Dossier De la Syrie à Baie-Saint-Paul: La vie sourit aux Hazzouri

Par Emelie Bernier 12:15 PM - 3 janvier 2018
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La famille Hazzouri apprivoise l’hiver. Les enfants s’en donnent à cœur joie! Patinage, ski, bonhomme de neige : l’hiver n’a plus de secrets pour eux. La vie d’avant semble bien loin... Les parents aimeraient bien revoir la Syrie un jour…lorsque la paix sera enfin revenue.

Dans leur petit appartement situé à un jet de pierre du vieil hôpital, Mikhaeil Hazzouri et Zeina Misken se débrouillent bien. L’espace n’est pas très grand, mais ils ont su l’organiser de façon pratique, avec l’aide de tous ceux qui les ont accueilli à Baie-Saint-Paul, il y a presqu’un an maintenant. Leurs enfants Suzana, 8 ans, et Elian, 6 ans, garderont sans aucun doute des souvenirs de la vie en Syrie. Pour la petite dernière, Stéphanie, 3 ans, rien n’est moins sûr…
« Mahaba », lance Mikhaeil et Zeina, un bonjour typiquement syrien pour ces chrétiens orthodoxes qui ont dû fuir la guerre pour protéger leurs enfants. Le voyage a été épique, éprouvant, mais l’arrivée au Québec a eu l’effet d’un baume. « Il y avait de monde à l’aéroport… Des gens du comité d’accueil, Rémy, Touria, André, Carole, Mario, même le maire Jean Fortin! », se rappelle Mikhaeil dans un mélange de français, d’anglais et d’arabe, que Zeina aide à démêler parfois. Celle-ci se dit ravie d’avoir pu compter sur la présence de Touria Ouaan Kour, une « néo-Charlevoisienne » elle aussi arabophone.

L’arrivée à Baie-Saint-Paul, le 21 mars, restera aussi gravée dans leur mémoire. «Pendant 10 jours, peut- être 15 personnes par jour qui venaient aider, faire le ménage, la peinture! Les gens rentraient dans l’appartement, on ne les connaissait même pas! C’était très simple, convivial et les gens ont été très très gentils », se rappelle Mikhaeil.
A part la tonne de photos dans l’ordinateur et quelques souvenirs, ils ont bel et bien laissé leur vie syrienne derrière eux. Aujourd’hui, ils sont de retour sur les bancs d’école pour apprendre la langue mystérieuse et pleine de subtilité de leur province d’accueil. Les cours durent toute la journée, 5 jours par semaine, ce qui laisse peu de temps pour travailler… sans oublier la barrière de la langue. « J’ai lavé la vaisselle au Diapason, j’ai fait un peu la cuisine. Ils sont très gentils, Eve Soulard et Steve Michel, les propriétaires, ils m’aident beaucoup, car ce n’est pas facile d’avoir un employé qui ne parle pas français! Ils sont très très patients », remercie-t-il.

Mikhael et Zeina ont envie de se rendre utile ici. Elle était enseignante au primaire en Syrie. Réalistement, elle sait qu’elle devra faire le deuil de ce métier, mais elle aspire à travailler peut-être avec les enfants, dans un service de garde ou un CPE. Mikhaeil, lui, possédait un magasin d’électronique et vendait des assurances. Il se dit prêt à travailler.
Entre eux, les Hazzouri parlent toujours arabe à la maison. On devine que les enfants se débrouillent plus facilement que leurs parents avec le français. La plus grande, Suzana, intègre d’ailleurs la classe régulière de plus en plus souvent. « Depuis l’arrivée, le matin, on fait des cours de français avec Lojain et Mario (Kamel) et ensuite, on retourne dans la classe. J’aime beaucoup être dans la classe avec les autres. Ce sont tous mes amis… sauf les garçons », rigole la jolie fillette aux cheveux bouclés et aux yeux rieurs. Sur son visage enjoué, rien ne transparaît des années passées dans un pays en guerre. Et pourtant…

Dès le début de la guerre, Mikhaeil et Zeina ont songé à quitter le pays. « Dès qu’Elian est né, on a fait faire son passeport. Et la petite aussi. On voulait être prêt quand l’occasion se présenterait », expliquent les parents.
Puis les bombes se sont mises à tomber. Beaucoup de bombes. « Parfois, il y avait des cessez-le-feu, des accords, mais on ne pouvait jamais trop savoir. On regardait la télé, l’internet. Après quelques années, on pouvait planifier un peu quand il y aurait des bombardements. Par exemple, s’il y avait une rencontre à Genève, on savait qu’il y aurait beaucoup de bombardements et qu’on devrait faire attention. A 6h, le soir, quand le soleil se couche, la vue est moins bien pour les militaires, mais alors l’autre bande attaque. Quand il y a de la brume, on est un peu plus tranquilles… Mais même si on pense prévoir, il y a beaucoup de mauvaises surprises, même dans la nuit », explique Mikhaeil.
Les Hazzouri ont entrepris les démarches pour émigrer en tant que réfugiés et c’est le Canada qui semblait le plus accessible. Le processus aura duré un an et demi, entrecoupé de quelques séjours au Liban où la famille s’entassait dans deux petites chambres, histoire d’échapper quelques temps aux bombardements.


« On ne pouvait pas vraiment choisir, mais c’était plus facile de venir au Canada. Pour L’Europe, il fallait passer pas la Turquie, prendre le bateau, passer par la Grèce et c’était pas bien pour la famille… », racontent-ils. Mikhael, Zeine et leurs enfants sont restés ensemble tout au long du processus. « Certaines familles se séparent mais pour moi, c’était ensemble ou rien », dit le père.

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