Le suicide, une réalité en milieu agricole

Par Eric Maltais 2:36 PM - 5 janvier 2017
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Valérie Bilodeau, Mélanie Gourde, Lucie Cadieux, Renée-Claude Laroche, Alain Fortin et Lucie Pelchat, tous dédiés au bien-être des agriculteurs de Charlevoix.

Le milieu agricole n’échappe pas à la réalité du suicide. L’isolement, l’estime de soi, les congés peu fréquents, la pression de produire dans des conditions parfois difficiles, la conciliation travail-famille, bref, l’amour et le bonheur ne sont pas toujours dans le pré, comme la population peut le constater à la populaire émission télévisée.

Les dernières années ont été particulièrement éprouvantes à la suite de la perte d’êtres chers, des départs pourtant imprévisibles dans Charlevoix. C’est pourquoi les deux Syndicats des producteurs agricoles (UPA) de Charlevoix, le SHIC et le Centre de prévention suicide, en partenariat avec le Centre intégré universitaire de la santé et des services sociaux (CIUSSS) ont mis en place le Comité d’actions concertées en qualité de vie agricole (CACQVA).
Appelée à témoigner lors du lancement de ce comité visant à permettre aux agriculteurs qui se sentent vulnérables psychologiquement de témoigner de leur isolement, Lucie Cadieux, ex présidente de l’UPA, n’a pas caché que leur regroupement avait été frappé par un coup de massue lorsqu’il a perdu des êtres chers il y a quelque temps.
« Il y a des producteurs en détresse et on ne les voit pas. Les agriculteurs sont peu nombreux avec des productions variées de sorte qu’ils vivent en silo. Nous avons environs 200 familles agricoles dans Charlevoix qui ont à cœur de préserver leur environnement. Par contre, les agriculteurs et leur relève n’ont pas toujours conscience des impacts du stress au travail », ajoute-t-elle.
Le stress peut être relié à la charge de travail incroyable — les entreprises sont souvent de petite taille, avec peu de ressources financières; le stress peut être associé à la température — il faut s’assurer d’avoir une production qui permettra de boucler le budget; le stress peut aussi concerner le travail sept jours sur sept, à des heures difficiles — il y a parfois peu ou pas de moyen de se reposer et de récupérer. Alors, comment s’en sortir?

« Je suis heureuse qu’il y ait une concertation des organismes qui œuvrent dans le domaine de la santé pour nous soutenir, explique Mme Cadieux, car il y a la disparition d’agriculteurs qui a laissé des traces. On va collaborer si votre comité a besoin de données ».

Deux axes
Le premier axe du comité vise à cibler les travailleurs. « Plusieurs études confirment des taux de détresse et de suicide plus élevés chez les agriculteurs que ce que l’on retrouve dans la société. En effet, 51% des producteurs présentent un taux de détresse psychologique élevé alors que ce taux de détresse rejoint habituellement 20% des Québécois. De leur côté, les agriculteurs demeurent peu enclins à consulter les services psychosociaux », explique Renée-Claude Laroche, membre du CACQVA et formatrice sentinelle. Une sentinelle est formée afin de détecter et supporter une personne vivant un découragement.
Le deuxième axe visera les travailleurs sociaux afin de les sensibiliser à cette industrie et à l’importance d’adapter les interventions à la réalité des producteurs. La très grande majorité des agriculteurs vivent en milieu rural et les points de services peuvent être éloignés du domicile. Ces travailleurs vivent avec des changements de situation rapides comme la température, la naissance d’une bête ou la maladie des animaux. Il faut favoriser l’accès à des interventions téléphoniques ou virtuelles, tout en assurant la confidentialité dans les actions. Il faut être présent au moment opportun.
Le comité a donc élaboré un sondage de 35 questions afin de dresser le portrait de la situation de quelque 550 travailleurs, qui pourront répondre sur papier ou en ligne. Comme deuxième action prioritaire, il y aura une formation sentinelle déclinaison agricole, d’une durée de sept heures.
Les gens peuvent obtenir de l’information par courriel à cacqva@gmail.con ou sur facebook.com/cacqvacharlevoix. Il faut briser l’isolement. L’agriculture, c’est plus qu’une profession, c’est un mode de vie.
 

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