fortunés », rappelle M. Maréchal, soulignant que l’artiste a longtemps servi la soupe populaire aux itinérants à l’église de son quartier new-yorkais. Cet aspect de l’artiste le fascine. «On a tellement la mauvaise impression de Warhol. Les gens pensent qu’il était à moitié drogué et qu’il faisait la fête à la Factory avec ses amis bohèmes et artistes. Ce n’est pas ça du tout! C’était un bourreau de travail, un artiste consciencieux doté d’une grande humanité », encense l’admirateur inconditionnel.

Paul Maréchal ne compte pas s’arrêter là et planche déjà sur un prochain projet consacré au même artiste. « Ce sera un catalogue raisonné qui va recenser toutes les illustrations de magazine que Warhol a fait. Les biographes et les auteurs sur Warhol cantonnent la période d’illustration au début de la carrière de Warhol, de 1949 à 1963, mais ma recherche, ce travail de fourmi, m’a permis de voir qu’il en a accepté jusqu’à la fin de sa vie des commandes d’illustrations pour les magazines. J’ai recensé 409 magazines contenant des illustrations originales de Warhol. Il a fait 25 illustrations pour American Girl, le magazine des « girl scout »… Magnifique, totalement inconnu, extraordinaire! Warhol illustre des nouvelles, de la fiction, il arrive à montrer le caractère, la psychologie des personnages et le narratif de l’histoire en utilisant l’abstrait et le figuratif. C’est génial! », conclut-il.

soit selon 3 principaux types de commanditaires : les stars de la musique, les produits de consommation et la promotion d’événements culturels ou de causes.

 

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